Anne-Marie Morice est directrice de la revue électronique Synesthésie (art contemporain), une revue associée au site du Métafort d’Aubervilliers (France).
Selon Edmond Couchot, « Avec le numérique, la présence masquée, au coeur des outils, de la science et de sa rationalité pèse très lourdement sur l’acte artistique mais en revanche, la multimodalité des interfaces, l’accentuation des effets synesthésiques et de l’hybridation des formes qu’elle provoque, l’ouverture sur un espace et un temps différents, prometteurs de découvertes, l’implication du corps et de son expressivité gestuelle dans le dialogue homme-machine, redonnent à la transe des occasions de se manifester que l’art contemporain lui offre rarement. » (La technologie dans l’art, 1998, p. 258)
L’art contemporain a-t-il réellement failli à sa tâche dans l’ordre d’une esthétique de l’exaltation? Et, selon vous, les nouvelles technologies réintégreront-elles vraiment la transe dans l’art?
« Alors, la transe c’est un peu archaïque non? (rires)… ». Le numéro 6 de la revue Synesthésie présente un article très critique de Bruno Guiganti sur la transe dans la culture techno. « Il critique le fait que lorsqu’on a un groupe comme ça, lorsqu’on s’abandonne, il est dangereusement possible de récupérer ces énergies dans un discours autoritaire, faciste…vers une manipulation des foules quoi. ». « Les logiciels font partie du patrimoine humain… il faut donc aussi interrroger les nouvelles technologies. »
« Il faut remplacer l’ontologie par l’épistémologie, voilà c’est ça, je pense que l’ontologie maintenant on ne peut plus en parler avec le numérique. Mais l’histoire n’est pas terminée… »
On a longtemps cru que l’art contemporain, parce qu’il engendrait un méconnaissance en regard du public général, agissait dans un monde relativement parallèle. Avec le recul, on s’aperçoit que la mondialisation a largement affecté le système de l’art contemporain et qu’il n’a pas été épargné par les mouvements socio-économiques occidentaux. On a misé sur les grands centres (musées, biennales, festivals) et sur une homologie quant au contenu, mettant ainsi une pression quasi destructrice sur les épaules des jeunes artistes (de tous les pays concernés par cette internationalisation).
En quoi selon vous, l’interréseau en tant que système de communication ouvert, pourrait changer la donne?
« Hum! Question très profonde hein? Justement, je pense que, enfin historiquement dans les années 70 un mouvement d’artistes a décidé d’agir au coeur de l’institut pour la dynamiter, actuellement il y a une confusion (on en discute beaucoup en France en ce moment) à propos de l’instituion qui récupère la subversion, est-ce normal? On ne sait pas trop, Il y a une volonté affirmée des artistes d’avoir une relation de maturité avec les institutions,… mais aussi d’aller ailleurs, d’être plus près des gens. »
« …peut-être que ça peut changer les choses mais ça je ne l’affirmerais pas, parce que l’avenir des sites Web c’est dans l’hyper-spécialisation,… ciblé sur un public spécifique qui va créer une chaîne d’intérêt de site en site à travers le réseau. »