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Critiques

La dualité du paysage - Isabelle Hayeur

Un horizon immensément lointain nous introduit à l’univers d’Isabelle Hayeur.

Ce vol plané au-dessus des univers tranquilles et des eaux calmes de l’errance grandiose pose son regard sur le paysage. Blake dit :  » Tous les paysages sont un homme vu de loin  » (cité par Ruiz, 1995, p. 82). Cela convient parfaitement au travail d’Isabelle Hayeur. Toutefois, on aurait tort d’y voir une rêverie solitaire portée par des effluves romantiques. En effet, le long d’une plage floue, des personnages nous conduisent littéralement à réfléchir sur les états du paysage. Ce dernier se transforme en une voix intérieure pointant vers les égarements du paysage dans sa rencontre avec de menaçants écoumènes (espaces habitables de la surface terrestre). 

Une philosophie par le visuel, mais aussi un témoignage et une considération poétique, parce qu’il y a des vides à remplir et que les lieux rencontrés sont, par certains côtés, séduisants. Une réunion de lieux qui se métamorphosent sous nos yeux. Des traces et des tracés s’entrecoupent, des points de vue temporels se superposent, se stratifient en autant d’états opposés.

La parcelle, soi et l’autre se confondent et ils nous incombent de créer les liens. L’oeuvre s’intitule Si / Jamais et je vous invite à en parcourir les étendues jusqu’à cette vague qui hante les formes dans un ressac sans fin.

Le langage visuel est simple et efficace, deux qualités imprenables lorsqu’il s’agit du Web. On peut dire que ce type d’oeuvre correspond à un véritable penser multimédiatique.

En plus : Isabelle Hayeur présente des photographies-montages qui sont des variations personnifiées sur le thème du paysage ainsi que quelques extraits de ses créations vidéo. Évidemment, la technologie Web courante ne nous permet pas d’accéder sans attente aux documents lourds que sont les bandes vidéo, ces extraits valent tout de même qu’on y accorde un peu de patience, juste assez pour désirer les visionner d’un bout à l’autre.

On peut lire :  » L’isolement entre le paysage et le personnage établit une dualité qui nous rappelle que la cosmologie occidentale est basée sur une opposition nature-culture. L’aboutissement de cette pensée dualiste a complètement transformé le monde, réduit et altéré notre environnement d’où notre goût pour les paysages grandioses. Les sites touristiques, cette nature, conservée, mise en réserve que l’on va voir à la manière de spectateurs témoignent de notre détachement face à ce monde. L’expérience médiatique remplace de plus en plus l’expérience sensible ce qui nous donne l’impression étrange d’assister au monde plus que d’y participer.  » (Isabelle Hayeur)

Isabelle Hayeur est membre d’un collectif vidéo, Perte de Signal, qui se définit comme suit :

Bibliographie

Ruiz, Raoul, Poétique du cinéma, Paris, Éditions DisVoir, 1995, 117 p.