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Cyberculture

En réseau et hors du commerce

La revue Esse arts+opinions nous a aimablement autorisé à reproduire et mettre à jour cet article.

Cela ressemble un peu à la frénésie qui s’est emparée de la population à la venue de l’an 2000. Tellement, qu’il devient extrêmement rare d’entendre le moindre bémol critique de la part de ceux qui se penchent sur le phénomène. Tout en reconnaissant que le passé et le présent nous semblent parfois insupportables, et que la venue d’un nouveau millénaire peut créer quelques espoirs d’amélioration (espoirs qui ne sont pas nécessairement fondés), on ne peut qu’être surpris que cet engouement s’empare de façon aussi drastique des intellectuels desquels on pourrait attendre des réflexions plus pondérées. Aurait-on peur de passer pour rétrograde si on osait soulever quelques aspects plus négatifs? Devant l’enthousiasme qui fait porter à la technologie le poids de toutes sortes de révolutions, le marché du numérique en profite pour en attirer plus d’un dans son giron.

Le phénomène semble cyclique. Le discours actuel rappelle celui des années 60, qui est aussi l’époque de McLuhan et de son concept de village global — euphorie qui a culminé avec l’Expo 67 à Montréal. Cela me rappelle aussi mes recherches sur la performance qui commençait à se manifester à Montréal vers la fin des années 70 et le début des années 80 : la performance a aussi été l’une de ces formes artistiques qui, dès son apparition, a transporté les théoriciens au-delà de toute commune mesure. Dans le cas des technologies, il s’ajoute un contexte de mondialisation-surconsommation indissociable du développement accéléré des outils technologiques.

À l’encontre de cet enthousiasme excessif de la part de quelques théoriciens, qui n’ont pas nécessairement une expérience pratique, certains artistes laissent entendre un autre point de vue. D’ailleurs, les réflexions théoriques proviennent souvent du milieu des communications — du concept de cultural studies qui ratisse large dans les universités anglophones — et moins du milieu de l’art. À l’encontre des penseurs, les artistes entrevoient davantage de liens de continuité dans l’histoire et dans leur propre pratique. Certains travaillent même à questionner les outils technologiques. 

Je tiens à préciser que je ne suis pas défavorable au développement technologique; il importe cependant de replacer les choses dans une juste perspective. Ce texte s’attarde à pondérer certaines idées exagérées en se nourrissant de réflexions d’auteurs et de propos d’artistes rencontrés à cet effet1. En contrepartie à cette critique, je m’attarderai au contenu de quelques œuvres numériques présentées sur le web.