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Cyberthéorie

L'effet de présence. De l’immédiateté de la représentation dans le cyberespace

À quoi reconnaît-on l’efficacité d’une représentation? 

La réponse est connue depuis l’Antiquité : c’est à sa capacité de rendre présent ce qui ne l’est pas et d’assurer l’illusion d’une présence. Une représentation n’est efficace que si elle parvient à convaincre le sujet qui en interprète les signes – lecteur, spectateur ou témoin –, que quelque chose a commencé à apparaître et que cette présence ne lui doit rien, marquée par un certain dynamisme, par une relative autonomie et par une densité dont l’effet premier est l’impression d’une grande permanence. 

Évidemment, l’efficacité d’une représentation dépend des dispositifs en jeu. Cependant, elle ne dépend pas tant de leur complexité, de leur puissance ou de leur nouveauté que des pratiques qu’ils permettent de développer et des conventions qui se sont déployées à leur usage. Ainsi les procédés littéraires, dramatiques ou cinématographiques tirent leur efficacité générale des horizons d’attente de leurs lecteurs et spectateurs. Leur pérennité est garante de leur pouvoir, puisque leurs effets dépendent d’habitudes déjà établies que des stratégies nouvelles viennent surdéterminer ou, encore, déjouer. 

Trop souvent par contre, on confond l’efficacité des dispositifs et leur complexité ou nouveauté. L‘argument apparaît de façon récurrente dans le discours sur les nouveaux médias et, plus précisément, sur les médias électroniques. Il est vrai que le numérique, dans sa capacité à traiter avec un seul langage, d’origine binaire, des signes de nature diverse, qu’ils soient linguistiques, visuels ou musicaux, a une puissance qui fait rêver. Et on se met à imaginer des représentations d’une incroyable efficacité qui sauront écraser l’espace entre le sujet et l’objet représenté et assurer, par conséquent, une illusion de présence hors de tout contexte. On rêve de représentations qui assureront l’adéquation souhaite entre présence, immédiateté, singularité et interactivité. En fait, l’utopie d’une représentation idéale est celle où ces quatre données sont en synchronie, où elles se répondent et s’alimentent mutuellement, assurant une expérience quasi-transcendante. C’est le mythe de la présence.