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L'émergence du dessin*

Je conduis depuis quatre ou cinq ans cette pratique graphique, qui ressortit au dessin automatique, ou, plus précisément, à une forme dessin automatique qui s’apparente aux griffonnages qu’on appelle dessins téléphone, Il s’agit de dessins à l’encre noire avec un stylobille sur des feuilles de papier blanc. Ces dessins émergent dans le même type de conditions que le dessin téléphone, à savoir une écoute que l’activité non délibérément dirigée de la main sur la feuille permet paradoxalement de renforcer, un peu comme le fait de tricoter pendant une conversation. Ils sont produits dans des réunions où j’ai besoin d’avoir une attention captive. En fait, ils n’étaient à l’origine, à la toute première origine, qu’une succession de traits tracés de façon plus ou moins compulsive qui donnait des patterns évoquant un peu le principe de l’arabesque. Ces griffonnages n’avaient pas d’autre avenir que le classement éventuel de la feuille en fonction des notes que j’y avais déposées.

Les choses ont réellement commencé à évoluer lorsque, de façon fortuite probablement, je ne saurais pas dire précisément comment c’est venu, je me suis mis à accompagner ces traits de micro-surfaces dans lesquelles j’ai varié la pression du stylo sur la feuille. Je ne pense pas que les frères Bíró, à qui on doit la mise en forme technique définitive du stylo à bille, aient pensé que leur outil pouvait avoir une telle diversité de trace graphique à son usage, mais le fait est qu’il permet une très grande modulation qui n’est pas sans rappeler celle de la mine graphite. Les modulations dans ces micro-surfaces sont rapidement devenues des modelés. Je rappelle pour mémoire que le modelé renvoie, selon le Larousse, à : « Relief réel ou simulé des formes en sculpture, en peinture, etc.1 » Nous n’étions donc plus dans le domaine de l’arabesque, qui renvoie au plan, mais dans une structuration tridimensionnelle, simulée, du moins, pour reprendre les termes du Larousse. 

Dès lors, naissait quelque chose qui posait problème en ce sens que se créait un micro-univers figé (hors du processus d’effectuation, bien sûr) qui, en peu d’espace, fait apparaître une structure plastique fortement structurée qui tient de la germination dans son processus et de la lithification dans son résultat. Ces structures acquéraient ainsi une personnalité plastique forte au point que je ne pouvais plus les évacuer comme je le faisais avec les quasi-arabesques. Ces dessins étaient des mondes et, en tant que tels, avaient leur propre autonomie sémiotique. J’ai donc conservé les feuilles non plus pour ce qui était écrit dessus mais pour ce qui était dessiné dessus. 

Si, au début, ces dessins ne duraient, dans le temps de leur construction, que le temps de la réunion qui les avait impulsés, certaines réunions pouvant durer parfois toute une journée, je me suis retrouvé avec des dessins qui couvraient une surface relativement importante. D’ailleurs, assez rapidement, le dessin occupait le centre de la feuille et les notes la périphérie. Depuis un an maintenant, ces dessins sont l’objet d’une feuille particulière, rapidement passée au format 21×29,7 centimètres. Le dispositif est le même, ce sont toujours des dessins effectués sans intention initiale autre que le fait de faire un dessin, mais leur effectuation s’effectue sur plusieurs séances et que le dessin s’interrompt définitivement lorsque j’ai décidé que la façon dont il occupe la feuille justifie cette interruption.

À ce stade du processus, ces dessins n’ont pas pour fonction de faire œuvre en tant que telle. Ils sont systématiquement numérisés à très haute résolution sans que leur destination ne soit nécessairement déterminée. J’ai fait un premier travail de monstration il y a trois ans pour une exposition personnelle. Les dessins en tout petit format avaient été agrandis sur de grandes bâches blanches de 2×1,5 mètres. Le résultat était intéressant visuellement mais ne me convenait pas tout à fait. Il y a une dimension d’ordre virtuel dans ces dessins que le tirage sur bâche figeait un peu trop. J’y reviendrai. La dernière expérimentation que j’ai mise en œuvre tout récemment, pour les dessins de plus grand format, consiste à les laisser sur support électronique en les diffusant sur des écrans plats grand format posés verticalement et d’incruster dans une zone précise, déterminée après coup, une courte séquence vidéo plus ou moins repérable. Elles sont prévues pour être accompagnée d’une création sonore.

En revoyant ces dessins pour la rédaction de ce texte, me vient à l’esprit une réflexion que je m’étais déjà faite auparavant, d’ailleurs, c’est que dans la continuité stylistique qui marque indubitablement cette série, il y a au moins un élément récurrent c’est l’évocation du repli cutané. Certes, il s’agit d’une peau d’une très grande flaccidité. Heureusement pour chacun de nous, cet état de flaccidité est exceptionnel. De fait, il renvoie plutôt à l’idée de la peau déshabitée des écorchés comme on peut le voir encore sur les gravures de Valverde. Mais il peut être intéressant ici de faire un détour par l’apôtre Barthélémy dont le martyr a consisté à être écorché vivant. La légende veut que l’objectif de cet écorchage fût de rendre apparent le corps de chair et de sang que cachait cette peau et, du coup, du moins peut-on le supposer, de montrer à tout le monde que le saint n’était somme toute qu’un homme comme les autres et qu’il n’était qu’un imposteur. On en retrouve l’image dans Le jugement dernier de Michel Ange, mais aussi, semble-t-il, à travers cette statue abritée par la cathédrale de Milan et qui date aussi de la Renaissance. À noter pour l’anecdote et avec un peu de chauvinisme, que Saint Barthélémy fut aussi décapité et que sa tête est à Toulouse. 

Ces espèces de restes cutanés, mais certaines figures peuvent faire penser a aussi à des restes organiques, pourraient évoquer une sorte de déposition sur la feuille de couches dermiques ou organiques. Balzac disait de la photographie qu’elle consistait à chaque fois un prélèvement des multiples couches qui composent le corps. Peut-être pourrait-on évoquer alors l’idée que ces dépositions cutanées et organiques sont à chaque fois des couches du corps de l’artiste. Non pas de l’individu anecdotique plongé dans le continuum de son histoire, mais le corps symbolique de l’artiste dans son rapport à l’œuvre en train de se faire.

On pourrait faire aussi l’analogie entre la trace laissée par l’encre sur la feuille et la trace laissée par l’encre sur la peau lors des tatouages. Il y a certes un peu de ça. Mais, comme pour les tatouages de Culture de peaux d’artistes, la trace laissée par l’encre sur la feuille est en quelque sorte destinée à être prélevée. Non pas physiquement mais numériquement. Les dessins sont scannés à haute résolution et nettoyés de toutes les traces que laisse inévitablement le grain du papier à de telles résolutions. C’est donc d’un dessin véritablement dématérialisé qu’il s’agit, dématérialisé par l’élimination logicielle des traces de la matière papier et dématérialisé car ce qui reste en fin de compte, à ce stade du processus, n’est qu’un fichier virtuel. Les dessins ont pour finalité théorique d’être agrandis considérablement pour être imprimés, mais pas seulement, sur de grandes surfaces. J’ai tiré et exposé une dizaine des ces dessins sur des bâches blanches, mais à dire vrai, il ne s’agit que d’un support à un moment donné qui n’engage en rien d’autres possibilités. La matrice est stockée en mémoire et peut être indifféremment utilisée par la suite.

On pourrait faire l’analogie aussi avec la peau. La matrice virtuelle constitue une sorte de peau qui peut se greffer sur le support choisi par déposition. Mais, au même titre que toute œuvre d’art, cette matrice, et surtout son actualisation sur un support, n’est que la peau de l’œuvre. Elle l’est pour les raisons que j’ai évoquées précédemment, à savoir qu’elle ne constitue que la partie visible du processus qui lui a permis d’émerger. Mais ce qui me semble intéressant dans ce processus n’est pas tant la dimension graphique en tant que telle, que  l’émergence esthétique des formes sur le papier. De fait, ces dessins sont autant une production artistique que scientifique.

Ils m’ont permis de développer une analyse systémique sur les processus poïétiques qui ont permis leur émergence. Et l’analyse que je propose de ces processus n’est pas seulement technique ou sémiotique, mais tente d’aller au plus profond du rapport entre le corps créant et l’œuvre en train de se faire. Et quand je parle de corps créant, c’est y compris dans sa dimension physiologique. C’est-à-dire les processus physiques et mentaux mis en œuvre dans leur articulation relative, et la façon dont ils font sens au regard de la poïèse de l’œuvre prise comme système. 

La rigueur que suppose une démarche scientifique s’accommode mal de l’introspection, aussi l’analyse que je propose de ces processus dans le cadre de cette recherche qui a été amorcée il y a bientôt quatre ans procède d’une ipséité qui m’efface à moi-même en tant que sujet émotionnel. Ce qui m’intéresse donc à l’occasion de cette pratique, n’est pas d’explorer les manifestations de l’inconscient à travers ses pulsions. Je ne cherche pas à prolonger le procédé surréaliste dans ses relations à la psychanalyse. Ce qui m’intéresse davantage ici, c’est la dimension poïétique du dispositif, en quoi le processus poïétique peut faire système, et en quoi cette dimension systémique peut nous conduire à interroger la création artistique en articulation avec les paradigmes contemporains. 

Le dessin sans dessein

Ce qui caractérise le dessin automatique, c’est le fait que l’œuvre se construit sans dessein préalable. En dehors du fait que le stylo-bille s’est logiquement imposé parce qu’il sert initialement à prendre des notes et que, par glissement, c’est le même outil qui sert à dessiner, il n’y avait aucune volonté délibérée dans son emploi. Il s’est néanmoins rapidement avéré que cet outil offre des possibilités techniques très riches dans le développent des dessins par le fait qu’il permet un travail de modelés très étendu en même temps que l’encre noire définit des contrastes marqués.

Le principe même de ces dessins relève selon moi d’allers-retours permanents entre ce que Damasio nomme le « protosoi », le « soi-noyau », et le « soi autobiographique ». Damasio distingue en effet trois types de soi : « le protosoi et ses sentiments primordiaux, le soi-noyau orienté vers l’action ; et enfin le soi autobiographique qui incorpore les dimensions sociales et spirituelles. » (Damasio, 2012, p. 18) Damasio insiste bien sur le fait que ce ne sont pas des structures figées mais des processus dynamiques qui se modèlent au gré des circonstances. 

Pour définir ce type de pratique, je dirais que nous sommes dans un processus d’émergence, et plus précisément, de complexité émergente. Le processus initiateur consiste en quelques traits qui n’ont aucune signification représentationnelle. Ce sont des traits jetés au hasard. Un trait noir sur un fond blanc définit déjà, en soi, un espace, même s’il ne constitue pas une figure fermée, un espace à trois dimensions. Ce n’est pas seulement une surface, quelle que soit son épaisseur, mais, il crée visuellement un espace qui s’inscrit sur deux plans différents. La pression variée des doigts sur le stylo, et donc sur la feuille, permet d’obtenir des gris variés qui, en fonction de leur organisation, donnent une impression de modelé et renforcent ainsi l’illusion de tridimensionnalité de l’espace figuré. Le trait, par cet effet de modelé, se trouve ainsi visuellement transformé en pli, en interstice et inverse le rapport spatial en inscrivant le blanc de la feuille non plus en arrière plan, mais dans un premier plan que le modelé exhausse. Le stylobille présente l’avantage d’une grande souplesse d’utilisation, mais il peut avoir l’inconvénient de l’irréversibilité. La souplesse permet, en fonction de la pression exercée, d’obtenir des valeurs de gris différentes qui peuvent donner lieu à des apparences de modelé. 

Il y a donc irréversibilité dans le dispositif. Elle, est due au fait que la matière déposée par la bille est de l’encre et que son dépôt est définitif. Il s’agit donc de deux paramètres qui, avec la feuille blanche comme fond, vont contribuer à déterminer les conditions d’émergence de l’œuvre. Ce sont des paramètres matériels. S’y ajoute un paramètre de principe, les dessins ne répondent à aucun projet initial plus ou moins formalisé, ce qui n’exclut pas l’émergence d’un style, mais j’y reviendrai plus loin. Un trait en entraine un autre, une forme en entraine une autre, sans que cela s’inscrive dans un pattern préétabli. Ce sont des dessins sans dessein. L’organisation des traits, des formes, entre eux ne répond à aucune autre logique que celle de l’émergence dialectique qui naît de l’autonomie sémiotique de l’œuvre. Un trait noir sur le blanc de la feuille définit un espace, aussi peu épais que soit ce trait. Dès lors que ce trait est augmenté d’un modelé, il induit virtuellement un espace en trois dimensions. La logique interne de l’œuvre en train de se faire implique son propre développement par adjonction d’autres éléments, mais chaque trait supplémentaire intervient comme un bruit qui perturbe l’agencement obtenu. 

Rien d’exceptionnel dans ce procédé qui est caractéristique de tout procédé graphique qui s’élabore sur un fond clair. Mais, de manière générale, ce procédé est utilisé pour représenter une image figurative qui renvoie, analogiquement ou fictionnellement, à une réalité acceptable, c’est-à-dire que les éléments constitutifs de l’image ainsi créée sont nommables, repérables, formant de façon plus ou moins directe des analogons au monde physique qui nous entoure. La composition s’organise relativement à la fonction figurative de chacun des éléments représentés, même lorsque cette fonction procède d’un glissement sémantique (je pense notamment aux œuvres surréalistes d’un Magritte ou d’un Dali).

La série Tentative de lecture cristalline relève d’une autre logique. La composition s’organise sur un principe automorphe. Chaque intervention graphique, loin de s’inscrire dans une articulation logique répondant à un projet initial, va intervenir comme un bruit qui perturbe à chaque instant le dispositif graphique qui se construit petit à petit. Ce bruit va informer le dispositif en l’obligeant, de façon coactive avec l’auteur, à se réorganiser pour intégrer le bruit de façon à rétablir l’équilibre rompu. On retrouve ici la description que fait   Atlan des systèmes auto-organisateurs :

« Si, sous l’effet de ces perturbations aléatoires, le système, au lieu d’être détruit ou désorganisé, réagit par un accroissement de complexité et continue de fonctionner, nous disons alors que le système est auto-organisateur. Bien sûr, il est vrai qu’il ne s’agit pas non plus, strictement, d’auto-organisation, puisque le système reçoit des impulsions de l’extérieur ; mais ces impulsions étant aléatoires, sans relation causale avec l’organisation passée ou future du système, nous pouvons dire du système qu’il s’auto-organise en ce qu’il y réagit néanmoins sans être désorganisé, mais au contraire en accroissant sa complexité et son efficacité. En d’autres termes, la propriété d’auto-organisation paraît liée à la possibilité de se servir de perturbations aléatoires, de “bruit” – pour produire de l’organisation. » (Atlan, 1979, p. 166-167)

Dire que le dispositif mis en place ici est un système auto-organisateur, stricto sensu, est sans doute aller un peu vite en besogne. Néanmoins, il est une réalité, c’est que ce dispositif fait système dans la mesure où il s’articule à un processus méthodologique pérenne dont les variables sont constitutives du système lui-même. Ce qui fait système, c’est l’émergence chaotique de figures qui se construisent dans un déroulement qui va de l’entropie à la néguentropie pour revenir à l’entropie. L’entropie initiale, c’est la feuille blanche. C’est un espace où la tension des forces du chaos originel que représente l’acte créateur en puissance procède d’un équilibre maximal. Et ce jusqu’à l’apparition du premier trait qui va servir de déterminant inchoatif à la mise en route du système processuel qu’est l’œuvre en train de se faire. La poïèse du procès, elle, est d’ordre néguentropique. Elle procède d’un déséquilibre constitutif. Chaque trait, chaque geste graphique, s’inscrit dans une articulation dialectique déséquilibre/équilibre. Jusqu’à un nouvel état entropique, du point de vue du système lui-même, qui est le stade où la logique compositionnelle intrinsèque, l’autonomie sémiotique du système graphique émergé, ne permet plus d’intervention supplémentaire.

Chaque trait fonctionne comme un germe cristallin qui produit un ensemencement  d’éléments qui vont s’organiser en formes plus ou moins complexes dans une espèce de processus de polymérisation. Toute la poïèse de l’œuvre s’organise sur une relation extrêmement mêlée entre action non déterminée et processus d’évaluation. Pour l’essentiel, les interventions sont de l’ordre de l’inconscient, mais avec des degrés divers. Puisqu’il n’y a pas de dessein initial, l’émergence de l’œuvre dépend essentiellement de processus aléatoires. Rien ne justifie a priori  que tel trait, ou tel griffonnage, apparaisse à tel endroit plutôt qu’à tel autre, la seule règle étant une règle de proximité territoriale du fait du principe de germination et encore, ne s’agit-il pas d’une règle clairement définie ni énoncée. L’ensemble se construit par contamination proxémique. L’espace est petit à petit envahi par un mode de développement qui n’est pas sans rappeler celui des cultures biologiques (cultures de bactéries, cultures tissulaires…, c’est-à-dire selon une auto-organisation (de type faible, déterministe). Il s’agit d’une croissance extensive qui s’organise en fonction des nécessités internes de l’œuvre liées à son autonomie sémiotique. 

La main ne sait pas a priori ce qu’elle dessine jusqu’à ce qu’une forme émerge qui soit comprise comme forme, au moins potentielle, sans qu’elle renvoie nécessairement, c’est même généralement le cas, à un procès figuratif. Quand je dis « comprise », il ne s’agit en aucun cas de processus conscient. Le cerveau analyse les traits qui naissent sous le stylo essentiellement d’un point de vue vaguement connotatif qui renvoie à des patterns routiniers, ceux de la dextérité inconsciente, de la dextérité qui doit son efficacité à l’inconscience du geste. Nous sommes incontestablement dans un dispositif d’évolution générative, avec les processus de rétroaction que cela implique, y compris avec le principe de récompense que cela induit. Il y a une co-évolution dialectique du local au global caractéristique des boucles de rétroaction (le local étant l’espace et le moment précis d’inscription du trait et le global, à la fois l’ensemble sémiotique qui se construit en même temps que le système corporel dans lequel s’inscrit le processus) comme l’explique Varela : « C’est cette notion de boucle qui fait que le local et le global ne sont pas séparables. Le global va contraindre et même définir les agents locaux et, en même temps, les agents locaux sont les seuls responsables de l’émergence de la totalité. » (Varela, 2002)

La part de l’inconscient

Il y a un aller-retour dialectique permanent entre l’œuvre en train de se faire et mon intervention en tant qu’artiste. Si je parle de l’œuvre en train de se faire, il faut rappeler que nous ne sommes pas dans un processus génératif au sens numérique du terme. L’ordinateur n’a rien à voir dans le processus en tant que tel, à l’exception de la numérisation du dessin et de son agrandissement. Mais je peux néanmoins parler de l’œuvre comme un sorte de processus autonome car, dans le dispositif que j’ai choisi en tout cas, l’œuvre s’organise sur sa propre logique, ce que j’appelle donc l’autonomie sémiotique. L’œuvre se construit par une logique de prise de possession de l’espace dans un échange qui fait intervenir à la fois des rapports graphiques (noir, gris, blanc), des rapports de volume (profondeur, surface) et des rapports de composition (équilibre, déséquilibre). Cela n’exclut bien sûr pas une forme de jugement, ne serait-ce que d’ordre esthétique, mais nous verrons plus loin que la nature de ce jugement est en grande partie de l’ordre de la fonction fitness. Un espace blanc, par exemple, peut ou ne peut pas être investi par de nouveaux modelés. Il peut même ne pas l’être à un moment donné et le devenir par la suite, sachant que le processus inverse est impossible. De la même façon, un espace blanc, qui, dans la logique de l’œuvre renvoie à des volumes au premier plan, peut nécessiter la présence contiguë d’espaces foncés, voire complètement noirs qui renvoient, eux, à un arrière plan plus ou moins éloigné. Les dispositifs graphiques utilisés ont eux-mêmes émergé sans parti-pris initial. Ils ont été retenus dans leur relative variété, par essai-récompense, pour la possibilité qu’ils offrent, en fonction de la pression exercée sur le stylobille, d’une palette importante de valeurs de gris qui contribue à l’organisation de l’espace.

Ici, l’inconscient n’est abordé que comme élément constitutif du système que constitue l’œuvre en train de se faire dans sa relation avec l’artiste actant. Il y a inconscient parce qu’il n’y a pas volonté délibérée de construire un ensemble formel qui actualise de façon plus ou moins satisfaisante une, ou des, images mentales préalables plus ou moins élaborées. L’inconscient serait plutôt ici de la non conscience, mais les choses sont plus complexes, car il va de soi qu’un tel travail nécessite au moins d’être conscient que je suis en train de le faire, même si tout ce que je fais n’est pas délibéré.

Ces dessins m’ont permis de développer une analyse systémique sur les processus poïétiques qui ont permis leur émergence. Et l’analyse que je propose de ces processus n’est pas seulement technique ou sémiotique, mais tente d’aller au plus profond du rapport entre le corps créant et l’œuvre en train de se faire. Et quand je parle de corps créant, c’est y compris dans sa dimension physiologique. C’est-à-dire les processus physiques et mentaux mis en œuvre dans leur articulation relative, et la façon dont ils font sens au regard de la poïèse de l’œuvre prise comme système. La rigueur que suppose une démarche scientifique s’accommode mal de l’introspection, aussi l’analyse que je propose de ces processus dans le cadre de cette recherche qui a été amorcée il y a bientôt quatre ans procède d’une ipséité qui m’efface à moi-même en tant que sujet émotionnel.

Si le cours de la pointe du stylo sur la feuille n’est pas un acte dont la direction ni l’orientation ne semblent véritablement délibérées, et en ce sens, il pourrait ressortir au soi-noyau, l’émergence crée des formes qui impliquent des choix allant d’une simple organisation spatiale locale à des choix compositionnels plus complexes et plus globaux qui introduisent des comportement cognitifs relativement primitifs tels que l’équilibre de l’ensemble. On retrouve déjà ce comportement chez les primates. Lestel relate l’expérience d‘un chimpanzé qui produit des œuvres picturales en notant « Un sens certain de la conception s’en dégage, ainsi qu’une capacité réelle à développer des structures qui insistent sur les arrangements symétriques. » (Lestel, 2001-2003, p. 227). L’intervention du soi-autobiographique dans le processus permet que les compositions proposées ici ne relèvent pas que de la simple symétrie, mais d’une organisation plus complexe qui inclut des connaissances culturelles, notamment. Mais le soi-auto-biographique permet aussi de donner sens, plus ou moins formalisé, plus ou moins complexe, à un ensemble graphique et aura nécessairement une incidence sur le cours de la production autant que sur l’image finale en déterminant par exemple le point précis où le processus est considéré comme achevé.

Cela ne signifie pas pour autant que tout le procès soit guidé par l’inconscient. Certes, la dimension aléatoire est un élément déterminant du procès. À la fois parce que ce que je nomme plus haut les actions spontanées ne s’inscrivent pas dans une action volitionnelle dont les schèmes auraient été relativement définis. Il y a forcément volonté de tracer un trait ou une forme avec le stylo en soi. Le stylo n’atterrit pas par hasard sur la feuille, il faut bien qu’il y ait eu, à un instant donné, la volonté d’initier l’œuvre. Toute action volitionnelle suppose une formalisation virtuelle de cette action par le cerveau. Si je peux me saisir de tel objet, c’est parce qu’au préalable j’ai organisé mentalement, la représentation de cet acte. Idem, donc, pour le stylo sur la feuille. Les actions nécessaires au trait que je trace ressortissent à des schèmes particuliers qui associent feuille, stylo, dessin, et qui ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux qui associent feuille, stylo, écriture. Berthoz et Petit expliquent bien ce processus :

« […] le cerveau, pendant cette période précise, sélectionne les éléments du répertoire moteur qui vont être les plus pertinents pour l’action, ce qui suppose que le but de l’action soit en quelque sorte déjà présent (sans quoi on ne pourrait pas parler de décision), puisque c’est lui qui va diriger ce processus de sélection. Donc il ne s’agit pas simplement d’une montée d’activité, mais de toute une série de processus qui impliquent des comparaisons. » (Berthoz et Petit, 2006, p. 68)

Mais ces schèmes sont suffisamment globaux pour ouvrir de multiples possibles quant à leur mise en œuvre. C’est ce que Berthoz et Petit mettent en évidence du point de vue physiologique :

« […] le cerveau n’a à contrôler que des variables globales du mouvement et non chaque muscle individuellement. Des simplifications semblables sont trouvées dans les systèmes perceptifs, comme la similarité des plans de l’espace dans lesquels est analysé le mouvement du monde visuel par la vision et le système vestibulaire. » (Berthoz et Petit, 2006, p. 157-158)

Mais, dans le déroulement du procès de l’œuvre, en ce qui nous concerne ici, il y a une part d’intervention qui, si elle n’est pas totalement délibérée, suppose une relative conscience des gestes mis en œuvre et des raisons pour lesquelles ils sont mis en œuvre. C’est ce que j’appellerai les actions computationnelles semi-conscientes ou conscientes. L’autonomie sémiotique de l’œuvre exige de faire des choix quant à l’organisation des signes qui la composent. Il y a une logique interne de composition qui implique de revenir sur telle ou telle forme, ou de faire émerger d’autres formes pour des questions d’harmonie globale. Certes, nous sommes d’accord pour admettre que cette nécessité est dictée par une coévolution de l’œuvre et de la perception que j’en ai en tant qu’artiste actant. Et que cette perception est parfaitement subjective, comme toute perception d’ailleurs. Elle est liée à la façon dont ma singularité d’artiste me permet à la fois d’intégrer et de prendre mes distances avec le substrat culturel, les représentations du monde, que j’ai construit ou assimilé dans ma construction en tant qu’artiste.

Mais dans le cadre précis du complexe systémique œuvre-artiste que je développe ici, tout ce qui ressortit au bruit peut, à un moment donné du processus, fonctionner comme une erreur qu’il convient de rectifier. L’erreur est inhérente au processus de création artistique, elle le nourrit, même, puisqu’il s’organise sur un principe d’expérimentations. Mais ici, l’erreur est constitutive même du processus.  Elle l’alimente en ouvrant un nouveau champ de possibles. Atlan nous propose une analyse des systèmes qui déroule un processus similaire : 

« Soit un système exposé à un certain nombre de perturbations différentes possibles. Il a à sa disposition un certain nombre de réponses. Chaque succession perturbation-réponse met le système dans un certain état. Parmi tous les états possibles, seuls certains sont « acceptables» du point de vue de la finalité (au moins apparente) du système, qui peut être sa simple survie ou l’accomplissement d’une fonction. La régulation consiste à choisir parmi les réponses possibles, celles qui mettront le système dans un état acceptable. » (Atlan, 1979, p. 42-43)

Ce qui caractérise tout système auto-organisateur, c’est sa capacité à intégrer les perturbations sans qu’elles constituent un danger pour la survie du système lui-même, étant entendu que le système trouve sa limite quand il n’est pas en capacité d’intégrer certaines perturbations. J’ai, précédemment émis une réserve sur la qualité auto-organisationnelle du dispositif mis en place dans le cadre de ces œuvres. Les œuvres, en tant que telles, ne procèdent pas de ce type de dispositif. Mais le couple artiste-œuvre qui se construit à cette occasion forme indéniablement système, et la logique propre qu’il fait émerger, conduit à tempérer cette réserve. Dans le temps de l’effectuation, le système dépasse l’œuvre et l’artiste, pris isolément, pour constituer une entité à part entière. On retrouve ici l’interrogation que portait Foucault dans Des mots et des choses, où il annonçait la fin de l’humain, en tant que concept historique, du fait de  son dépassement, de sa dilution, par les systèmes (psychanalyse et linguistique à l’époque, mais la pensée systémique a beaucoup avancé depuis). 

Le dessin se construit  sans projet, nous l’avons vu, dans une situation de « lâcher prise » où le corps, la main en l’occurrence, s’active en dehors de toute information consciente du cerveau. Le stylobille appareillé à la main, ou la main appareillée au stylobille, forment une unité prothétique qui semble se désolidariser du cerveau tout occupé qu’il est, concentré, même, sur le discours que tient l’orateur, ou que tiennent les orateurs, dans le temps et l’espace de la réunion (de travail généralement) qui contextualise ce procès.

Que le stylobille fonctionne comme prothèse, c’est chose relativement logique, on peut considérer quelque part que tout outil a une fonction prothétique par le fait qu’il prolonge le corps, il supplée même aux insuffisances du corps dans l’accomplissement de tâches spécialisées, aussi rudimentaires soient-elles. En l’occurrence, le stylobille est un outil graphique à partir du moment où il est conduit avec la main dans l’exécution d’un geste spécialisé, dans ce cadre là, celui qui consiste à faire émerger des lignes, des formes qui finiront par constituer un dessin. Lorsque l’utilisation de l’outil  s’effectue avec une maîtrise technique élevée, le dispositif prothétique formé par la main prolongée par l’outil graphique, quel qu’il soit, permet une connexion quasi directe du cerveau à la surface d’inscription de sorte que l’effectuation du geste n’est parasitée ni par une résistance de la main qui peine à effectuer le projet, ni par celle de l’outil qui résiste à la manipulation. Le cerveau ne pense pas le bloc main-stylo, en l’occurrence,  parce que le geste attendu n’a plus besoin du processus computationnel inhérent à tout processus de maîtrise, mais on peut considérer que dans le temps de l’effectuation, le stylo est plus qu’un prolongement de la main et que le couple ainsi formé est un véritable hybride. « Nous sentons la pointe du stylo comme le bout d’un doigt. » (Berthoz, 2002, p. 169), nous dit Berthoz. Même si les choses sont loin d’être aussi simples parce que l’actualisation d’un projet d’intervention graphique est rarement le résultat mimétique du projet qui l’initie — notamment parce que le projet qui l’initie est rarement formalisé au point de permettre cette mimésis — l’adéquation entre le résultat et l’intention est suffisamment performante pour être acceptable en tant que telle dans la logique du processus. 

Métaphoriquement, au moins, mais ne sommes-nous que dans la métaphore ?, l’œuvre procède d’un processus co-évolutif. Même si nous ne sommes pas dans la même logique systémique, il y a une parenté qui me semble évidente entre le dispositif mis en œuvre dans ces dessins automatiques et le système de construction de niches qu’utilise McCormack pour le dessin génératif. J’émets l’hypothèse que le dispositif que j’ai mis en œuvre est un dispositif qui fait système en tant que tel, même si, comme toute œuvre d’art, il n’est pas réductible à cet aspect. Et qui plus est, c’est un système non fermé puisqu’il se déroule sur un schéma évolutionniste du fait de l’interaction constante de ses éléments constituants, et du fait que cette interaction, par l’échange réciproque d’informations dont elle procède, entraine une évolution réciproque de ses composants dans le temps de l’œuvre en train de se faire. J’évoquais plus haut l’hypothèse d’une nature auto-organisationnelle de ce système à partir de la définition qu’en donne Atlan. Il me semble que du point de vue du fonctionnement du système d’un point de vue cognitif, cette hypothèse est finalement tout à fait vérifiable.

La main prothétique

Tout cela est vrai quelle que soit la nature du processus graphique. Le corps prothèse est en tension permanente avec le support d’émergence. Mais là où le processus décrit ici inscrit en quelque sorte une relation linéaire  du cerveau à l’espace d’inscription, le processus que je mets en œuvre dans le cadre des dessins automatiques qui m’intéresse ici, s’il conserve nombre des éléments du processus décrit plus haut, en diffère néanmoins pour une raison essentielle, c’est que le cerveau n’est pas dans une dimension d‘intentionnalité dans son rapport au bloc prothétique main-stylobille. Même si on ne peut évidemment pas éliminer totalement l’éveil du cerveau à telle ou telle étape du processus, il n’en reste pas moins globalement absent d’un point de vue volitionnel puisqu’il est tendu par l’écoute attentive. Les formes émergent donc in abstracto et se construisent sur un pattern relativement autonome. Nous ne sommes plus ici dans un processus linéaire, mais dans un processus de diffraction (davantage que dans le processus fractal dont parle Stelarc). La construction formelle du dessin se fait par saccades territoriales où le cerveau n’intervient que par un phénomène de déflexion2, quand le geste butte, qu’une forme particulière émerge référentiellement, ou que la structure en procès s’épuise localement.

Le fait qu’il n’y ait pas de dessein au dessin le fait émerger dans une logique de dissémination métastasique qui renvoie plus à une structure réticulaire qu’à une structure linéaire. Les figures se développent dans une articulation qui évoque le principe de la construction des niches tel que l’a développé McCormack pour ses dessins génératifs. Le dessin se construit dans un espace territorial qu’il colonise jusqu’à saturation de cet espace. La saturation n’est pas nécessairement une surabondance de traits noirs mais elle peut résulter de l’impossibilité structurelle de faire émerger une nouvelle forme pour des raisons liées aux nécessités internes de la composition.

Le couplage main-stylo saute comme cela d’un micro espace à un autre micro espace, investissant de nouveaux territoires, réintervenant dans des territoires déjà conquis, prolongeant des motifs provisoirement bloqués, etc. En fait, l’absence de dessein en même temps que la structure réticulaire font qu’il n’y a pas de centre au dessin, que chaque opération fait naître de nouveaux possibles et que l’ensemble de la composition co-évolue de façon dialectique. La seule limite étant fixée par le temps, chaque composition ne se cristallise réellement qu’au moment où j’ai décidé que la construction avait atteint un stade d’équilibre compositionnel satisfaisant. Mais c’est une limite parfaitement arbitraire et on pourrait très bien imaginer que les métastases continuent à se développer de façon quasi infinie si tant est qu’elles ne soient pas limitées par la surface d’inscription.

C’est la raison pour laquelle le cerveau est à la fois obligé de dé-penser la prothèse – si on admet que la pensée est nécessairement consciente – pour que les conditions d’émergence du dessin soient réunies, mais aussi de se détourner très fréquemment de l’attention fixée sur le discours de l’intervenant sans perdre pour autant le fil de ce discours. Le processus est à chaque fois de l’ordre de la milliseconde et l’attention portée par le cerveau à chaque micro événement est généralement de l’ordre de l’inconscient. Mais il peut se faire qu’un moment d’attention un peu plus soutenu soit nécessaire lorsque le cerveau doit opérer des choix graphiques ou spatiaux qui, sans nécessairement convoquer une opération consciente, exige plus qu’une simple transmission neuronale pour activer le couple prothétique main-stylobille. Des formes émergent, parfois, qui évoquent des images référenciables, par exemple, et il y a à faire un choix sur le fait d’éliminer cette référenciabilité, l’assumer, jusqu’où ?

Dans le cas précis des dessins automatiques dont il est question ici, la prothétisation du corps s’inscrit dans un processus de dissémination. La diffraction du corps qu’implique cette pratique s’inscrit dans le paradigme rhizomatique tel que l’ont défini Deleuze et Guattari : « Le rhizome procède par, variation, expansion, conquête, capture, piqûre. À l’opposé du graphisme, du dessin ou de la photo, à l’opposé des calques, le rhizome se rapporte à une carte qui doit être produite, construite, toujours démontable, connectable, renversable, modifiable, à entrées multiples, avec ses lignes de fuite. » (Deleuze et Guattari, 1980, p. 32) Si le dessin ou la photo, ou le calque, procèdent d’un dispositif prothétique non rhizomatique, c’est parce qu’ils s’énoncent dans une relation linéaire à la réalité visible, même s’ils ne le précisent pas, en ce qui concerne le dessin, le fait que Deleuze et Guattari l’aient associé à la photo et au calque indique bien dans quel champ ils le situent.

Or, dans les dessins automatiques que je propose, nous sommes bien dans un processus de « variation, expansion, conquête, capture, piqûre ». C’est visiblement ce qui se passe au niveau de la feuille de papier qui sert de support d’inscription, mais c’est aussi ce qui se passe au niveau du corps dans son rapport au couple prothétique main-stylobille. Le corps s’instaure dans deux espaces connexes et poreux. Connexes, parce que ce qui se passe dans l’espace du dessin est dissocié de ce qui se passe dans l’espace du cerveau attentif. Poreux parce que ce qui se passe dans l’espace du dessin induit un comportement déflexif3 de la part du cerveau. Mais, par delà, on peut considérer que la relative autonomie du processus graphique instaure la prothèse main-stylobille non pas dans un prolongement organique du corps, mais comme une connexion d’ordre réticulaire. Même si, biologiquement, la main reste attachée au corps, et surtout au cerveau qui l’anime, nous sommes à un niveau d’échange informationnel bas entre la main et le cerveau au même titre que les prothèses technologiques (Smartphones, Internet, etc.). En effet, plus l’échange informationnel est bas entre la prothèse en tant que telle (je ne parle pas ici de l’information à laquelle donne accès le dispositif) et le corps, plus le rapport entre le corps et le dispositif est efficace.

Reste que, du point de vue du processus, ces dessins ne constituent qu’une étape par rapport à l’ensemble, même si c’est une étape déterminante. Les dessins au stylobille ne recouvrent qu’une toute petite surface de quelques cm2. Les conditions l’imposent en même temps que le dispositif graphique choisi. Comme nous l’avons vu précédemment, les dessins sont imprimés sur bâches. Le processus mécanico-numérique qui aboutit à ces bâches implique une transformation, si ce n’est une perte partielle, des informations que contiennent les dessins originaux à la fois par le changement d’échelle, et par les contraintes techniques du dispositif. Dans le même temps, ces dessins numérisés sont soumis à deux opérations complémentaires. 

*Les processus de réception et de création des œuvres d’art.
Approches à la première et à la troisième personne (partie 4)

Notes

[1] Dictionnaire de français Larousse, http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/modelé/51918, consulté le 12/01/14

[2] Se dit d’une déviation inconsciente en-dehors du domaine où l’attention était fixée 

[3] On appelle déflexion, en physique, le mouvement par lequel un corps abandonne la ligne qu’il décrivait pour en suivre une autre

Bibliographie

– Atlan, Henri, Entre le cristal et la fumée, Essai sur l’organisation du vivant, Paris, Seuil, 1979, 286 p.

– Berthoz, Alain et Jean-Luc Petit, phénoménologie et physiologie de l’action, Paris, Odile Jacob, 2006, 368 p.

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– Damasio, Antonio, L’autre moi-même – Les nouvelles cartes du cerveau, de la conscience et des émotions, Paris, Odile Jacob,  2012, 416 p.

– Deleuze, Gilles et Félix Guattari, Capitalisme et schizophrénie 2. Mille plateaux, Paris, de Minuit, 1980, 648 p.

– Lestel, Dominique, Les origines animales de la culture, Paris, Flammarion, 2001-2003, 368 p.

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