Prologue
La «sémantique muséologique» est profondément bouleversée par la diffusion des arts sur Internet. En effet, la vision traditionnelle des institutions culturelles est altérée, de même que la notion de patrimoine. D’une part, les visiteurs déambulent dans un musée «hors de ses murs»1, et d’autre part, ceux-ci acquièrent désormais le statut d’utilisateurs lorsqu’ils doivent préalablement façonner leurs connaissances en fonction des parcours proposés. Nous parlons bien sûr du musée virtuel, terme actuellement en vogue dans le jargon des professionnels du musée. Internet s’avère un outil exceptionnel, dans la mesure où les conservateurs adhèrent à de nouvelles formes de coopération entre concepteurs et visiteurs2 et qu’elle circonscrit d’une certaine façon la sphère culturelle à l’intérieur d’un support technologique3. Les conservateurs envisagent également un format d’exposition qui intimise la relation du visiteur avec les œuvres à travers une technique, cela dans une optique purement individualisante, lorsque celui-ci est appelé à sélectionner des contenus selon ses intérêts personnels. Par conséquent, sa participation s’en trouve accrue.
En ce tournant du troisième millénaire, Internet apparaît comme un passage obligé s’il veut être à la fine pointe de la technologie pour fortifier le projet social des musées : celui de démocratiser la Culture auprès d’une «collectivité virtuelle» sans cesse grandissante. La rumeur universelle veut aussi que les musées virtuels constituent une approche novatrice – pour les individus qui ne peuvent se déplacer physiquement, ont des contraintes financières ou possèdent un agenda surchargé – en l’occurrence parce qu’ils sont gratuits, ouverts 24 heures sur 24 et qu’ils peuvent être visités à partir de leur domicile, en plus d’offrir une panoplie d’aides à la consultation des œuvres d’art, tels que les logiciels de navigation (i.e., QTVR). Ils se trouvent ainsi graciés des perceptions ternes et élitistes du musée dit traditionnel4.
Il va sans dire que les concepteurs d’expositions se réjouissent de la «dynamique communicationnelle» qu’apporte la multimédiatisation sur Internet (le métissage de l’écrit, du visuel, du son et de la vidéo). Ces derniers jubilent devant tant d’outils technologiques car ils envisagent un accroissement non seulement de l’intérêt des visiteurs pour les arts mais aussi le développement de l’étendue de leurs connaissances en la matière. Les concepteurs font en effet usage d’outils de plus en plus sophistiqués pour présenter les œuvres afin d’en faciliter la compréhension, ce qui devrait susciter un comportement fort différent de la visite physique du musée. Il s’agit là d’un facteur indubitable pour mousser la popularité des musées, cela dans l’optique d’augmenter la visite physique d’un public diversifié et plus large que la clientèle habituelle des musées (chercheurs, instituteurs, étudiants, néophytes, amateurs d’art, touristes, etc.).