Lors de ta présentation à la Biennale de Montréal 2000, tu faisais référence à Tilman Baumgartel, ce dernier stipulait la fin du Net.Art en tant que forme spécifique d’art, tu peux nous en dire plus à ce sujet?
Alex Galloway – Oh, je ne me souviens pas très bien. Je crois que Tilman y faisait référence sans trop s’y attarder et j’ai capté cette affirmation parce que rares étaient ceux qui affirmaient la fin du Net.Art. Marina Grzinic a écrit à ce sujet un article intéressant dans le livre The Robot in the Garden, le Net.Art y est vu comme un projet authentique (encore actuel et-ou dépassé). Heath Bunting en parle aussi. En fait, demandez à n’importe qui ayant suivi de près l’évolution du Net.Art et il vous dira que la ferveur et l’intérêt de la première génération n’y est plus. L’agitation n’est plus la même et les artistes actuels qui émergent ne sont plus sur le modèle du type Jodi-Vuk-Shulgin. Désormais, on a une perspective sur le Net.Art en tant que mouvement spécifique.
Rhizome est une organisation bien établie sur le Web. En tant que média et en tant que diffuseur d’informations, vous publiez de courts essais, des nouvelles et des textes promotionnels pour des événements artistiques, comment évaluez-vous ce type de publication comparativement aux médias traditionnels?
Les deux dernières années ont été excitantes pour Rhizome, nous avons obtenu quelques facilités que d’autres organisations prennent pour acquis… tels une connexion Internet et un bureau 😉 Il faut garder à l’esprit que Rhizome est une petite organisation indépendante, surtout lorsqu’on la compare à ses cousines européennes grassement subventionnés comme Ars Electronica ou le ZKM. Malgré cette petitesse, notre empreinte demeure profonde dans l’Internet. Avec près de 5000 membres en provenance de 75 pays, il s’agit là d’un témoignage de reconnaissance de la part de la communauté elle-même. Rhizome n’est rien de plus qu’un réseau de personnes, l’organisation n’existe que pour ordonner ce réseau.
Pour répondre à ta question, Rhizome a été fondé en 1996 comme une plate-forme de communication de personne à personne. Ce qui signifie qu’il n’y a pas de rédaction comme telle, mais plutôt une communauté de personnes à la fois auteurs et lecteurs. Tout le contenu provient de la communauté et il est redistribué à cette même communauté. C’est très différent de la plupart des modèles de publication, où les auteurs et les rédacteurs diffusent à partir du centre vers la périphérie. Nous avons été très influencés par les philosophes Deleuze et Guattari. Nous avons appris d’eux que le modèle que nous utilisons fait en sorte d’élever tous les participants au même niveau et les transforme en participants actifs alertés, tandis que la rédaction centrée les rend passifs et «lents». Cette vision utopiste des médias est aussi partagée par Brecht et Enzensberger. Il s’agit là d’une perspective qui me plaît énormément.