Présentée à la Galerie L’Avant-scène de l’Université de Nice à l’hiver 2012, par le commissaire Marcin Sobieszczanski, l’installation Soleil déploie un environnement virtuel, dont le nom donne à penser qu’il est informé par des rapports inhérents à notre expérience de la nature. De fait, à peine est-on entré qu’on aperçoit l’artiste poser un casque sur la tête d’un participant et lui demander de s’orienter vers ce qu’il croit être le Nord. Sans attendre, entouré de spectateurs, on observe alors ce dernier monter sur une plate-forme pour introduire le haut de son corps dans un cube recouvert de toile juché sur pilotis d’une hauteur d’un mètre. Bientôt, induits par les états psychiques décelés dans les mouvements du corps, des projections lumineuses inondent les parois du cube en des sortes de feux colorés tandis qu’une bande son constituée de musiques et d’éléments de bruitage emplit la salle d’exposition. On comprend que l’orientation vers le Nord est un prétexte. Il sert en premier lieu à déterminer un point de référence dans le cube, autour duquel divers senseurs électroniques, sortes de niches sensitives, captent cette orientation ainsi que les mouvements du corps et de la tête. Mais même désigné de manière arbitraire, il inscrit a priori et d’une manière déterminante l’intentionnalité du sujet, dont l’expérience manifestera la dimension subjective, immersive et participative de ce qu’on pourrait appeler le « sens paysager » immanent de l’œuvre.
Conscience du paysage
À l’intérieur du cube, le visiteur est ébloui, aveuglé, par des halos de lumière aux colorations vives et puissantes, dont il ne maîtrise qu’en partie les intermittences du flux. Il en va de même des paysages auditifs qui autour de lui se révèlent. Certains sont provoqués consciemment, d’autres paraissent étrangers aux lois de la causalité. S’il est au courant et les sent provoqués par sa présence, ses gestes et ses mouvements, il essaie de comprendre les mécanismes qui régissent leur actualisation. Une sorte de jeu s’instaure : une attention aiguë aux manières d’habiter le corps ainsi qu’à leurs implications directes, plus ou moins discrètes et réciproques se développe à l’extérieur de l’enveloppe corporelle. Peu à peu, Soleil laisse ainsi comprendre ce qui, dans la vie ordinaire, nous est souvent voilé, en raison de la prévalence de la vision sur les autres sens, à savoir que le dehors correspond à « un corps à corps ». En ce sens, l’œuvre met en relief la proximité « charnelle » du visible, informé par la position et la disposition de celui qui voit. Dans ce bain de lumières parfois si crues qu’elles brouillent la vision de l’expérimentateur, en procurant une sensation onirique de l’espace, analogue à celle crée par une pression faite sur la paupière en direction du soleil ; le voyant s’abandonne à l’osmose naturelle des significations de l’intériorité la plus intime et des formes « objectives » de l’extériorité par la médiation de son corps percevant. Il assiste ainsi à cet ensauvagement, cette sortie de l’esprit naturalisé dans un paysage, certes virtuel, mais dont les horizons, les proches et les lointains, les indéterminés – les au-delà, les faces cachées – informent en retour, comme dans le monde, des territoires mentaux, les dimensions claires et latentes de la vie de la conscience. Ainsi, comme le démontre Michel Collot dans son plus récent ouvrage intitulé La Pensée-paysage, – et c’est là une tendance de tout un pan de l’art contemporain qui repose sur la force immersive de l’œuvre –, l’installation de Vesac se veut moins une représentation comme telle du monde naturel ou de l’extériorité, qu’une mise en relief de la structure d’horizon universelle qui règle notre appréhension des paysages, qu’ils soient mentaux ou mondains : « La ligne d’horizon du paysage n’est que la manifestation exemplaire d’une structure plus générale que Husserl nomme structure d’horizon (Horizontstruktur), et qui régit aussi bien la perception des choses dans l’espace, que la conscience intime du temps et le rapport à autrui. » (Collot, 2011, p. 93) C’est en raison de cette structure primordiale, qu’en retour, les « paysages chromatiques », comme horizons de couleurs et de densités, parviennent aussi à agir sur le flux des affects et des contenus psychiques, en mobilisant la gamme des motifs plus ou moins enfouis de la conscience. C’est, autrement dit, en vertu de cette analogie structurelle que cette dernière agit et réagit sur le fil tendu d’un rapport charnel avec le dehors.
Mais l’ampleur de cette spatialité qui excède vite le périmètre restreint des écrans du cube est accusée aussi par un dispositif sonore. Les halos lumineux sont enrichis d’introductions musicales, harmoniques et calmes, et de bruitages disruptifs qui épousent la sériation expressive de la gestuelle. En raison du pouvoir d’évocation proprement sonore, ce qui pourrait encore sembler un lieu de confinement minimal se révèle receler la vastitude d’une schtimung. Ce concept, faut-il le rappeler, a été utilisé par de nombreux penseurs et théoriciens en référence à ce qui, dans notre langue, recouvre l’idée d’« atmosphère » (terme par lequel il est souvent traduit), mais aussi celles d’états intérieurs et de tonalité, avec leurs déclinaisons d’humeurs et d’impressions qui, à la jonction du dedans et du dehors, débordent la dénomination du langage. Ainsi, le but des diverses trames auditives qui traversent l’expérience de Soleil est, en vertu du pouvoir musical, de provoquer et de modéliser les ressources de la vie affective tout en les invoquant. Et cela dans un déploiement à la fois spatial et affectif, créant une certaine «atmosphère» sinon une schtimung. Par l’envergure qu’on lui a donnée, cette notion de schtimung, illustrée par l’œuvre, force à repenser la « topologie du lyrisme » pour l’envisager tel qu’il est promu, de la manière la plus insolite, par le travail de Vesac. Ainsi, à l’intérieur du cube, le lyrisme ne se révèle pas circonscrit dans le domaine discret d’une émotivité enclose dans le corps et soustraite au monde, comme l’ont pu affirmer certains tenants et même certains critiques du romantisme. Il apparaît au contraire sous forme de plages lumineuses et sonores, comme une sorte d’épreuve greffée à une modélisation paysagère. Cette extériorité virtuelle des affects, par son émission visible et audible, tire le sujet hors de lui, l’émeut et le remue, le transporte, lui donnant à éprouver ses émotions comme une intimité lointaine, dans une relation d’altérité avec lui-même. Ainsi le dispositif de Vesac permettrait de mesurer que c’est dans cette continuité tacite et primordiale entre le dedans et le dehors qu’émergent toujours les significations conjuguées, mouvantes et émouvantes, du paysage et de l’intériorité affective. Par déterritorialisations et reterritorialisations de la conscience et du monde, à la faveur d’un corps à corps avec le dehors, cette continuité est universelle, tout en faisant la part des valeurs individuelles. Elle l’est, parce qu’en dépit des singularités, des « couleurs » et des « tons » uniques qui dévoilent les individus, chaque conscience évoluant sous le Soleil s’en trouve submergée, débordée, s’éprouvant comme un « faisceau » de phénomènes.
Horizon et altérité
Cette première « descente » au cœur de l’expérience charnelle de l’œuvre fait apercevoir la dimension métamorphique de la conscience et de son altérité, à travers le paysage perceptif qu’elle élabore, telle une machine exaltée, en déjouant l’apparence première. En effet, la première impression qui surgit est celle d’une claustration contre laquelle on se résout à devoir lutter, en osant pénétrer à l’intérieur de l’espace exigu cerné par les cinq écrans à moins qu’on ne se désiste. Or l’œuvre ne transcende pas seulement les limites de cette contrainte physique. Nous l’avons montré, elle révèle les signes de la subjectivité qui s’inscrivent dans des manifestations visibles et sonores de l’extériorité en une sorte de matière sensible et sensitive passant par la porosité du corps « communiquant » ou par les ondes cérébrales.
L’œuvre de Vesac, en tant qu’illustration et révélation expérimentale des rapports propres à l’osmose avec le monde, mène le travail de l’altérité et de la transformation de deux manières. D’abord, en accédant à l’espace virtuel, le visiteur qui expérimente l’œuvre peut s’avérer conscient que l’artiste, modifie derrière sa console les paramètres et les seuils de sensibilité des senseurs, notamment lorsqu’il est excessivement calme, presque immobile, ou bien s’agite trop brusquement pour provoquer les effets paysagés. Il module alors la réceptivité des champs de captation biométrique afin que les effets visuels et auditifs traduisent des mouvements infinitésimaux ou, au contraire, « perçoivent » les variations d’une gestualité exploitée avec excès. Une amplification adéquate ajustée de manière interactive peut transmettre les états presque imperceptibles de tension interne chez un sujet quasi immobile, mais aussi de capter les fines modulations de l’état nerveux et psychique d’une personne très agitée. Il permet encore et surtout d’objectiver les changements de leurs états durant de longues minutes.
Telle participation du créateur fait en sorte qu’entre les cinq écrans du cube et par les espaces sonores qui s’y déploient, un doute s’installe pour le visiteur qui concerne la part de l’autre dans la détermination des paysages. Car de nouveaux effets peuvent être aussi introduits tout au long de l’expérience. Or, loin de saper la révélation de l’intériorité, cette intersubjectivité, entre l’artiste et le sujet immergé, accuse au contraire l’attention de ce dernier envers ses états, ses postures, ses actions et ses réactions : l’état de non-savoir, quant aux causes, suscite une interrogation, une recherche consciente, elle rend on ne peut plus sensible l’épreuve de ses modalités de présence, d’autant qu’on est porté à se demander ce qui, dans son attitude, peut déterminer telle ou telle modification de la part de l’artiste. Aussi, averti de l’interaction du créateur, le sujet est appelé à se dépasser pour entrer : une crainte plus ou moins puérile le saisit d’être dévoilé, manipulé. L’œuvre est appréhendée comme un miroir trompeur, mais appelée à piéger les désirs et les angoisses, les fantasmes et les résistances. En cela, elle porte le sujet à questionner encore davantage son rapport à son état physique, à sa vie psychique ainsi qu’à leur objectivation par la médiation des diffusions sonores et visuelles. Qu’un lien de confiance s’établisse ou non entre lui et le créateur, sa réceptivité, au complet, est sollicitée dans son effort pour prendre en charge son espace et en tirer des significations. Ainsi, si l’artiste interagit, c’est, d’une certaine manière, en mesurant des motifs jamais totalement enfouis du sujet participant, puisque le corps en est l’expression. L’interaction encourage la réflexivité. Elle ouvre dans l’œuvre un sixième miroir, ajoute une face aveugle au cube, elle tire le sujet du soliloque en réverbérant ses affects, modulés par la sensibilité de cet autre qui, même invisible, est d’abord un corps qui s’immisce dans ce « concert charnel » de l’expérience interactive et auto-réflexive visuelle et sonore que fait vivre l’œuvre. Tout comme nous répondons dans le monde de la qualité de présence d’autrui et des significations plus ou moins tacites qu’il donne à notre corps autant qu’à l’extériorité que nous partageons, l’œuvre de Vesac esquisse et révèle les principes d’une communauté esthésique et naturelle. Ici comme ailleurs, la modélisation de la pensée dans une gestuelle, une expression, n’est pas le contraire de l’interprétation qu’en fait autrui, et qu’il ne peut sans cesse conduire que parce qu’ils sont, quelque part, du même monde et se rencontrent, ont accès l’un à l’autre par l’ouverture de leur corps sensible.
Cette œuvre d’altérité se complexifie encore s’y on prend en compte sa dimension spectaculaire. Le dispositif n’est pas seulement une configuration d’espaces pris en charge par celui qui y pénètre, ni un laboratoire d’exploration de la biométrie pour son créateur, c’est également la scène d’un théâtre intérieur pour les témoins et les curieux qui s’aventurent dans la galerie. Qu’il parvienne à l’oublier ou non, celui qui se prête au jeu accède son intériorité comme on entre en performance. Il est, tout autour, observé par un public indiscret malgré lui et peut faire le pari que les modélisations de son activité physio-affective de quelque manière les touche. Une intersubjectivité s’inscrit donc sur les quatre faces du cube et dans tous les champs sonores déployés dans l’espace. Telle propriété de la spatialisation de l’intimité rencontrée dans les halos lumineux de Soleil n’est pas sans rappeler une des caractéristiques primordiales du paysage naturel, lequel est saisi par Collot comme le berceau où se trouvent rassemblées les subjectivités qui se rencontrent :
« si les langues romanes ont eu besoin de ce mot nouveau, formé par suffixation à partir du mot pays, c’est que le paysage n’est pas le pays, mais une image du pays. Cette image exprime certes l’attachement au pays, mais elle le met aussi à distance et en déborde les limites. Cette notion […] permet de concilier la singularité d’un point de vue avec l’ouverture à l’autre et à l’univers, le local et le global ». (Collot, 2011, p. 80-81)
Les paysages de Soleil sont des sortes d’images d’un territoire où entrer, sortir vers l’autre « en se traversant », errer aux lisières de soi et devenir autre. Ils éclairent les versants subjectif, virtuel et intentionnel de la Terre dont chaque horizon est constitué et sans lesquelles il n’y aurait pas, à proprement parler, de monde. Et c’est bien à deux modes d’expressions prévalents du paysage, conçu comme une épreuve vivante du territoire, que réfèrent cette visibilité et cette audibilité des bruits et des couleurs, où la terre n’est pas encore solide, mais s’annonce, spectrale, en revenance dans ce déploiement, par le biais des sensations. Ainsi, tout comme le monde constitué par un faisceau de multiples paysages, Soleil est un univers à plusieurs entrées, où les horizons se recoupent, témoignant en cela d’une communauté perceptive et charnelle. Même si l’installation met en lumière l’univers intime d’un sujet, son tour de force n’est pas seulement de révéler une intersubjectivité naturelle et mondaine en dehors du monde, mais de rendre compte de l’importance de la « structure d’horizon » qui détermine nos appréhensions et nos compréhensions des êtres humains.
Se faisant, d’une manière plus radicale que dans l’extériorité, où il faut parler, créer pour transmettre la valeur personnelle d’une étendue, l’œuvre de Vesac diffuse dans l’immédiat des « pensées-paysage ». Alors que la conscience paysagère s’inscrit normalement dans l’invisible, l’exploitation de la biométrie rend possible la « mise en horizon » d’une extériorité intime selon un procès d’esthétisation instantanée, qui n’est pas contraire à la dimension « créatrice » des divers sens que nous donnons au monde dans l’expérience charnelle de la perception. Or, que cette création, cette modulation, normalement discrètes, du dehors et de l’intériorité soient données à éprouver par la somme des passants qui cheminent dans la galerie, cela est ce qui, pour tous, accuse l’expérience de l’altérité, des déterritorialisations et reterritorialisations que nous vivons au contact d’autrui dans le monde.
Le sens du monde
Pour conclure et bien comprendre les aboutissants théoriques et structurels de cette analyse, il est essentiel de souligner que Soleil procède et témoigne d’une manière unique de signifier. En effet, par l’entremise de ses « voyageurs », le dispositif parle en quelque sorte un langage naturel : le sens de l’intériorité intime n’y est pas plus dissociable de l’expression de la gestuelle que celui du paysage des valeurs esthésiques des « étants » de chacun qui le parsèment. Par cette irréductibilité de la signification des corps dans leur expressivité (biologique, mais aussi visuelle et sonore), l’œuvre relève des modes de significations incarnés et, notamment, du mode de signification du paysage :
« Les plus fortes [significations paysagères] sont inscrites dans la texture même du plan paysager, dans les qualités sensibles du son aussi bien que de l’image, dont elles ne sont pas plus dissociables que le sens d’une pièce vis-à-vis du rythme de la mélodie, de l’instrumentation et, donc, de la temporalité qui constamment le déporte. » (Collot, 2011, p. 156)
Par ailleurs, que le monde ne soit pas positivement éprouvé dans Soleil ne doit pas pour autant laisser croire qu’il n’y soit à l’état de présence, ni qu’il faille mettre en doute l’existence dans l’œuvre de significations paysagères. Car si Collot nous a déjà permis de reconnaître que le pays était négativé dans un paysage, et si celui-ci à pu être saisi comme une image du pays, ce n’est pas en tant qu’il en serait une représentation ou que le pays devrait être conçu comme plus plénier au-delà d’elle. Non car le paysage est l’unique voie d’accès au territoire qui soit donné au vivant d’emprunter. Aussi est-ce par un mouvement à rebours identique que le paysage nous aura semblé ouvert par les sensibilités subjectives à l’œuvre dans Soleil, et quelque chose du pays, polarisé par la sensorialité, la spatialité et la temporalité du cube : « Le paysage […] doit être resitué dans le […] mouvement d’une émotion qui associe étroitement les qualités sensibles du monde à leurs résonances intérieures. » (Collot, 2011, p. 156-157) Aussi sommes-nous autorisés par cette analyse à entrevoir le pays à travers les images singulières du dispositif. Le corps sensible comme berceau des « résonances intérieures » y ouvre un espace sonore et visuel qui révèle notre être au monde et pour le monde. Des rythmes, des distances auditives et chromatiques s’organisent autour des mouvements affectifs du corps. Tous nous ramènent à la dimension « musiquée » du sens mondain : « C’est une des raisons pour lesquelles la musique peut apparaître comme le meilleur accompagnement des paysages au cinéma [et en poésie en art], car elle exprime comme eux un sens immanent au sensible, de nature esthétique et affectif, non traduisible et non conceptualisable ». (Collot, 2011, p. 156)
Dans le langage musical, le signifié, loin de pouvoir être traduit dans une idée, est sans cesse déporté sur le syntagme sonore, toujours en train de s’accomplir, de se transformer, de se faire, il est comme l’horizon reculant sans cesse devant l’expression.
Ainsi, en va-t-il du sens du sujet et de l’extériorité dans l’œuvre de Vesac. Loin d’être acquis, figés, il sont à la mesure d’un engagement, d’une participation, de l’assomption d’un corps à corps avec l’autre et le dehors. Dans cette exigence implacable réside la dimension politique du dispositif. Une toute jeune personne dans le cube avait, à cet égard, pu dire : « il ne se passe rien ». Peut-être la passivité et l’isolement télévisuel et informatique l’avaient-il endormi, empêchée de sentir. Comme si à l’identification béate et suffisante où tendent à forclore les non-lieux des divers écrans s’opposait à nouveau de la manière la plus vive le pouvoir de l’art à ranimer notre nature d’êtres créés, c’est-à-dire, comme l’entend Sophie Nordmann, d’êtres essentiellement marqués par l’altérité. Car penser le créé ne revient pas pour elle à remonter à ce qui précède l’existence, c’est rigoureusement envisager, depuis cette existence, l’épreuve de sa béance, de son ouverture et donc, de son hybridité, de sa multiplicité, de son in-finitude : « La catégorie de création renvoie donc strictement à l’idée d’une insuffisance ontologique […] à soi. Être créé, c’est ne pas pouvoir rendre compte de son existence à partir de soi seulement, ne pas « se suffire » entièrement à soi-même, ne pas porter en soi le fondement suffisant de sa propre existence : être créé, c’est être sur le mode de l’in-suffisance ontologique à soi. » (Nordmann, 2012, p. 22) Ainsi, dans les multiples rapports qu’elle établit avec diverses figures de l’extériorité, et cela contre l’engourdissement, toutes ces identifications qu’on voudrait nous voir achever (pour consentir à l’être pour le divertissement, pour la consommation, etc.) la chaleur de Soleil aura œuvré à l’ouverture transformatrice d’une conscience de soi, c’est-à-dire de son corps affectif, esthésique, social, environnemental, esthétique, de son corps solaire, mutable, pour la vie, la mort, l’autre, le devenir, etc…
Bibliographie
– Collot, Michel, La Pensée-paysage, Actes Sud / ENSP, Paris, 2011, 328 p.
– Nordmann, Sophie, Phénoménologie de la transcendance, Éditions d’écarts, 2012, 73 p.