{"id":1274,"date":"2016-04-01T22:32:05","date_gmt":"2016-04-01T22:32:05","guid":{"rendered":"https:\/\/archee.uqam.ca\/?p=1274"},"modified":"2022-11-16T22:32:22","modified_gmt":"2022-11-16T22:32:22","slug":"avril-2016-sonder-lumwelt-digital","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/archee.uqam.ca\/avril-2016-sonder-lumwelt-digital\/","title":{"rendered":"Avril 2016 – Sonder l\u2019umwelt digital"},"content":{"rendered":"\n

De la d\u00e9sorientation comme rapport au monde<\/h2>\n\n\n\n
\"\"
Crash!<\/em>\u00a0J.G. Ballard, 1974<\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n

Les crises simultan\u00e9es (financi\u00e8re, \u00e9cologique, g\u00e9opolitique etc..) que traverse l\u2019humanit\u00e9 \u00e0 l\u2019heure de l\u2019hypercapitalisme globalis\u00e9 sont par nature intrins\u00e8quement li\u00e9es au d\u00e9veloppement technologique hypertrophique que conna\u00eet le monde depuis un si\u00e8cle, et aux ph\u00e9nom\u00e8nes qu\u2019il g\u00e9n\u00e8re (trading haute fr\u00e9quence confi\u00e9 \u00e0 des algorithmes, pollutions multiples li\u00e9es \u00e0 la surconsommation \u00e9nergetique etc…). Cette situation concourt \u00e0 mettre en tension les repr\u00e9sentations<\/em> qui jusqu\u2019ici nous permettaient d\u2019appr\u00e9hender notre environnement<\/em> (spatial mais \u00e9galement temporel). Si la technique se r\u00e9v\u00e8le \u00eatre un \u00e9l\u00e9ment acc\u00e9l\u00e9rateur des diverses crises que nous traversons, il convient toutefois de saisir en quoi, avant tout cela m\u00eame, elle configure<\/em> et tout \u00e0 la fois d\u00e9stabilise<\/em> notre rapport au monde, en tant pr\u00e9cis\u00e9ment qu\u2019originairement constitutive<\/em> de ce rapport.<\/p>\n\n\n\n

Au fil d\u2019une r\u00e9flexion nouant technique, espace et temps, Bernard Stiegler indique \u00ab\u00a0que l\u2019homme, \u00eatre proph\u00e9tique, sans qualit\u00e9, a besoin de boussole dans la mesure m\u00eame o\u00f9 il est originellement d\u00e9boussol\u00e9\u00a0: sa spatiotemporalit\u00e9 proc\u00e8de de son d\u00e9faut d\u2019origine. La d\u00e9sorientation est originaire dans la mesure m\u00eame o\u00f9 l\u2019histoire des techniques est celle de la \u00ab\u00a0conqu\u00eate de l\u2019espace et du temps\u00a0\u00bb durant laquelle s\u2019\u00e9tablissent et se transforment calendarit\u00e9s et cardinalit\u00e9s, distinguant levant et couchant, Orient et Occident, destinations, destins\u00a0\u00bb.Il poursuit en insistant sur le fait que les technologies actuelles amplifient encore davantage cette\u00a0perte de rep\u00e8res<\/em>constitutive de la condition humaine\u00a0:<\/p>\n\n\n\n

\u00ab Au cours de cette \u00e9volution, les programmes calendaires\/cardinaux s\u2019\u00e9mancipent du jour solaire, du programme cosmique, jusqu\u2019au point o\u00f9, \u00e0 pr\u00e9sent, ils imposent l\u2019exp\u00e9rience (la souffrance) de la d\u00e9sorientation comme telle : la technique contemporaine est l\u2019\u00e9poque de l\u2019industrialisation de la m\u00e9moire dont \u00e9merge une calendarit\u00e9 o\u00f9 font d\u00e9faut les points cardinaux (les \u00ab rep\u00e8res \u00bb). \u00bb (Stiegler, 1996)<\/p>\n\n\n\n

Le monde artificiel<\/h2>\n\n\n\n

Cet\u00a0\u00eatre-au-monde<\/em>\u00a0d\u00e9sorient\u00e9, assimil\u00e9 \u00e0 un\u00a0\u00eatre-dans-un-monde-technologiquement-d\u00e9termin\u00e9,\u00a0<\/em>n\u2019aura donc pas \u00e9chapp\u00e9 \u00e0 l\u2019analyse de certains philosophes, dans une tentative de d\u00e9finition de ce qui aujourd\u2019hui\u00a0probl\u00e9matise<\/em>\u00a0notre cadre global d\u2019existence. Peter Sloterdijk cible de la sorte\u00a0:\u00a0<\/p>\n\n\n\n

\u00ab Chaque contemporain peut, sans difficult\u00e9, observer la part croissante de l\u2019artificiel dans les univers existentiels des temps modernes. La modernit\u00e9, consid\u00e9r\u00e9e comme une campagne permettant d\u2019\u00e9lever le confort et les routines assujetties aux comp\u00e9tences, implique que les sujets soient \u00e9quip\u00e9s d\u2019armatures de plus en plus efficaces d\u2019intensification de soi-m\u00eame : nous vivons depuis tr\u00e8s longtemps dans des univers existentiels marqu\u00e9s par la technologie, dans lesquels les machines classiques et cybern\u00e9tiques jouent un r\u00f4le d\u00e9terminant pour la forme que nous donnons \u00e0 notre existence. Compte tenu de ces ph\u00e9nom\u00e8nes \u00e9vidents, il est facile de faire passer l\u2019interpr\u00e9tation de la modernisation comme une artificialisation. La loi de la modernit\u00e9, sous cet angle, est l\u2019engagement accru de l\u2019artificialit\u00e9 dans toutes les dimensions essentielles de l\u2019existence. \u00bb (Sloterdijk, 2001)<\/p>\n\n\n\n

Outils, instruments, machines, engins, appareils… les extensions technologiques, sous des aspects les plus divers, sont donc d\u00e9sormais \u00e0 l\u2019\u00e9vidence un \u00e9l\u00e9ment omnipr\u00e9sent des soci\u00e9t\u00e9s contemporaines. Au cours du dernier demi-si\u00e8cle, cette prolif\u00e9ration de l\u2019artificiel a entra\u00een\u00e9 l\u2019\u00e9volution de la nature m\u00eame des artefacts sur lesquels elle repose. Aux objets techniques m\u00e9caniques s\u2019ajoutent d\u00e9sormais les masses d\u2019informations en circulation au sein des r\u00e9seaux de communication, ou les biotechnologies et leurs produits organiques de synth\u00e8se. Ces mutations constantes concourent \u00e0 donner \u00e0 la sph\u00e8re technologique des contours sans cesse fluctuants, et donc \u00e0 ce titre difficiles \u00e0 saisir. Arme du crime contre le r\u00e9el chez Jean Baudrillard, syst\u00e8me poursuivant ses fins propres pour Jacques Ellul, ou encore support d\u2019une intelligence collective distribu\u00e9e pour Pierre L\u00e9vy, la technique, auscult\u00e9e dans sa dimension historique voire t\u00e9l\u00e9ologique, constitue ainsi l\u2019enjeu central de r\u00e9flexions pour le moins diverses et passionn\u00e9es. Ces r\u00e9flexions, dans leur pluralit\u00e9,\u00a0 mettent unilat\u00e9ralement en lumi\u00e8re l\u2019urgence de penser l\u2019artificiel dans sa capacit\u00e9 \u00e0 r\u00e9actualiser ou \u00e0 soulever un ensemble de questions relatives \u00e0 l\u2019humain et \u00e0 ce qui\u00a0fait monde<\/em>.<\/p>\n\n\n\n

Umwelt<\/em>\u00a0technologique<\/h2>\n\n\n\n

En 1934 le biologiste Jacob Von Uexk\u00fcll d\u00e9finit le concept d\u2019Umwelt<\/em> (Von Uexk\u00fcll, 1984), selon lequel chaque esp\u00e8ce vivante poss\u00e8de un univers perceptif propre qui constitue son \u00ab\u00a0monde\u00a0\u00bb. Pour l\u2019humain, ce monde est d\u2019abord d\u00e9termin\u00e9, comme pour toute esp\u00e8ce animale, par la \u00ab\u00a0bande passante\u00a0\u00bb de ses organes sensoriels. D\u00e8s l\u2019origine de l\u2019Homme, cependant, les prolongements techniques \u00e9tendent cette saisie primitive du r\u00e9el. A titre d\u2019exemple,\u00a0 l\u2019appr\u00e9hension de l\u2019espace, permise par nos cinq sens, se voit augment\u00e9e par le fait de lancer des objets. Silex, sagaies puis armes de jet en tous genre permettent la conqu\u00eate de l\u2019action \u00e0 distance. Pour l\u2019Homme, l\u2019extension de son rayon d\u2019action sur l\u2019environnement \u00e9tends ainsi sa saisie de l\u2019espace, et donc sa perception du monde.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

Aujourd\u2019hui, nous saisissons le monde et une grande part de ses ph\u00e9nom\u00e8nes \u00e0 travers un tissu de machines et d\u2019extensions artificielles. Du fait des logiques mais aussi des pouvoirs qu\u2019elles induisent, des vitesses et des temporalit\u00e9s qui les d\u00e9terminent, celles-ci alt\u00e8rent, distordent, bref, mettent en mutation ce que Peter Sloterdijk – \u00e0 la suite de Martin Heidegger – appelle, on l\u2019a vu, notre mode d\u2019\u00eatre-au-monde<\/em>. <\/p>\n\n\n\n

F\u00e9lix Guattari, dans le cadre de sa pens\u00e9e concourant \u00e0 d\u00e9finir l\u2019\u00e9cosophie, consid\u00e8re quant \u00e0 lui que l\u2019environnement technologique tient un r\u00f4le primordial dans la constitution de la\u00a0subjectivit\u00e9<\/em>\u00a0de chacun. La philosophe Manola Antonioli souligne \u00e0 ce propos\u00a0:<\/p>\n\n\n\n

\u00ab La subjectivit\u00e9 est donc toujours un processus qui circule entre des ensembles sociaux de taille diff\u00e9rente et qui est assum\u00e9 et v\u00e9cu par des individus dans des existences singuli\u00e8res. [\u2026] Chez Guattari, cette production de subjectivit\u00e9 devient de fa\u00e7on encore plus affirm\u00e9e une production proprement \u00ab machinique \u00bb, o\u00f9 ce qu\u2019il appelle parfois la \u00ab m\u00e9canosph\u00e8re \u00bb (la multiplicit\u00e9 de machines et de dispositifs techniques qui entourent l\u2019humain comme une seconde atmosph\u00e8re) constitue un \u00e9l\u00e9ment central. \u00bb (Antonioli, 2009)<\/p>\n\n\n\n

La\u00a0m\u00e9canosph\u00e8re<\/em>\u00a0co\u00efncide selon cette d\u00e9finition avec ce que nous pouvons regrouper sous l\u2019appellation g\u00e9n\u00e9rique de\u00a0m\u00e9dia<\/em>. Les m\u00e9dias, dans le sens premier du terme, regroupent tout \u00ab\u00a0organe\u00a0\u00bb reliant deux entit\u00e9s s\u00e9par\u00e9es. Le mot \u00ab\u00a0m\u00e9dia<\/em>\u00a0\u00bb se rattache ainsi \u00e9tymologiquement aux notions de \u00ab\u00a0milieu<\/em>\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0m\u00e9dian<\/em>\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0moyen<\/em>\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0m\u00e9diateur<\/em>\u00a0\u00bb, ou encore \u00ab\u00a0interm\u00e9diaire<\/em>\u00a0\u00bb, et d\u00e9signe ce qui se tient\u00a0entre<\/em>. Les proth\u00e8ses technologiques sont, en ce sens, des m\u00e9dias filtrant les relations entre l\u2019humain et son milieu. Elles contribuent donc \u00e0 d\u00e9finir l\u2019umwelt<\/em>\u00a0humain, notamment dans l\u2019appr\u00e9hension de l\u2019espace<\/em>\u00a0et du\u00a0temps<\/em>.<\/p>\n\n\n\n

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2001,\u00a0\u00a0Odyss\u00e9e de l\u2019espace<\/em>, S. Kubrick, 1968 (ou l\u2019histoire de la technique r\u00e9sum\u00e9e en un changement de plan…<\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n

espace(s) – temps<\/h2>\n\n\n\n

Si les technologies fa\u00e7onnent intrins\u00e8quement notre perception de l\u2019espace et du temps, on comprends d\u00e8s lors l\u2019impact -potentiellement traumatique – de leurs mutations actuelles sur cet\u00a0umwelt<\/em>\u00a0humain. Une fois encore soulignons que la constitution de notre cadre perceptif s\u2019inscrit dans une longue perspective techno-historique, comme le r\u00e9sume le sociologue et philosophe Hartmut Rosa\u00a0:<\/p>\n\n\n\n

\u00ab L\u2019introduction de la machine \u00e0 vapeur dans les usines et, peu apr\u00e8s, la construction des voies ferr\u00e9es ; la multiplication de bicyclettes, puis d\u2019automobiles, et finalement d\u2019avions ; l\u2019acc\u00e9l\u00e9ration de la communication par le t\u00e9l\u00e9graphe, puis le t\u00e9l\u00e9phone, enfin par internet, la diffusion des radios \u00e0 transistor et des \u00ab images anim\u00e9es \u00bb : toutes ces formes d\u2019acc\u00e9l\u00e9rations technologiques dans les transports, la communication et la production ont transform\u00e9 le \u00ab monde v\u00e9cu \u00bb et la culture de la vie quotidienne de fa\u00e7on parfois traumatisante, et ont fait na\u00eetre un sentiment de l\u2019\u00eatre-dans-le-temps et l\u2019\u00eatre-dans-le-monde d\u2019un type nouveau. \u00bb (Rosa, 2010)<\/p>\n\n\n\n

Avec l\u2019av\u00e8nement d\u2019internet, la technologie s\u2019est faite ainsi le vecteur de nouvelles temporalit\u00e9s et spatialit\u00e9s. A l\u2019\u00e8re de l\u2019information num\u00e9ris\u00e9e, donc manipulable et transmissible \u00e0 l\u2019envie, le r\u00e9seau constitue le support de ces dimensions \u00e9tendues \u00e0 l\u2019\u00e9chelle plan\u00e9taire. Le commissaire et essayiste Nicolas Bourriaud \u00e9voque en ces termes ces nouveaux espaces-temps\u00a0:<\/p>\n\n\n\n

\u00ab Une simple navigation sur internet \u00e0 la recherche d\u2019une information laisse entrevoir cet empire imaginaire du multiple : chaque site explose en une myriade d\u2019autres, le r\u00e9seau est une machine connectique prolif\u00e9rante. \u00bb (Bourriaud, 2009)<\/p>\n\n\n\n

La compression de l\u2019espace-temps par les m\u00e9dias \u00e9lectroniques, achevant une tendance initi\u00e9e avec l\u2019acc\u00e9l\u00e9ration progressive des moyens de transports, ne va pas sans susciter de nombreuses craintes. Paul Virilio d\u00e9nonce le caract\u00e8re anxiog\u00e8ne de ce ph\u00e9nom\u00e8ne1<\/sup>.\u00a0Hartmut Rosa, une fois encore, note qu\u2019apr\u00e8s une acc\u00e9l\u00e9ration de notre propre d\u00e9placement dans l\u2019espace, ce sont les \u00ab\u00a0choses\u00a0\u00bb d\u00e9mat\u00e9rialis\u00e9es qui se meuvent de plus en plus vite autour de nous\u00a0:<\/p>\n\n\n\n

\u00ab Il est int\u00e9ressant de constater que la \u00ab r\u00e9volution des transmissions \u00bb de la fin du XXe si\u00e8cle inverse, du point de vue logique, le sens de la \u00ab r\u00e9volution des transports \u00bb, qui avait culmin\u00e9 \u00e0 la fin du XIXe et au d\u00e9but du XXe si\u00e8cles. Cette derni\u00e8re avait consist\u00e9 \u00e0 transporter les personnes et les marchandises en nombre croissant et \u00e0 un rythme plus \u00e9lev\u00e9 \u00e0 la surface de la Terre, la premi\u00e8re consiste en revanche \u00e0 multiplier les biens par leur num\u00e9risation, pour les rendre accessibles de n\u2019importe quel lieu, de mani\u00e8re stationnaire \u00bb. (Rosa, 2010)<\/p>\n\n\n\n

Cet ensemble de consid\u00e9rations, bien trop vite esquiss\u00e9 et r\u00e9sum\u00e9, permets toutefois d\u2019entrevoir en quoi les technologies dites \u00ab\u00a0nouvelles\u00a0\u00bb peuvent impacter nos rapports\u00a0symboliques<\/em>\u00a0au monde.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

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Le data center, noeud de nouveaux espaces-temps<\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n

From the sky to the earth<\/h2>\n\n\n\n
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From the sky to the earth<\/em>, Fabien Zocco, 2014<\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n

Ma d\u00e9marche artistique s\u2019articule pr\u00e9cis\u00e9ment autour d\u2019un questionnement central mettant en perspective la saisie du monde au travers de la technologie. Il s\u2019agit en effet pour moi de sonder ce qui fonde cet \u00eatre-au-monde<\/em> technologiquement d\u00e9fini, et pour ce faire d\u2019esquisser des cartographies <\/em>potentielles permettant de s\u2019y rep\u00e9rer. <\/p>\n\n\n\n

C\u2019est \u00e0 l\u2019aune de ces enjeux esth\u00e9tiques que s\u2019est \u00e9labor\u00e9e la pi\u00e8ce\u00a0From The Sky To The Earth,<\/em>\u00a0pr\u00e9sent\u00e9e en octobre 2016 \u00e0 la\u00a0Galerie R3\u00a0de L\u2019UQTR \u00e0 Trois-Rivi\u00e8res et au\u00a0\u00a0GRAVE\u00a0\u00e0 Victoriaville, lors de la manifestation\u00a0R\u00c9G\u00c9N\u00c9RATION\u00a0: Pour une \u00ab\u00a0\u00e9cosophie\u00a0\u00bb de l\u2019acte artistique<\/em>.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

From The Sky To The Earth<\/em>\u00a0op\u00e8re une mise en relation d\u2019espaces dispers\u00e9s, mais n\u00e9anmoins connect\u00e9s par un rapport d\u2019homonymie.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

Un programme informatique parcours al\u00e9atoirement une base de donn\u00e9es r\u00e9pertoriant des noms attribu\u00e9s \u00e0 des \u00e9toiles (Aldebaran<\/em>, Proxima<\/em>, etc…). <\/p>\n\n\n\n

A chaque terme s\u00e9lectionn\u00e9 vient se juxtaposer l\u2019image saisie dans Google Street View d\u2019un lieu quelque part sur terre (ville, lieu-dit, rue etc…), dont le toponyme est identique au nom de l\u2019\u00e9toile. L\u2019apparition du visuel s\u2019accompagne d\u2019une nappe sonore g\u00e9n\u00e9r\u00e9e \u00e0 partir de l\u2019indice colorim\u00e9trique propre \u00e0 chacune des images. Il en r\u00e9sulte une \u00abd\u00e9ambulation\u00bb virtuelle et immobile, qui croise le champ lexical de la carte du ciel avec une repr\u00e9sentation des lieux sur terre qui lui font \u00e9cho. <\/p>\n\n\n\n

Le r\u00e9seau devient ici une zone pourvoyeuse d\u2019h\u00e9t\u00e9rotopies<\/em>2<\/sup>. Ces h\u00e9t\u00e9rotopies naissent de l\u2019\u00e9cart entre le fort pouvoir po\u00e9tique v\u00e9hicul\u00e9 par ces noms d\u2019\u00e9toiles, et l\u2019esth\u00e9tique standardis\u00e9e de Google Street View, pris ici comme le r\u00e9servoir d\u2019un mat\u00e9riau photographique de seconde main. Elles convoquent un imaginaire nourri par l\u2019\u00e9vocation de r\u00e9gions stellaires inaccessibles, autant que par la repr\u00e9sentation de l\u2019espace que propose le r\u00e9seau.\u00a0La pluralit\u00e9 des espaces convoqu\u00e9s vient ici nourrir une tentative de po\u00e9sie visuelle qui pr\u00e9cis\u00e9ment, donc, investit explicitement ce qui, en coh\u00e9rence avec les r\u00e9fl\u00e9xions expos\u00e9es plus haut, pourrait prendre le nom d\u2019untechnoimaginaire d\u00e9sorient\u00e9<\/em>.<\/p>\n\n\n\n

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From the sky to the earth<\/em>, Fabien Zocco, 2014<\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n

Notes<\/h2>\n\n\n\n

[1] \u00ab\u00a0Nous n\u2019avons pas pu concevoir que tout espace est un espace-temps. […] Avec les ph\u00e9nom\u00e8nes d\u2019interactivit\u00e9 instantan\u00e9s qui sont devenus notre lot quotidien, a lieu un v\u00e9ritable bouleversement qui d\u00e9stabilise le rapport \u00e0 l\u2019activit\u00e9 des hommes entre eux.\u00a0\u00bb Paul Virilio,\u00a0L\u2019administration de la peur<\/em>, Textuel, Paris, 2010, p. 31.<\/p>\n\n\n\n

[2] Concept forg\u00e9 par Michel Foucault, d\u00e9finissant un lieu pouvant juxtaposer plusieurs types d\u2019espaces (imaginaires, symboliques..) eux-m\u00eames incompatibles dans l\u2019espace r\u00e9el.<\/p>\n\n\n\n

Bibliographie<\/h2>\n\n\n\n

\u2013 Stiegler, Bernard,\u00a0La technique et le temps II, la d\u00e9sorientation<\/em>, Paris, Galil\u00e9e, 1996, 288 p. <\/p>\n\n\n\n

\u2013 Sloterdijk,\u00a0Peter, Essai d\u2019intoxication volontaire suivi de L\u2019Heure du crime et le temps de l\u2019oeuvre d\u2019art<\/em>, Paris, Hachette, 2001, 348 p. <\/p>\n\n\n\n

\u2013 Von Uexk\u00fcll, Jacob,\u00a0Mondes animaux et mondes humains<\/em>, Paris, Deno\u00ebl, 1984, 192 p. <\/p>\n\n\n\n

\u2013 Antonioli, Manola, \u00ab\u00a0Actualit\u00e9 de Guattari\u00a0\u00bb,\u00a0\u00a0La Vie des id\u00e9es,<\/em>\u00a015 octobre 2009, en ligne, <https:\/\/laviedesidees.fr>. <\/p>\n\n\n\n

\u2013 Rosa, Hartmut,\u00a0Acc\u00e9l\u00e9ration<\/em>, Paris, La D\u00e9couverte, 2010, 480 p. <\/p>\n\n\n\n

\u2013 Bourriaud, Nicolas,\u00a0Radicant<\/em>, Paris, Deno\u00ebl, 2009, 217 p. <\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

De la d\u00e9sorientation comme rapport au monde Les crises simultan\u00e9es (financi\u00e8re, \u00e9cologique, g\u00e9opolitique etc..) que traverse l\u2019humanit\u00e9 \u00e0 l\u2019heure de l\u2019hypercapitalisme globalis\u00e9 sont par nature intrins\u00e8quement li\u00e9es au d\u00e9veloppement technologique hypertrophique que conna\u00eet le monde depuis un si\u00e8cle, et aux ph\u00e9nom\u00e8nes qu\u2019il g\u00e9n\u00e8re (trading haute fr\u00e9quence confi\u00e9 \u00e0 des algorithmes, pollutions multiples li\u00e9es \u00e0 la … Continued<\/a><\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":0,"comment_status":"open","ping_status":"open","sticky":false,"template":"","format":"standard","meta":{"footnotes":""},"categories":[1],"tags":[86],"acf":[],"_links":{"self":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/1274"}],"collection":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts"}],"about":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/types\/post"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/users\/1"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/comments?post=1274"}],"version-history":[{"count":2,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/1274\/revisions"}],"predecessor-version":[{"id":1281,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/1274\/revisions\/1281"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/media?parent=1274"}],"wp:term":[{"taxonomy":"category","embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/categories?post=1274"},{"taxonomy":"post_tag","embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/tags?post=1274"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}