{"id":3900,"date":"2001-06-01T18:21:36","date_gmt":"2001-06-01T18:21:36","guid":{"rendered":"https:\/\/archee.uqam.ca\/?p=3900"},"modified":"2023-03-02T18:21:46","modified_gmt":"2023-03-02T18:21:46","slug":"juin-2001-un-lien-serait-deja-assez","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/archee.uqam.ca\/juin-2001-un-lien-serait-deja-assez\/","title":{"rendered":"Juin 2001 – Un lien serait d\u00e9j\u00e0 assez"},"content":{"rendered":"\n

En septembre 1996, je fus invit\u00e9e en tant qu’auteur d’un site Web sur le cin\u00e9ma russe parall\u00e8le \u00e0 une rencontre de la\u00a0Liste Syndicate<\/em>\u00a0qui se tenait dans le cadre du DEAF, le Dutch Electronic Art Festival, \u00e0 Rotterdam. Sous mon nom, \u00e0 l’accr\u00e9ditation, il y avait \u00abartiste\u00bb. J’avais auparavant surtout travaill\u00e9 comme critique de cin\u00e9ma, \u00e9crit sur le cin\u00e9ma exp\u00e9rimental et d\u00e9velopp\u00e9 les programmes du club cin\u00e9matographique de\u00a0Cine Fantom<\/em>. \u00abArtiste\u00bb a dur\u00e9 trois semaines. En pr\u00e9sentant mon nouveau projet pour le Web, \u00abMy Boyfriend Came Back From the War\u00bb, au colloque\u00a0Metaforum III<\/em>\u00a0\u00e0 Budapest, je suis devenue une c\u00e9l\u00e8bre artiste du net –\u00a0a famous net artist<\/em>\u00a0(d\u00e9sign\u00e9e plus loin par FNA). Un m\u00e9tier plus int\u00e9ressant et plus important. Je relate dans ce qui suit les exp\u00e9riences et les observations faites dans ce mode au cours des quatre derni\u00e8res ann\u00e9es.<\/p>\n\n\n\n

CONF\u00c9RENCES<\/h2>\n\n\n\n

Il n’y a pas que pour moi que tout a commenc\u00e9 par une conf\u00e9rence. M\u00eame si cela vient en contradiction avec l’imagination des journalistes qui \u00e9crivent sur l’art net, les conf\u00e9rences jouent un r\u00f4le important pour les FNAs. <\/p>\n\n\n\n

Un artiste du net est un artiste qui travaille sur Internet ; de la m\u00eame fa\u00e7on un FNA est un artiste qui travaille sur Internet, mais en m\u00eame temps il pr\u00e9sente son travail sur le r\u00e9seau lors de conf\u00e9rences internationales. Je qualifie de conf\u00e9rence toute manifestation o\u00f9 un FNA s’asseoit face \u00e0 un public, un ordinateur devant lui et un grand \u00e9cran sur lequel est projet\u00e9e l’image derri\u00e8re lui. Une telle chose peut se produire dans le cadre de n’importe quelle manifestation – un festival de cin\u00e9ma, une exposition d’art m\u00e9diatique, une foire du livre – qui n’a pas \u00e0 s’annoncer explicitement sous le nom de conf\u00e9rence. <\/p>\n\n\n\n

Lecture et pr\u00e9sentation devant un public supposent certaines habilet\u00e9s. Un FNA ne travaille pas avec Power Point, mais avec un navigateur, ce qui veut dire qu’il doit pouvoir parler, cliquer et d\u00e9rouler en m\u00eame temps. Il doit pouvoir adapter son d\u00e9bit de parole et la dur\u00e9e de sa pr\u00e9sentation aux diff\u00e9rents temps de connexion, surcharg\u00e9s ou changeant parfois rapidement de vitesse lors du transfert. Seul un FNA d\u00e9butant se laisse d\u00e9sar\u00e7onner lorsqu’une liaison tombe compl\u00e8tement \u00e0 plat. Et seul un pseudo-FNA, pour se pr\u00e9munir contre de telles surprises, apportera avec lui lors de sa pr\u00e9sentation une version d\u00e9mo de son site web sur disquette ou sur c\u00e9d\u00e9rom. Lorsque l’on pr\u00e9sente Internet sur un c\u00e9d\u00e9rom, c’est un peu comme si on faisait du \u00ablip-synch\u00bb. Le public ne pardonne pas cela. <\/p>\n\n\n\n

Les conf\u00e9rences sont (encore pour l’instant) la principale source de revenus et (comme toujours) un lieu de rencontres; elles offrent, de plus, l\u2019occasion de faire le bilan d’une p\u00e9riode de l’histoire de l’art net. En outre, les conf\u00e9rences sont seules aptes \u00e0 l’exercice hors ligne de l’art net.<\/p>\n\n\n\n

EXPOSITIONS<\/h2>\n\n\n\n

Il en va exactement \u00e0 l’inverse avec les expositions. Les expositions d’art net sont de l’ordre de l’indicible dans le march\u00e9 de l’art moderne, m\u00eame si toutes les expositions ne se ressemblent pas et que, gr\u00e2ce aux efforts des commissaires, ils en existent de fort diff\u00e9rentes. \u00abExposition\u00bb qualifie toute manifestation d\u00e9di\u00e9e \u00e0 l’art r\u00e9seautique – \u00e0 l’exception des conf\u00e9rences. <\/p>\n\n\n\n

O\u00f9 l’aversion pour les expositions prend-elle ses sources? Pour quelles raisons une exposition est-elle une forme de pr\u00e9sentation inacceptable aux yeux d\u2019un v\u00e9ritable artiste du net (a real net artist <\/em>– RNA)? <\/p>\n\n\n\n

Les artistes du net ont des profils fort diff\u00e9rents; on retrouve parmi eux des artistes des arts visuels ou des arts m\u00e9diatiques, mais aussi des vid\u00e9astes, des photographes et des designers. Personne de cette g\u00e9n\u00e9ration (\u00e0 laquelle je propose, pour des raisons pratiques, l’abr\u00e9viation RNA1) n’avait travaill\u00e9 avec Internet avant d’apprendre \u00e0 lire, \u00e0 \u00e9crire et \u00e0 communiquer hors ligne. Un RNA1 est, de plus, habitu\u00e9 de pratiquer son art et d’exposer dans un espace d\u00e9limit\u00e9. Malgr\u00e9 cela, il travaille avec un r\u00e9seau universel, \u00e9tendu de par le monde, se tourne vers ses utilisateurs et se fait, \u00e0 sa fa\u00e7on, universel, ouvert sur le monde. On devrait peut-\u00eatre formuler cela autrement : gr\u00e2ce \u00e0 son exp\u00e9rience, gr\u00e2ce \u00e0 l’id\u00e9e qu’il conserve de ce que signifie, travailler et exposer dans un lieu d\u00e9limit\u00e9, un RNA1 r\u00e9agit de fa\u00e7on particuli\u00e8rement virulente contre la tentative de redresser ces limites en pr\u00e9sentant l’art net \u00e0 l’int\u00e9rieur d’expositions. <\/p>\n\n\n\n

Les expositions trouvent, elles aussi, places dans le cadre d’autres manifestations – du festival de cin\u00e9ma jusqu’aux conf\u00e9rences – mais elles sont aussi parfois con\u00e7ues comme des \u00e9v\u00e9nements autonomes. Un tel \u00e9v\u00e9nement fut organis\u00e9 au cours des derni\u00e8res ann\u00e9es par le ZKM, Zentrum fur K\u00fcnst und Medientechnologie<\/em>; ce fut une exposition monstrueuse qui mis fin au r\u00eave de voir de telles entreprises r\u00e9ussir.<\/p>\n\n\n\n

Comment en vient-on \u00e0 l’id\u00e9e de faire des expositions? Derri\u00e8re cette id\u00e9e se trouvent de fausses conceptions et une recherche de profits. Fausses conceptions parce qu’on suppose que l’art net n’est fait que d’amusants sites web interactifs, comme des c\u00e9d\u00e9roms, mais en plus modernes. L’id\u00e9e du gros argent est n\u00e9e au milieu des ann\u00e9es quatre-vingt-dix, alors que certains FNA (famous net artist<\/em>) auraient laiss\u00e9 entendre, lors de conf\u00e9rences, qu’une oeuvre d’art net ne serait pas une pi\u00e8ce de mus\u00e9e, existerait hors des structures des galeries ou des mus\u00e9es, appartiendrait \u00e0 tous, se passerait d’interm\u00e9diaire et de prix d’entr\u00e9e. Le commissaire d’une \u00abexposition\u00bb aurait de plus de bonnes chances de pouvoir r\u00e9duire le budget d’exposition aux profits de ses propres honoraires. C’\u00e9tait l\u00e0 le truc.<\/p>\n\n\n\n

Les expositions \u2018\u2019inertes\u2019\u2019 \u00e9taient et sont encore plus ou moins sympatiques et fonctionnelles. Cela avait l\u2019air de ceci : une quelconque manifestation hors ligne annon\u00e7ait que maintenant, en plus des sections cin\u00e9ma, vid\u00e9o, performance, etc., elle proposait aussi une section d’art net ou d’art web (habituellement, aucune diff\u00e9rence entre ces deux concepts n’\u00e9tait faite – mais de cela il ne sera pas question ici), ouvrait sur son site web une section appropri\u00e9e et y installait des liens vers des projets r\u00e9seautiques choisis. Ces derniers continuaient \u00e0 vivre leur vie, il y a avait simplement un lien de plus vers eux. Plus les liens sont nombreux, plus il y a de public. C’est donc bien. <\/p>\n\n\n\n

Cette pratique a produit un int\u00e9ressant syst\u00e8me de gains mutuels. Une exposition cr\u00e9e un lien vers un projet, le nom d’un FNA appara\u00eet dans le catalogue d’exposition et, de son c\u00f4t\u00e9, le FNA peut inscrire sa participation \u00e0 l\u2019exposition dans son curriculum vitae. Mais qu’est-ce que tout cela a \u00e0 voir avec un r\u00e9el espace d’exposition? Rien, bien s\u00fbr. L\u00e0, la variante \u201cinerte\u201d va un peu s\u2019adapter : pour relier l’espace tangible d’exposition d’une quelconque fa\u00e7on \u00e0 ce qui se passe en ligne, un ordinateur est install\u00e9 dans la galerie ou le foyer. Un navigateur est ouvert et une page web contenant des liens est affich\u00e9e. Que personne ne regarde, \u00e9videmment. Peut-\u00eatre que des gens cliquent deux, trois fois, mais ils pr\u00e9f\u00e8rent ensuite interroger leur courrier \u00e9lectronique ou encore consulter les pr\u00e9visions m\u00e9t\u00e9orologiques. Cela n’a rien d\u2019\u00e9tonnant, car l’atmosph\u00e8re ne convient tout simplement pas. On ne va certainement pas dans une galerie pour lire des livres, comme on ne lit pas de livres dans un salon du livre. Les expositions \u2018\u2019inertes\u2019\u2019 n’eurent aucun succ\u00e8s, bien au contraire : des ordinateurs sans appr\u00eat, o\u00f9 de tous c\u00f4t\u00e9s pendent des cables, apportent une fausse note dans les habituelles installations interactives voisines, faites d’appareils et de constructions compliqu\u00e9es.<\/p>\n\n\n\n

Il est donc temps de se d\u00e9tacher de l’id\u00e9e d’exposition et d’arriver \u00e0 la conclusion qui s’impose d\u00e9j\u00e0 : la seule possibilit\u00e9 d’importer l’art net dans un espace et d’aller ainsi \u00e0 la rencontre de gens int\u00e9ress\u00e9s est offerte par la conf\u00e9rence. Car seul un FNA plein de vie, souriant et arrogant peut expliquer, commenter, int\u00e9resser les gens ou les amuser. Seul le RNA1 lui-m\u00eame – et certainement pas l’ensemble des liens vers ses projets – peut introduire avec comp\u00e9tence et imagination le public \u00e0 l’art de demain. En lieu et place, les commissaires ont essay\u00e9 d’adapter les oeuvres aux pratiques en place, plus mauvaises que correctes, mais d\u00e9j\u00e0 rod\u00e9es, et de plaire avec servilit\u00e9 aux visiteurs de galeries. Je partagerais les r\u00e9sultats de leurs efforts en deux cat\u00e9gories : l’OBJET et le ZOO.<\/p>\n\n\n\n

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