{"id":4192,"date":"2000-02-01T15:06:51","date_gmt":"2000-02-01T15:06:51","guid":{"rendered":"https:\/\/archee.uqam.ca\/?p=4192"},"modified":"2023-03-06T15:07:00","modified_gmt":"2023-03-06T15:07:00","slug":"fevrier-2000-les-enfants-terribles-du-cyberart","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/archee.uqam.ca\/fevrier-2000-les-enfants-terribles-du-cyberart\/","title":{"rendered":"F\u00e9vrier 2000 – Les enfants terribles du cyberart"},"content":{"rendered":"\n
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C’est presque un clich\u00e9 de le dire, la particularit\u00e9 d’Internet r\u00e9side dans l’acc\u00e8s quasi illimit\u00e9 \u00e0 l’information provenant de partout sur la plan\u00e8te, arrivant \u00e0 une vitesse vertigineuse. Sur un simple clic de la souris, nous voyageons \u00e0 travers le monde, nous traversons des espaces culturels sans jamais nous soucier des fronti\u00e8res ni des contr\u00f4les qui y sont pratiqu\u00e9s. Rien \u00e0 d\u00e9clarer? Rien \u00e0 d\u00e9clarer. Mais cette libert\u00e9 de mouvement qui permet \u00e0 l’information de circuler ainsi d’un utilisateur \u00e0 l’autre, transigeant un jour ou l’autre par notre ordinateur, a \u00e9galement sa contrepartie : en ouvrant toute grande la porte au flux informationnel on donne in\u00e9vitablement la chance aux bousilleurs de syst\u00e8mes informatiques d’y trouver refuge. Les hackers<\/em>constituent une r\u00e9elle menace pour la communaut\u00e9 des internautes. M\u00eame si les actes terroristes sont dirig\u00e9s vers un groupe cible, leur pr\u00e9sence dans le r\u00e9seau a rendu les utilisateurs d’Internet craintifs.<\/p>\n\n\n\n

Dans le domaine du cyberart, on retrouve parfois ce comportement rebelle, ax\u00e9 sur l’intrusion et la destruction, mais sous une forme att\u00e9nu\u00e9e. Il faut savoir que l’attitude iconoclaste en art n’est pas une nouveaut\u00e9. Elle a fait irruption au d\u00e9but du XXe si\u00e8cle avec les dada\u00efstes et, depuis, elle a produit beaucoup d’adeptes. Les actions pos\u00e9es par les artistes dada et leurs successeurs visent g\u00e9n\u00e9ralement la destruction des valeurs \u00e9tablies. Exit la sacralisation et l’institution dominatrice. Bien que provocatrices, ces oeuvres s’av\u00e8rent par ailleurs peu mena\u00e7antes pour la personne. Les artistes s’en prennent plut\u00f4t aux objets, r\u00e9els ou symboliques. Mais aujourd’hui, sur le Net, les choses se passent diff\u00e9remment car on ne s’attaque pas \u00e0 un objet ext\u00e9rieur \u00e0 soi. Les cyberartistes qui font de l’interr\u00e9seau leur mati\u00e8re premi\u00e8re se manifestent de l’int\u00e9rieur, dans cet objet que certains per\u00e7oivent comme le prolongement de leur corps, l’ordinateur. Ils sont pour ainsi dire dans notre espace intime ce qui les rend plus mena\u00e7ants.<\/p>\n\n\n\n

Le plus virulent, et sans doute le plus connu d’entre eux, est le duo form\u00e9 de Joan Heemskerk et Dirk Paesmans qu’on retrouve sur le Web sous le nom de jodi. Plusieurs projets \u00e0 leur actif, une pr\u00e9sence remarqu\u00e9e \u00e0 ISEA 97 et \u00e0 la documenta X, jodi travaille dans et avec Internet depuis 1993-1994 (entrevue avec\u00a0Tilman Baumgaertel). Leur plus r\u00e9cent projet\u00a0<http:\/\/404.jodi.org\/>\u00a0n’est toutefois pas bien dangereux. Inspir\u00e9 du fameux message d’erreur 404 (File not found<\/em>), ce projet invite le visiteur \u00e0 inscrire un message qui appara\u00eetra dans la page \u00e0 la suite des messages envoy\u00e9s pr\u00e9c\u00e9demment par d’autres visiteurs. Dans un cas, le texte est filtr\u00e9 par un programme qui en extrait les voyelles, dans l’autre, ce sont les consonnes qui ont \u00e9t\u00e9 retir\u00e9es. L’alt\u00e9ration rend la lecture pour ainsi dire impossible, la communication est corrompue par l’intervention de l’artiste.<\/p>\n\n\n\n

Il s’agit n\u00e9anmoins d’une oeuvre inoffensive si on la compare au projet OSS, ant\u00e9rieur<\/a>\u00a0de quelques mois. Ce dernier existe en version int\u00e9grale sur c\u00e9d\u00e9rom (inclus dans la revue n\u00e9erlandaise\u00a0Mediamatic, vol.9, n\u00b02-3, automne 1998) et une partie de l’oeuvre se trouve en ligne. On ne saurait la recommander qu’aux plus t\u00e9m\u00e9raires car une fois pi\u00e9g\u00e9 dans ce foutoir il est difficile d’en sortir, il vous faudra peut-\u00eatre red\u00e9marrer votre ordinateur et qui sait s’il ne restera pas quelques s\u00e9quelles. Une chose est s\u00fbre, on perd le contr\u00f4le de notre appareil qui ne r\u00e9pond plus aux commandes. Par exemple, sur le site\u00a0<http:\/\/oss.jodi.org\/>, on restera impuissant devant l’ouverture et la fermeture successives de petites fen\u00eatres d\u00e9filant de mani\u00e8re al\u00e9atoire et \u00e0 un rythme d’enfer sur l’\u00e9cran. Pour ceux qui pr\u00e9f\u00e8rent se tenir \u00e0 distance, Alex Galloway fait une description assez d\u00e9taill\u00e9e de ce projet dans un texte intitul\u00e9\u00a0User’s Guide to OSS<\/em>, paru dans Rhizome.<\/p>\n\n\n\n

Le caract\u00e8re iconoclaste n’est cependant pas exclusif \u00e0 jodi. D’autres cyberartistes pratiquent cette d\u00e9marche, notamment David Opp. Artiste multidisciplinaire \u00e9tabli \u00e0 New York, David Opp utilise dans sa pi\u00e8ce\u00a04YB-002, pr\u00e9sent\u00e9e sur le site de Hotwired RGB Gallery, le langage propre \u00e0 l’ordinateur, plus sp\u00e9cifiquement au Macintosh. Il s’inspire de l’aspect graphique de ses interfaces, y int\u00e8gre des composantes sonores et des codes HTML pour en faire une mosa\u00efque multidimensionnelle compos\u00e9e de 157 fichiers diff\u00e9rents. L’oeuvre est ponctu\u00e9e d’une apparition constante, voire excessive, de messages d’alerte allant du simple message indiquant une erreur dans le programme \u00e0 des messages plus inqui\u00e9tants\u00a0:\u00a0Are you sure you want to shut down your computer?<\/em><\/p>\n\n\n\n

Mark Napier, artiste visuel converti au cyberart, fait \u00e9galement partie de ces artistes dont la d\u00e9marche s’apparente \u00e0 celle des\u00a0hackers<\/em>, sans par ailleurs causer de dommages \u00e0 votre syst\u00e8me d’op\u00e9ration. Partant du principe que le navigateur est un \u00ab\u00a0organe de perception\u00a0\u00bb (Why Shred the Web<\/em>) qui permet de lire des informations cod\u00e9es en langage HTML, Napier a cr\u00e9\u00e9 le\u00a0Shredder<\/em>,\u00a0<\/em>une interface dont le programme vise \u00e0 intercepter les donn\u00e9es avant que le navigateur ne les transpose dans une pr\u00e9sentation coh\u00e9rente. Il en r\u00e9sulte une distorsion totale de l’information, les mots deviennent des objets, des taches, des amalgames de couleurs et de signes. Le propos est clair, le\u00a0Shredder<\/em>\u00a0trafique les pages Web que vous lui demandez de lire, vous les fait voir sous un angle totalement inattendu. Tr\u00e8s destructeur, ce travail n’est toutefois pas d\u00e9pourvu de s\u00e9duction.<\/p>\n\n\n\n

Ces enfants terribles du cyberart ont en commun une pratique iconoclaste construite sur la sp\u00e9cificit\u00e9 de l’Internet en tant que nouveau m\u00e9dia. La grande mall\u00e9abilit\u00e9 de la mati\u00e8re num\u00e9rique agit sur eux comme un d\u00e9clencheur alors qu’elle d\u00e9route la plupart d’entre nous en somme, c’est l’herm\u00e9tisme de ce nouveau langage qui nous fait voir ces oeuvres comme des objets mena\u00e7ants.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

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