N\u00e9 \u00e0 Bogota (Colombie, 1964), Sawad Brooks a fait ses \u00e9tudes au Massachussets Institute of Technology (MIT) Media Laboratory. Les pr\u00e9occupations de ce designer et programmeur d’interface tournent autour de la th\u00e9orie litt\u00e9raire, de la computation et de l’art. Sur le site personnel de Brooks, on retrouve Tree<\/em><\/strong> et Topograph<\/em><\/strong>, deux designs computationnels (demos ou \u00e9tudes d’application). Le premier s’inspire de l’effet rhizomatique des embranchements navigationnels, une fa\u00e7on de visualiser le r\u00e9seau des liens internes et externes engendr\u00e9s par un lien initial, le deuxi\u00e8me con\u00e7oit l’activit\u00e9 du curseur (\u00e0 partir d’une souris ou d’une autre manette) comme une surface sensible \u00e9tendue, Antoine Schmitt utilise aussi ce type d’effet \u00e9tendu dans une oeuvre intitul\u00e9e Antoine<\/em>.<\/p>\n\n\n\n Sous le titre g\u00e9n\u00e9ral de Lapses and Erasures<\/em><\/strong> et \u00e0 une adresse diff\u00e9rente du site personnel de Brooks, on pourra exp\u00e9rimenter ses oeuvres les plus significatives. Quatre oeuvres y sont regroup\u00e9es:<\/p>\n\n\n\n Nous nous int\u00e9ressons ici \u00e0 deux de ces oeuvres : register<\/em><\/strong> et annotator<\/em><\/strong>. Il a, par ailleurs, travaill\u00e9 en collaboration sur deux projets distincts avec les artistes Christa Erickson et Shu Lea Sheang.<\/p>\n\n\n\n Au d\u00e9part de register<\/em><\/strong>, une photographie en noir et blanc l\u00e9g\u00e8rement floue et soign\u00e9e, repr\u00e9sentant un visage avec une entaille \u00e0 l’oeil gauche et empreint d’une sensualit\u00e9 subtile. La beaut\u00e9 cin\u00e9tique du jeu visuel est toute concentr\u00e9e dans la lente et fluide reconstitution de ce visage. Divis\u00e9e en de multiples bandes horizontales l’image, une fois perturb\u00e9e par l’intervention du curseur, se reconstitue dans un effet de miroitement aqueux. Un effet obtenu parce que chaque ligne horizontale a une direction et une impulsion kinesth\u00e9sique asym\u00e9triques. La lenteur de la reconstitution et le flou font en sorte que la reconnaissance du visage ne se produira qu’\u00e0 la toute fin. Il y a lieu de comparer cela \u00e0 un \u00e9veil doucereux, par lequel les objets reprennent une coh\u00e9sion spatiale. shuttle-shutter<\/em><\/strong> joue dans un registre semblable. Dans les deux cas, la fluidit\u00e9 des mouvements est tout \u00e0 fait remarquable<\/strong>.<\/p>\n\n\n\n Annotator<\/em><\/strong>: Beth Stryker (qui cosigne quelques projets) et Sawad Brooks ont produit des images ayant un caract\u00e8re parfois cin\u00e9matographique, parfois illustratif. Une iconographie qui d\u00e9gage une pr\u00e9sence, une intrigue contextuelle ou un flou narratif. Seize titres en hyperliens ouvrent, chacun, sur une de ces images.<\/p>\n\n\n\n Parmi ces titres gloom<\/em><\/strong>, qui signifie m\u00e9lancolie, nous pr\u00e9sente un train arr\u00eat\u00e9 en gare. Il fait nuit, quelques badauds attendent on ne sait quoi. Le train est vert et des lumi\u00e8res \u00e9lectriques \u00e9clairent de petits espaces sur le quai. Le jeu consiste \u00e0 graver du texte sur cette image. Vous avez un choix de cinq couleurs et cinq tailles de police, votre curseur d\u00e9termine l’endroit o\u00f9 le texte appara\u00eetra. Au bas de l’image, deux lettres cliquables: la lettre S<\/strong> pour sauvegarder et la lettre L<\/strong> pour faire appara\u00eetre la liste num\u00e9rot\u00e9e des interventions d\u00e9j\u00e0 effectu\u00e9es par d’autres internautes. Vous avez alors le loisir de parcourir ces interventions, de choisir laquelle sera l’objet de votre inspiration ou de partir d’une image vierge.<\/p>\n\n\n\n L’int\u00e9r\u00eat r\u00e9side ici dans le fait que chaque intervention typographique occupe un espace temporel distinct, c’est-\u00e0-dire que deux phrases ou mots (ou autres combinaisons de chiffres et de lettres) inscrits sur l’image ne peuvent appara\u00eetre simultan\u00e9ment. Alors, plus le nombre d’interventions sur une m\u00eame image augmente, plus l’apparition-disparition de chacune des inscriptions s’acc\u00e9l\u00e8re. \u00c0 tel point qu’elles seront \u00e0 peine lisibles ou m\u00eame illisibles, selon les couleurs, les tailles choisies et le nombre d’inscriptions. Un mot seul, par contre, ne bouge pas, c’est l’\u00e9tat z\u00e9ro du signifiant. Qui plus est, une fois votre intervention sauvegard\u00e9e (en cliquant sur S<\/strong>), elle n’est pas d\u00e9finitivement stabilis\u00e9e, car n’importe qui pourra, \u00e0 tout moment, y ajouter une autre intervention, effa\u00e7ant quelque peu la v\u00f4tre en augmentant la fugacit\u00e9 du temps de lecture et en encombrant la surface de l’image. <\/p>\n\n\n\n Ce principe d’accumulation ou d’interventions superpos\u00e9es ressemblera parfois \u00e0 une suite ininterrompue de n\u00e9ons fr\u00e9n\u00e9tiques. Mais outre le jeu visuel, les associations entre les mots (ou les signes) induisent une signification parfois tr\u00e8s suggestive. Redoubl\u00e9 par un temps de lecture inattendu ou acc\u00e9l\u00e9r\u00e9, le sens qui se noue entre l’image, le texte et le mouvement prend des tournures in\u00e9dites<\/strong>. Un exercice ludique simple qui occupe un champ participatif stimulant et plein de rebondissements s\u00e9mantiques.<\/p>\n\n\n\n On recommande Netscape 4 pour le visionnement de ces oeuvres.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":" N\u00e9 \u00e0 Bogota (Colombie, 1964), Sawad Brooks a fait ses \u00e9tudes au Massachussets Institute of Technology (MIT) Media Laboratory. Les pr\u00e9occupations de ce designer et programmeur d’interface tournent autour de la th\u00e9orie litt\u00e9raire, de la computation et de l’art. Sur le site personnel de Brooks, on retrouve Tree et Topograph, deux designs computationnels (demos ou \u00e9tudes d’application). 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