{"id":797,"date":"2017-11-01T16:10:20","date_gmt":"2017-11-01T16:10:20","guid":{"rendered":"https:\/\/archee.uqam.ca\/?p=797"},"modified":"2022-11-04T16:10:31","modified_gmt":"2022-11-04T16:10:31","slug":"novembre-2017-lignes-introductives-archee-20-ans-deja","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/archee.uqam.ca\/novembre-2017-lignes-introductives-archee-20-ans-deja\/","title":{"rendered":"Novembre 2017 – Lignes introductives – Arch\u00e9e, 20 ans d\u00e9j\u00e0"},"content":{"rendered":"\n

Mot de Christine Palmieri<\/h2>\n\n\n\n

Chers lecteurs, lectrices, auteur(e)s et artistes,<\/p>\n\n\n\n

Nous avons le plaisir de c\u00e9l\u00e9brer avec vous le 20\u00e8me anniversaire d\u2019Arch\u00e9e. Cr\u00e9e \u00e0 l\u2019automne 1997, la revue Arch\u00e9e est fi\u00e8re de continuer \u00e0 promouvoir les arts m\u00e9diatiques avec un m\u00eame enthousiasme et cela gr\u00e2ce \u00e0 vous, \u00e0 votre fid\u00e9lit\u00e9, votre esprit d\u2019analyse et votre productivit\u00e9 toujours renouvel\u00e9s.<\/p>\n\n\n\n

En effet, les exp\u00e9riences et les explorations artistiques utilisant les technologies que les avanc\u00e9es scientifiques apportent se sont d\u00e9multipli\u00e9es en renouvelant les langages et les formes visuelles de fa\u00e7on exponentielle, en transformant le paysage habituel de l\u2019art, le d\u00e9mat\u00e9rialisant ou encore l\u2019invitant au centre m\u00eame de la mati\u00e8re pour en augmenter les r\u00e9alit\u00e9s sur un plan ontologique et m\u00e9taphysique au sein d\u2019un monde toujours en qu\u00eate d\u2019explorations infinies.<\/p>\n\n\n\n

Arch\u00e9e se veut le t\u00e9moin de ces pratiques artistiques audacieuses qui bouleversent nos sens, d\u2019un point de vue cognitif, affectif et sensoriel, pour en transmettre les connaissances, les enjeux et la port\u00e9e aux communaut\u00e9s int\u00e9ress\u00e9es mais aussi pour les faire conna\u00eetre de tous dans un enrichissement mutuel. Observer leur \u00e9volution c\u2019est observer celle des sciences et des esprits sinon de l\u2019intelligence humaine mise au service de l\u2019intelligence artificielle, qui ne peut que mieux nous seconder dans notre condition humaine, avec ses limites et ses contraintes.<\/p>\n\n\n\n

Ces \u0153uvres d’art, dont le fonctionnement fait appel aux nouvelles technologies, se rattachent \u00e0 diverses cat\u00e9gories comme l’art vid\u00e9o, cin\u00e9tique, informatique, num\u00e9rique, immersif, \u00e9lectronique, interactif, multim\u00e9dia, biotech, robotique, sonore, spatial, du cyberespace, des r\u00e9seaux, etc., elles questionnent la science en lui empruntant ses pouvoirs quasi magiques qui donnent naissance \u00e0 des \u0153uvres surprenantes, \u00e0 la limite de la science-fiction.<\/p>\n\n\n\n

Elles nous font prendre conscience de l\u2019espace physique dans lequel nous baignons, avec ses ondes et ses rayons gammas, pour nous ramener au plus pr\u00e8s de la mati\u00e8re virtuelle gr\u00e2ce \u00e0 laquelle nous communiquons.<\/p>\n\n\n\n

Si l\u2019art contemporain vit depuis quelques d\u00e9cennies une brisure, c\u2019est parce qu\u2019on est pass\u00e9 de l\u2019exp\u00e9rimentation des mat\u00e9riaux artistiques traditionnels ou usuels \u00e0 l\u2019exp\u00e9rimentation de la mati\u00e8re virtuelle, luminescente, sonore, magn\u00e9tique ou biologique pour donner au contenu symbolique une port\u00e9e plus charnelle qu\u2019intellectuelle dans une d\u00e9marche kinest\u00e9sique o\u00f9 la perception, la sensibilit\u00e9 et la m\u00e9moire en mouvement renforcent le plaisir ou le d\u00e9plaisir, communiquent au mieux les doutes face \u00e0 l\u2019inconnu et aux d\u00e9couvertes toujours plus fascinantes et inqui\u00e9tantes.<\/p>\n\n\n\n

C\u2019est pour cela qu\u2019Arch\u00e9e n\u2019a cess\u00e9 de voir son lectorat augmenter d\u2019ann\u00e9e en ann\u00e9e mais aussi d\u2019accueillir plus d\u2019auteurs de partout dans le monde venant d\u2019horizons diff\u00e9rents, analysant ou commentant avec passion ces \u0153uvres que les artistes nous offrent non plus dans l\u2019id\u00e9e de d\u00e9construire le monde et l\u2019art mais au contraire de les augmenter d\u2019un surcro\u00eet de possible, donnant \u00e0 voir le spectacle des manipulations des mati\u00e8res du monde visibles et invisibles, pour r\u00e9enchanter la vision de l\u2019avenir devant ce qui semble \u00eatre une d\u00e9cadence des valeurs et des croyances. De ce fait l\u2019artiste d\u00e9ploie son imaginaire avec les outils de la science tout comme il le faisait avant avec les moyens traditionnels pour chercher \u00e0 surprendre et \u00e0 atteindre le spectateur autant par les affects que l\u2019intellect.<\/p>\n\n\n\n

Au confluent des disciplines et des genres, Arch\u00e9e dresse une cartographie \u00e9largie des productions actuelles, qui \u00e9laborent des concepts et des langages nouveaux en \u00e9cho \u00e0 l\u2019\u00e9nergie du milieu o\u00f9 l\u2019art semble toujours \u00eatre en devenir comme en t\u00e9moignent nos ententes et partenariats avec des groupes de recherche universitaires et des centres m\u00e9diatiques internationaux qui ont contribu\u00e9 de fa\u00e7on remarquable \u00e0 \u00e9tablir des \u00e9changes fructueux \u00e0 travers plus de 120 pays. Arch\u00e9e offre ainsi une plateforme discursive riche et actuelle o\u00f9 de nombreux aspects des arts m\u00e9diatiques sont abord\u00e9s \u00e0 travers de multiples disciplines.<\/p>\n\n\n\n

Arch\u00e9e remercie ses lecteurs, lectrices, et tous les intervenants, autant les auteur(e)s, les artistes, les membre du CA et du comit\u00e9 de lecture, les webmestres ainsi que les subventionneurs qui ont contribu\u00e9 \u00e0 r\u00e9aliser ces 20 ann\u00e9es de publications d\u2019\u0153uvres et de textes qui enrichissent la culture et font avancer les connaissances.<\/p>\n\n\n\n

Le diaporama qui suit offre un \u00e9chantillon d\u2019une quarantaine d\u2019\u0153uvres retenues arbitrairement parmi les milliers de productions pr\u00e9sent\u00e9es depuis 1997, ann\u00e9e de la fondation d\u2019Arch\u00e9e par Pierre Robert qui l\u2019a dirig\u00e9e jusqu\u2019en 2006, o\u00f9 Christine Palmi\u00e9ri, qui le secondait depuis deux ans, a commenc\u00e9 \u00e0 en assurer la direction.<\/p>\n\n\n\n

Pour avoir permis la naissance et la longevit\u00e9 d\u2019Arch\u00e9e, je remercie particuli\u00e8rement :
Pierre Robert qui nous fait part ici des d\u00e9buts de cette aventure qu\u2019il a men\u00e9e courageusement au moment o\u00f9 le web commen\u00e7ait \u00e0 \u00e9tendre ses mailles dans une soci\u00e9t\u00e9 virtuelle en balbutiement et o\u00f9 les arts des nouveaux m\u00e9dia prenaient timidement leur place sur la sc\u00e8ne artistique.<\/p>\n\n\n\n

Louise Poissant et Joanne Lalonde, pour leur encouragement, implication et soutien, qui soulignent ici ces 20 ans d\u2019Arch\u00e9e qu\u2019elles accompagnent fid\u00e8lement avec confiance.<\/p>\n\n\n\n

Andr\u00e9 \u00c9ric L\u00e9tourneau, pour son int\u00e9r\u00eat et soutien, qui pr\u00e9sente l\u2019\u0153uvre Cr\u00e9atures herm\u00e9tiques dans mon char bb des otages inaper\u00e7us d\u2019Alexandre Saint-Onge, performance de 24h, que l\u2019artiste r\u00e9alisera \u00e0 l\u2019Agora des Sciences (Hexagram\/ UQAM), du 2 et 3 d\u00e9cembre 2017 et la suite du dossier Hexa Sonde I : La r\u00e9alit\u00e9 red\u00e9ploy\u00e9e qu\u2019il a men\u00e9 avec Cynthia Noury en interviewant Fran\u00e7ois Joseph Lapointe et Jean Dubois.<\/p>\n\n\n\n

Louise Boisclair pour l\u2019assiduit\u00e9 de ses nombreuses et judicieuses collaborations qui s\u2019entretient ici avec Philippe Boissonnet dans le cadre du dossier Affect ou \u00e9motion en art immersif et interactif.<\/p>\n\n\n\n

Beno\u00eet Ducharme pour ce travail rigoureux de mise en ligne qu\u2019il accomplit depuis un an et qui nous permet d\u2019acc\u00e9der \u00e0 ces univers cr\u00e9atifs et \u00e0 ces r\u00e9flexions enrichissantes qu\u2019Arch\u00e9e offre depuis 20 ans.<\/p>\n\n\n\n

Afin de souligner ces deux d\u00e9cennies de collaboration et d\u2019amiti\u00e9, nous vous invitons au lancement de ce num\u00e9ro qui aura lieu \u00e0 l\u2019Agora des Sciences (Hexagram\/ UQAM), le 4 d\u00e9cembre 2017, de 17h \u00e0 19h qui sera suivi de plusieurs autres activit\u00e9s.<\/p>\n\n\n\n


\n\n\n\n

Mot de Pierre Robert<\/h2>\n\n\n\n

R\u00e9capitulatif<\/h2>\n\n\n\n

Voil\u00e0 maintenant 20 ans que le p\u00e9riodique \u00e9lectronique ARCH\u00c9E existe, afin de souligner cette long\u00e9vit\u00e9 toute \u00e0 l\u2019honneur de la continuit\u00e9 et de la rigueur \u00e9ditoriale du p\u00e9riodique, je vous propose un regard r\u00e9trospectif et un t\u00e9moignage partiellement riv\u00e9s \u00e0 ses dix premi\u00e8res ann\u00e9es d\u2019existence, \u00e0 l\u2019aube explosive du web.<\/p>\n\n\n\n

Le tremplin initial<\/h2>\n\n\n\n

Le 12 mars 1989, le web nait; son accessibilit\u00e9 grand public est rendue possible le 30 avril 1993, gr\u00e2ce \u00e0 l\u2019introduction du navigateur gratuit\u00a0Mosaic; quatre ans plus tard, en 1997, le p\u00e9riodique Arch\u00e9e diffuse ses premiers textes et s\u2019engage dans l\u2019arcane binaire de l\u2019univers num\u00e9rique; l\u2019ann\u00e9e suivante (1998), le moteur de recherche Google fait son apparition; aujourd\u2019hui (2017), le web a 28 ans.<\/p>\n\n\n\n

L\u2019internationalisation des liens sociaux num\u00e9riques a rapidement fait du web un m\u00e9dium de communication hyper massif. L\u2019ampleur sociale, politique, psychologique et \u00e9conomique que prennent les communications en r\u00e9seaux, les va-et-vient viraux de l\u2019int\u00e9r\u00eat public, la capitalisation commerciale des m\u00e9ta donn\u00e9es, le\u00a0Dark web, le web n\u2019en finit plus d\u2019\u00e9tonner et de reconduire des r\u00e9flexions s\u00e9rieuses sur nos soci\u00e9t\u00e9s et nos habitudes de vie.<\/p>\n\n\n\n

L\u2019arriv\u00e9e d\u2019Arch\u00e9e dans ce r\u00e9seau est \u00e9troitement li\u00e9e \u00e0 la possibilit\u00e9 d\u2019int\u00e9grer au web des informations visuelles et interactives. Avant ce moment charni\u00e8re, seul le texte avait pignon sur le web. Les binettes et une panoplie de cr\u00e9ations sur la base des lettres et symboles du clavier ont \u00e9merg\u00e9. D\u00e9sormais enrichi d\u2019\u00e9l\u00e9ments graphiques, le r\u00e9seau des r\u00e9seaux attire un nombre croissant d\u2019utilisateurs, dont de jeunes artistes, des cr\u00e9atifs, des intellectuels de la communication, des pirates et des pionniers de l\u2019\u00e9lectronique en r\u00e9seau. La plan\u00e8te virtuelle se met alors \u00e0 \u00e9laborer une cr\u00e9ativit\u00e9 online.<\/p>\n\n\n\n

Les domaines de l\u2019art (moderne et contemporain) ne sont pas seulement d\u00e9territorialis\u00e9s, elles s\u2019effacent et se perdent les unes apr\u00e8s les autres, sous l\u2019inaudible clapotis des claviers activ\u00e9s par d\u2019innombrables internautes, de Saint-P\u00e9tersbourg \u00e0 Seattle, de Montr\u00e9al \u00e0 Dubai, etc. D\u00e8s lors, l\u2019Internet devient une plateforme d\u2019\u00e9change d\u2019informations et de recherche digne des meilleurs romans de science-fiction. C\u2019est incroyable.\u00a0Neuromancien\u00a0de William Gibson, publi\u00e9 en 1984, est le livre \u00e0 lire, le h\u00e9ros, un hacker d\u2019univers virtuels de haut niveau, plonge dans l\u2019irr\u00e9alit\u00e9 totale. En 1997, plusieurs s\u2019aventurent concr\u00e8tement dans cet univers ubiquitaire des communications num\u00e9riques, l\u2019hacktivisme\u00a0prend forme. Mais le web ne se r\u00e9sumera pas \u00e0 l\u2019infiltration et aux stratag\u00e8mes de d\u00e9tournement et d\u2019acquisition d\u2019informations. De nouveaux artistes y sont et ils triturent les codes et les interfaces \u00e0 leur fa\u00e7on.<\/p>\n\n\n\n

Majoritairement nord-am\u00e9ricains et europ\u00e9ens (zones premi\u00e8res de l\u2019expansion de l\u2019Internet), les artistes du web en font un territoire d\u2019exp\u00e9rimentations, en diss\u00e9quant syst\u00e9matiquement, entre autres, ce nouveau mode de communication. On veut savoir ce qu\u2019Internet a dans le ventre, en connaitre la structure et la fiabilit\u00e9. Ces artistes pionniers proviennent de divers horizons. Les protocoles r\u00e9gissant l\u2019Internet et le web reposent sur un savoir partag\u00e9 et donc accessible, on les manipulera librement et sauvagement, tout comme, \u00e0 une autre \u00e9poque,\u00a0Nam June Paik\u00a0le faisait avec les t\u00e9l\u00e9viseurs. On brouille le signal. En effet, en quelques clics, on copie des portions de codes pour les utiliser \u00e0 d\u2019autres fins. \u00c0 ce titre, Mike Napier en 1998, avec son\u00a0Shredder\u00a01.0, est exemplaire. Le Shredder\u00a01.0 d\u00e9chiqu\u00e8te les pages web et vous les restitue dans une d\u00e9sorganisation anarchique des codes associ\u00e9s \u00e0 la mise en page. La figurabilit\u00e9 du web est mise \u00e0 mal, la surface lisible est dissoute dans son support informatique. Le spectre de Monsieur Smith en perd son latin.<\/p>\n\n\n\n

D\u00e8s le d\u00e9but, l\u2019art web se distingue par son caract\u00e8re critique et divergent. Il frappe au c\u0153ur du dispensaire num\u00e9rique pour en d\u00e9crypter les forces et les faiblesses, tous azimuts. Une forme d\u2019art int\u00e9gr\u00e9e plus largement, et peut-\u00eatre de fa\u00e7on trop pr\u00e9cipit\u00e9e, \u00e0 \u00abl\u2019art et les nouvelles technologies\u00bb. Ce processus de d\u00e9layage d\u00e9note une certaine faiblesse du discours \u00e0 saisir les enjeux de cet art sans pass\u00e9, sans sp\u00e9culation marchande, sans territoire d\u2019appartenance, sans nationalit\u00e9 et dont la valeur sur les r\u00e9seaux s\u2019av\u00e8re fondamentalement fluctuante. Entre l\u2019utopie intrins\u00e8que \u00e0 ce nouveau m\u00e9dium de communication et la libert\u00e9 qu\u2019elle autorise, l\u2019art et le web naviguent dans un bienheureux chaos. Les fa\u00e7ades normatives du web, simulant la culture visuelle m\u00e9diatique traditionnelle, sont rapidement mises \u00e0 mal par des interventions associ\u00e9es \u00e0 une des formes de l\u2019hacktivisme (l\u2019artivisme ?), ces actions s\u2019accompagnent d\u2019une recherche formelle num\u00e9rique.<\/p>\n\n\n\n

Qui plus est, par sa structure ouverte, le web en arrive \u00e0 embrouiller les canaux habituels de la l\u00e9gitimation esth\u00e9tique dans le domaine de l\u2019art. Le statut de ces nouveaux cr\u00e9ateurs et artistes demeure ambigu, la diffusion internationale, implicite au m\u00e9dia lui-m\u00eame, engage des probl\u00e9matiques in\u00e9dites aupr\u00e8s des institutions mat\u00e9rielles d\u00e9di\u00e9es aux arts visuels. Le fait d\u2019int\u00e9grer des ordinateurs branch\u00e9s dans les salles d\u2019exposition ne comblera que trop peu un souci l\u00e9gitime de reconnaissance. Le web, intrins\u00e8quement, oppose une fin de non-recevoir \u00e0 l\u2019exclusivit\u00e9. Dans un autre ordre d\u2019id\u00e9e, le caract\u00e8re immat\u00e9riel et ubiquitaire de la communication, indispose une critique fond\u00e9e sur les aprioris intellectuels de l\u2019histoire de l\u2019art occidental, et pour lequel les beaux-arts occupent une place relativement consid\u00e9rable.<\/p>\n\n\n\n

La main, symbole insurpass\u00e9 de la cr\u00e9ativit\u00e9 humaine, perd drastiquement son empreinte identitaire, au profit de liens virtuels engendr\u00e9s par un r\u00e9seau construit sur la base d\u2019une participation individuelle volontaire. La gratuit\u00e9 num\u00e9rique ne convient pas au syst\u00e8me de l\u2019art, tout comme la performance dans les ann\u00e9es 1970, mais, cette fois-ci, \u00e0 une \u00e9chelle in\u00e9dite. En cumulant ces caract\u00e9ristiques, le web et l\u2019art r\u00e9ussissent un hors-norme parfait.<\/p>\n\n\n\n

Entre l\u2019enthousiasme et l\u2019excitation que ce terrain vierge soul\u00e8ve, tant par son potentiel que son absence indiscut\u00e9e dans le milieu de l\u2019art contemporain, se creuse une b\u00e9ance quasi insurmontable. L\u2019art contemporain, engag\u00e9 dans le march\u00e9 de l\u2019art \u00e0 \u00e9galit\u00e9 avec l\u2019art moderne, s\u2019est accompli, les ann\u00e9es 1960 tracent une ligne historique. Toutefois, l\u2019art contemporain, dans les ann\u00e9es 1990, doit g\u00e9rer une crise issue d\u2019un tiraillement \u00e9thique entre la valeur de l\u2019art (son esth\u00e9tique), celle de l\u2019objet d\u2019art (comme valeur marchande) et la valeur financi\u00e8re de l\u2019artiste (comme forme de reconnaissance). Cette crise aura pour effet de porter davantage ombrage \u00e0 l\u2019art des nouvelles technologies, car le radar de l\u2019art contemporain ne peut en d\u00e9tecter la pr\u00e9sence et encore moins le d\u00e9veloppement. L\u2019art contemporain ne parle, en somme, que de lui-m\u00eame. Cela a pour effet de singulariser \u00e0 l\u2019extr\u00eame les productions artistiques sur le web et de faire \u00e9merger, par d\u00e9faut, un r\u00e9seau (de r\u00e9seaux) excentr\u00e9. Toutefois, ce r\u00e9seau n\u2019est pas homog\u00e8ne, en cela repr\u00e9sentatif de la diversit\u00e9 des int\u00e9r\u00eats, des communaut\u00e9s d\u2019id\u00e9es, de genres, de cultures et d\u2019exp\u00e9rimentations.<\/p>\n\n\n\n

C\u2019est cette b\u00e9ance culturelle que la revue \u00e9lectronique Arch\u00e9e a voulu aborder en 1997. Par, entre autres, une veille avis\u00e9e des productions artistiques sur le web et un regard analytique en lien avec l\u2019univers num\u00e9rique et \u00e9lectronique, ses langages, ses proc\u00e9d\u00e9s, ses intentions, ses penseurs, son \u00e9mergence et sa culture propre (la cyberculture).<\/p>\n\n\n\n

DDans un r\u00e9cent article intitul\u00e9 \u00abLa fin de l\u2019Internet est-elle pour bient\u00f4t?\u00bb (Ex-Situ, 2 f\u00e9vrier 2017), Juliette Marzano rappelle \u00e0 juste titre la composition initiale de l\u2019Internet, soit une suite de plateformes publiques, d\u00e9mocratiques, \u00e9ducatives \u00abet donc incompatibles avec le commercialisme\u00bb. Un ordre initial grug\u00e9 par des d\u00e9r\u00e8glementations successives qui ont fait de l\u2019Internet un syst\u00e8me d\u00e9sormais largement priv\u00e9. Ce constat m\u2019am\u00e8ne \u00e0 poser la question suivante\u00a0: les artistes ont-ils, dans la m\u00eame foul\u00e9e, abandonn\u00e9 le terrain virtuel?<\/p>\n\n\n\n

\u00c0 propos de l\u2019artiste\u00a0Fr\u00e9d\u00e9rique Lalibert\u00e9, Marzano affirme que l\u2019objectif de son \u0153uvre serait de d\u00e9truire \u00ables logiques mercantiles des algorithmes gouvernant l\u2019Internet\u00bb. Cette \u0153uvre, dit-elle, \u00abg\u00e9n\u00e8re des compositions al\u00e9atoires et chaotiques d\u2019information en ligne\u00bb. Relire les articles du p\u00e9riodique Arch\u00e9e permettrait de mettre en perspective les interventions actuelles. Les intentions et les visions des artistes pionniers du web et de l\u2019Internet ont effectivement contribu\u00e9 \u00e0 briser, secouer ou d\u00e9tourner les r\u00e8gles et l\u2019\u00e9thique de l\u2019Internet. \u00c0 ce titre\u00a0MaChair&MonSang\u00a0de Mouchette, ce jeune personnage f\u00e9minin \u00e9nigmatique, cr\u00e9\u00e9 en 1998, demeure exemplaire d\u2019une cr\u00e9ation ancr\u00e9e \u00e0 l\u2019essence m\u00eame du paysage num\u00e9rique des communications.<\/p>\n\n\n\n

Rien n\u2019est totalement jou\u00e9 pour ce type d\u2019art, malgr\u00e9 les d\u00e9veloppements fulgurants men\u00e9s par les oligarques de l\u2019Internet. On note un regain d\u2019int\u00e9r\u00eat,\u00a0Tamara Lai\u00a0a r\u00e9cemment cr\u00e9\u00e9 un groupe Facebook (Comment cela se passait-il avant le web\u00a02.0?) qui remet en circulation les \u0153uvres et les moments effervescents des pionniers. Arch\u00e9e en fait partie.<\/p>\n\n\n\n

Mot de la fin<\/h2>\n\n\n\n

J\u2019aimerais remercier tous ceux et celles qui ont particip\u00e9 de pr\u00e8s ou de loin au p\u00e9riodique Arch\u00e9e depuis sa cr\u00e9ation, et ce, \u00e0 tous les niveaux. Un remerciement particulier \u00e0 Richard Barbeau sans qui la plateforme num\u00e9rique d\u2019Arch\u00e9e n\u2019aurait pu voir le jour. Il a construit et \u00e9labor\u00e9 la logique des codes qui nous a permis d\u2019exister sur le web \u00e0 la hauteur de nos attentes. Je remercie \u00e9galement Christine Palmieri et l\u2019\u00e9quipe actuelle pour avoir men\u00e9 Arch\u00e9e de brillante fa\u00e7on depuis d\u00e9j\u00e0 plusieurs ann\u00e9es.<\/p>\n\n\n\n


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Mot de Louise Poissant<\/h2>\n\n\n\n

Arch\u00e9e a 20 ans. Quand on pense \u00e0 tout ce qu\u2019elle a vu passer et \u00e0 ses multiples \u00e9tapes de croissance, il faut souligner cet exploit et c\u00e9l\u00e9brer cette exceptionnelle r\u00e9ussite.<\/p>\n\n\n\n

On craint parfois que le num\u00e9rique et l\u2019intelligence artificielle avec l\u2019apprentissage profond (deep learning, machine learning) et l\u2019Internet des objets (Internet of Things) envahissent le monde du travail et laissent les humains d\u00e9soeuvr\u00e9s voire grabataires. L\u2019apparition de centaines de nouvelles formes d\u2019art reposant sur le num\u00e9rique nous permet d\u2019entrevoir et d\u2019esp\u00e9rer le contraire. Allant du bioart \u00e0 la robosculpture, de l\u2019imagerie 3D \u00e0 l\u2019art web, de la vid\u00e9o aux medias fa\u00e7ades, de l\u2019\u00e9lectrofacture (notamment Deepdream) \u00e0 l\u2019art t\u00e9l\u00e9matique, des installations interactives aux v\u00eatements communiquants, des jeux vid\u00e9o aux applications ludiques, de l\u2019infochor\u00e9graphie aux personnages virtuels, des proth\u00e8ses \u00e0 la r\u00e9alit\u00e9 augment\u00e9e, de la musique \u00e9lectronique \u00e0 la musique Djay, c\u2019est toute une gamme de nouvelles formes d\u2019art qui est apparue. Une prolif\u00e9ration pour ne pas dire une explosion de dispositifs et de fa\u00e7ons de faire diff\u00e9rentes qui s\u2019accompagne d\u2019une expansion de notre sensibilit\u00e9 et de notre vision du monde. L\u2019art num\u00e9rique nous transporte de l\u2019infiniment petit \u00e0 l\u2019infiniment grand en passant par l\u2019infiniment moyen comme le disait Godard du cin\u00e9ma.<\/p>\n\n\n\n

Et c\u2019est de tout cela dont t\u00e9moigne Arch\u00e9e depuis maintenant 20 ans. Relevant les innombrables d\u00e9fis et s\u2019adaptant aux transformations technologiques qui ont marqu\u00e9 les 20 derni\u00e8res ann\u00e9es, la revue s\u2019est elle-m\u00eame m\u00e9tamorphos\u00e9e au rythme des possibilit\u00e9s qui lui \u00e9taient offertes et des contenus dont elle traitait.<\/p>\n\n\n\n

Ce qui est le plus singulier d\u2019Arch\u00e9e, c\u2019est sa dur\u00e9e. Dans le monde de l\u2019instantan\u00e9it\u00e9 o\u00f9 tout change si vite, les technologies comme les formes d\u2019art, il est \u00e9tonnant qu\u2019Arch\u00e9e ait surv\u00e9cu. D\u2019autant qu\u2019il y a 20 ans, son format num\u00e9rique et son \u00e9vanescence la rendaient atypique et soulevaient plusieurs probl\u00e8mes : il a fallu r\u00e9guli\u00e8rement r\u00e9inventer ses modes de production et de diffusion, faire appel \u00e0 des comp\u00e9tences vari\u00e9es en informatique et en conception web, trouver un h\u00e9bergement constant, inventer un plan d\u2019affaire pouvant assurer sa survie toujours fragile comme c\u2019est le cas de toutes les revues num\u00e9riques, et gagner un public amoureux des livres d\u2019art, devant se convertir peu \u00e0 peu \u00e0 la consultation passant par un outil de travail.<\/p>\n\n\n\n

Et il est vrai que ses diverses m\u00e9tamorphoses l\u2019ont rendue toujours mieux adapt\u00e9e aux contenus qu\u2019elle pr\u00e9sentait. En adoptant un format num\u00e9rique, Arch\u00e9e a b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 de la qualit\u00e9 luminescente des \u00e9crans qu\u2019aucun imprim\u00e9 ne peut restituer lorsqu\u2019il s\u2019agit de reproduire des images elles-m\u00eames r\u00e9alis\u00e9es sur un \u00e9cran. En introduisant de la vid\u00e9o, c\u2019est tout l\u2019univers du cin\u00e9tisme et des \u0153uvres qui se d\u00e9ploient dans le temps qu\u2019Arch\u00e9e pouvait pr\u00e9senter en respectant leur caract\u00e8re mouvant et leur dur\u00e9e. Sans parler que son appartenance au Web a permis \u00e0 Arch\u00e9e de cr\u00e9er des liens directs avec des \u0153uvres con\u00e7ues pour le Web ou avec des r\u00e9f\u00e9rences aux galeries et archives num\u00e9riques des artistes qu\u2019elle documente. En ce sens, Arch\u00e9e a cr\u00e9\u00e9 une communaut\u00e9 d\u2019artistes, d\u2019esth\u00e9ticiens et d\u2019amateurs d\u2019art ouverte sur un monde litt\u00e9ralement illimit\u00e9 et en continuelle transformation, celui des arts m\u00e9diatiques.<\/p>\n\n\n\n

Mais cette magnifique aventure qui a maintenant 20 ans ne s\u2019est pas d\u00e9ploy\u00e9e toute seule. La technologie ne le permet pas encore. Derri\u00e8re cette improbable r\u00e9alisation, il y a beaucoup d\u2019imagination, de d\u00e9termination et de pers\u00e9v\u00e9rance. Une vision d\u2019abord, celle de Pierre Robert qui a cr\u00e9\u00e9 la revue et l\u2019a tenue \u00e0 bout de bras pendant plus d\u2019une d\u00e9cennie. Puis le relais inventif et courageux de Christine Palmi\u00e9ri qui arrive \u00e0 tenir la cadence, \u00e0 \u00e9largir les collaborations tant des artistes que des auteurs et \u00e0 maintenir la grande qualit\u00e9 de la revue appel\u00e9e sans cesse \u00e0 se renouveler. Si Arch\u00e9e c\u00e9l\u00e8bre ses 20 ans, c\u2019est d\u2019abord gr\u00e2ce \u00e0 eux et je les salue ici de m\u00eame que toutes celles et ceux qui ont apport\u00e9 leur contribution \u00e0 la revue et qui en ont fait ce qu\u2019elle est : la plus ancienne et la plus grande revue d\u2019art num\u00e9rique encore active en fran\u00e7ais sur le web.<\/p>\n\n\n\n


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Mot de Joanne Lalonde<\/h2>\n\n\n\n

F\u00eater les 20 ans d\u2019un p\u00e9riodique culturel n\u2019est jamais une petite victoire\u2026 surtout dans le monde de la diffusion Web par essence tr\u00e8s volatile.<\/p>\n\n\n\n

La fin de la d\u00e9cennie 90 a \u00e9t\u00e9, rappelons-le, une p\u00e9riode tr\u00e8s fertile pour le d\u00e9veloppement des arts m\u00e9diatiques et num\u00e9riques au Qu\u00e9bec. Arch\u00e9e d\u00e9marre ses publications en 1997 la m\u00eame ann\u00e9e o\u00f9 est cr\u00e9\u00e9e la Fondation Daniel Langlois pour l\u2019art, la science et la technologie. En 1996, d\u00e9butent les activit\u00e9s du Studio XX et dans les ann\u00e9es qui suivent un volet d\u00e9di\u00e9 \u00e0 la cr\u00e9ation Web sera mis sur pied \u00e0 La Chambre Blanche de Qu\u00e9bec. Ces initiatives pionni\u00e8res seront suivies par de nombreuses autres, contribuant ainsi au leadership qu\u00e9b\u00e9cois dans ce domaine.<\/p>\n\n\n\n

Si j\u2019insiste sur la place du Qu\u00e9bec dans le rayonnement des arts m\u00e9diatiques et num\u00e9riques, c\u2019est que je suis persuad\u00e9e qu\u2019Arch\u00e9e y a jou\u00e9 un r\u00f4le central. Premier p\u00e9riodique en ligne \u00e0 offrir une plate-forme de discussion intellectuelle sur la cr\u00e9ation Web, il donne acc\u00e8s gratuitement \u00e0 un r\u00e9pertoire impressionnant de publications sp\u00e9cialis\u00e9es dans le domaine. La persistance et la r\u00e9gularit\u00e9 du magazine ont grandement contribu\u00e9 \u00e0 la constitution d\u2019un r\u00e9seau de th\u00e9oriciens, artistes, historiens, critiques anim\u00e9s d\u2019un int\u00e9r\u00eat pour la cyberculture.<\/p>\n\n\n\n

F\u00eater ses 20 ans est aussi l\u2019occasion de remercier toutes celles et ceux qui ont contribu\u00e9 \u00e0 la vitalit\u00e9 du p\u00e9riodique, r\u00e9dacteur et r\u00e9dactrice en chef, Webmestres, auteurs, artistes et bien entendu lecteurs.trices \u00e0 qui notre travail est destin\u00e9. Je les remercie sinc\u00e8rement en nous souhaitant que cette vitalit\u00e9 se maintienne encore de nombreuses ann\u00e9es.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

Mot de Christine Palmieri Chers lecteurs, lectrices, auteur(e)s et artistes, Nous avons le plaisir de c\u00e9l\u00e9brer avec vous le 20\u00e8me anniversaire d\u2019Arch\u00e9e. Cr\u00e9e \u00e0 l\u2019automne 1997, la revue Arch\u00e9e est fi\u00e8re de continuer \u00e0 promouvoir les arts m\u00e9diatiques avec un m\u00eame enthousiasme et cela gr\u00e2ce \u00e0 vous, \u00e0 votre fid\u00e9lit\u00e9, votre esprit d\u2019analyse et votre … Continued<\/a><\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":0,"comment_status":"open","ping_status":"open","sticky":false,"template":"","format":"standard","meta":{"footnotes":""},"categories":[1],"tags":[],"acf":[],"_links":{"self":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/797"}],"collection":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts"}],"about":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/types\/post"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/users\/1"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/comments?post=797"}],"version-history":[{"count":2,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/797\/revisions"}],"predecessor-version":[{"id":799,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/797\/revisions\/799"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/media?parent=797"}],"wp:term":[{"taxonomy":"category","embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/categories?post=797"},{"taxonomy":"post_tag","embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/tags?post=797"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}