{"id":863,"date":"2017-11-01T18:00:55","date_gmt":"2017-11-01T18:00:55","guid":{"rendered":"https:\/\/archee.uqam.ca\/?p=863"},"modified":"2022-11-04T18:01:11","modified_gmt":"2022-11-04T18:01:11","slug":"novembre-2017-entrevue-avec-francois-joseph-lapointe","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/archee.uqam.ca\/novembre-2017-entrevue-avec-francois-joseph-lapointe\/","title":{"rendered":"Novembre 2017 – Entrevue avec Fran\u00e7ois-Joseph Lapointe"},"content":{"rendered":"\n
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Microbiome selfies – NB3.jpg<\/em><\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n

Andr\u00e9 \u00c9ric L\u00e9tourneau: Fran\u00e7ois-Joseph tu es un artiste interdisciplinaire qui s\u2019int\u00e9resse \u00e0 la danse mais ta formation est en en biologie. Tu as d\u2019ailleurs fait une th\u00e8se de doctorat sur la danse et l\u2019ADN n\u2019est-ce pas ?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

Fran\u00e7ois-Joseph Lapointe: En effet, j\u2019ai fait mon doctorat avec\u00a0Martine \u00c9poque.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L.\u00a0:\u00a0Peux-tu nous parler de ce travail que tu as exp\u00e9riment\u00e9 autour de la danse et de l\u2019ADN\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Le but de cette recherche \u00e9tait d\u2019\u00e9liminer le travail de chor\u00e9graphe en danse. L\u2019objectif n\u2019est pas d\u2019\u00e9liminer le chor\u00e9graphe en tant que tel, mais d\u2019essayer de trouver un processus objectif, de cr\u00e9er des \u0153uvres chor\u00e9graphiques qui ne sont pas bas\u00e9es sur nos aprioris ou nos habitudes pour d\u00e9velopper ensuite un processus subjectif. La recherche d\u2019objectivit\u00e9 reposait sur la mol\u00e9cule d\u2019ADN. J\u2019ai voulu remplacer la cr\u00e9ation chor\u00e9graphique traditionnelle \u2013 o\u00f9 l\u2019on d\u00e9termine l\u2019ordre des mouvements avec une partition \u2013 par la s\u00e9quence de lettres de l\u2019ADN, d\u2019o\u00f9 le terme\u00a0chor\u00e9og\u00e9n\u00e9tique<\/em>. Le but de l\u2019exercice \u00e9tait de s\u00e9quencer une partie de l\u2019ADN des interpr\u00e8tes. Je l\u2019ai fait d\u2019abord en solo. Ensuite nous avons fait des pi\u00e8ces avec trente interpr\u00e8tes. Il s\u2019agissait de leur demander d\u2019interpr\u00e9ter des mouvements pr\u00e9cis qui \u00e9taient au nombre de quatre, parce qu\u2019il y a quatre lettres dans l\u2019alphabet de l\u2019ADN. Le code g\u00e9n\u00e9tique comprend ainsi les quatre lettres A T C G. Ces quatre mouvements repr\u00e9sentaient ces quatre lettres qui sont r\u00e9p\u00e9t\u00e9es ad vitam aeternam dans notre g\u00e9nome. C\u2019est ce que j\u2019avais interpr\u00e9t\u00e9 dans le cadre de solos, ou dans le cadre de pi\u00e8ces de groupe avec diff\u00e9rents interpr\u00e8tes.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Comment op\u00e9rationnalises-tu un code g\u00e9n\u00e9tique en mouvement\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : En fait, les gens pensaient initialement que la chor\u00e9og\u00e9n\u00e9tique<\/em> se r\u00e9ume \u00e0 essayer de repr\u00e9senter la structure tridimensionnelle de l\u2019ADN. On pense bien s\u00fbr \u00e0 cette fameuse double h\u00e9lice. Cela \u00e9t\u00e9 fait \u00e0 maintes et maintes reprises et ne m\u2019int\u00e9resse pas. C\u2019est plut\u00f4t la s\u00e9quence des lettres qui m\u2019int\u00e9resse. Je l\u2019utilise un peu comme dans une partition musicale ou une partition chor\u00e9graphique. Normalement dans une \u0153uvre chor\u00e9graphique il peut y avoir 12, 20, 30, 60 mouvements dont l\u2019ordre est pr\u00e9\u00e9tabli pour essayer de raconter une histoire ou produire un effet esth\u00e9tique. J\u2019ai voulu briser cette approche compl\u00e8tement. Ainsi je me suis limit\u00e9 \u00e0 quatre mouvements. \u00c7a peut \u00eatre r\u00e9p\u00e9titif et redondant, sauf que la s\u00e9quence de ces mouvements est impr\u00e9visible, m\u00eame pour l\u2019interpr\u00e8te. <\/p>\n\n\n\n

Ainsi comment op\u00e9rationnaliser la traduction de l\u2019ADN en mouvement ? Au fait quand je le faisais en solo, c\u2019\u00e9tait les spectateurs qui me dictaient ce que je devais interpr\u00e9ter. Cela s\u2019est pass\u00e9 dans un espace clos, dans le monte-charge de la Place des Arts, donc il ne pouvait y avoir qu\u2019un spectateur \u00e0 la fois. C\u2019\u00e9tait comme un solo pour un interpr\u00e8te. Il me disait \u00ab A \u00bb et je faisais le mouvement \u00ab A \u00bb , \u00ab T \u00bb je faisais le mouvement \u00ab T \u00bb, de m\u00eame avec C, etc. J\u2019ai \u00abperform\u00e9 \u00bb pendant trois heures et demie. C\u2019\u00e9tait impossible pour moi de m\u00e9moriser cette suite de trois cents mouvements que j\u2019avais s\u00e9quenc\u00e9s. J\u2019ai donc utilis\u00e9 les spectateurs qui me dictaient ce que je devais faire. Je les ai appel\u00e9s des \u00abspectateurs-dictateurs\u00bb.<\/p>\n\n\n\n

Pour faire une pi\u00e8ce de groupe, comme chaque interpr\u00e8te a sa propre partition et sa propre s\u00e9quence, je ne pouvais pas demander \u00e0 trente spectateurs de dicter trente s\u00e9quences \u00e0 la fois. J\u2019ai donc traduit tout cela sous la forme d\u2019un fichier mp3. Les interpr\u00e8tes entendaient de fa\u00e7on synchrone et j\u2019entendais dans mes oreilles les lettres A T C G. Mais l\u2019interpr\u00e8te \u00e0 c\u00f4t\u00e9 de moi n\u2019entendait pas A T T C. Quand tout le monde fait les mouvements qui correspondent aux lettres en m\u00eame temps, ce que l\u2019on voit c\u2019est vingt-cinq personnes qui font peut-\u00eatre le m\u00eame mouvement. Mais, il y en a un parfois qui fait le m\u00eame mouvement que les autres mais dans une autre s\u00e9quence. Il est alors consid\u00e9r\u00e9 comme un mutant.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : En quoi est-il un mutant\u00a0? Comment, peut-on d\u00e9finir\u00a0un mutant dans ce contexte?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Nous sommes tous des mutants.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : En quoi celui-ci serait plus mutants que les autres\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Personne n\u2019est plus mutant qu\u2019un autre. Nous le sommes tous.<\/p>\n\n\n\n

Cynthia Noury : C\u2019est rassurant.\u00a0<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : C\u2019est cet effet de masse l\u00e0 qui m\u2019int\u00e9ressait. Mes pi\u00e8ces sont toujours interpr\u00e9t\u00e9es dans l\u2019espace public. L\u00e0, c\u2019\u00e9tait dans le cadre de la\u00a0Nuit Blanche de Montr\u00e9al\u00a0\u00e0 la Gare Centrale, ensuite au Centre de Commerce Mondial puis dans la foire alimentaire, dans le sous-sol du Centre Eaton. Les passants voyaient trente personnes qui se mettaient \u00e0 courir \u00e0 gauche puis \u00e0 droite, se prendre dans leurs bras ou se rouler au sol. C\u2019\u00e9tait les exemples de mouvements que j\u2019avais. Et ce que l\u2019on voyait c\u2019est qu\u2019effectivement une foule n\u2019est pas coordonn\u00e9e. La plupart du temps, les gens font la m\u00eame chose. Mais des fois il y a des esp\u00e8ces de petits \u00e9chos \u00e0 gauche et \u00e0 droite qui montrent justement qu\u2019il y a des gens qui agissent diff\u00e9remment, ce qui prouve que nous ne sommes pas tous pareils, mais que certains ont\u00a0<\/ins>des mutations \u00e0 un endroit pr\u00e9cis dans leur s\u00e9quence. J\u2019avais avec moi des m\u00e9diateurs, c\u2019\u00e9tait des \u00e9tudiants en biologie, de mon laboratoire avec leur sarrau blanc, qui expliquaient exactement le but de l\u2019exercice, qui peut sembler \u00eatre comme de la danse contemporaine\u00a0. Ils avaient pour but d\u2019expliquer les m\u00e9canismes de mutation, l\u2019h\u00e9r\u00e9dit\u00e9, l\u2019\u00e9volution et\u00a0l<\/ins>\u2019universalit\u00e9\u00a0<\/ins>du code g\u00e9n\u00e9tique par l\u2019entremise de la danse.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Mais ce travail comporte tout de m\u00eame une dimension esth\u00e9tique. Ce n\u2019est pas essentiellement didactique. Ne serait-ce pas une approche\u00a0esth\u00e9tico-didactique\u00a0?<\/em><\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : En effet. Plut\u00f4t qu\u2019une approche hypoth\u00e9tico-d\u00e9ductive, qui en est le mode de recherche, oui on pourrait  dire que ce serait esth\u00e9tico-didactique.<\/em> Dans mon travail il y a en effet un travail de p\u00e9dagogue, un travail de m\u00e9diation. Moi, j\u2019appelle \u00e7a un travail d\u2019intercesseur, ou de traducteur de la science par l\u2019entremise de l\u2019art. J\u2019ai \u00e9t\u00e9 form\u00e9 dans les deux disciplines et je sais tr\u00e8s bien que les gens qui en proviennent parlent respectivement des discours diff\u00e9rents. Dans le cadre de mon travail, il y a cette esp\u00e8ce de passation, d\u2019information qui est n\u00e9cessaire. Et je dirais que c\u2019est ma mati\u00e8re premi\u00e8re. Mais j\u2019ai r\u00e9alis\u00e9 en le faisant que l\u2019aspect esth\u00e9tique et l\u2019aspect \u00e9motif y \u00e9taient pr\u00e9sents, en particulier parce que c\u2019est un travail sur la dur\u00e9e que je fais. Cela durait toute la nuit dans le cadre de la Nuit blanche. Il n\u2019y a aucun danseur \u00e0 part moi qui ai r\u00e9ussi \u00e0 performer toute la nuit. Ils \u00e9taient \u00e9puis\u00e9s \u00e0 r\u00e9p\u00e9ter les m\u00eames mouvements. Plusieurs m\u2019ont dit que c\u2019\u00e9tait l\u2019une des pi\u00e8ces les plus intimistes et les plus personnelles qu\u2019ils n\u2019ont jamais interpr\u00e9t\u00e9s, parce que c\u2019est leur ADN qu\u2019ils mettaient en mouvement. Dans un des mouvements on prenait certaines personnes du public dans nos bras. J\u2019ai vu ainsi des gens pleurer dans mes bras. Ces r\u00e9actions font partie des propri\u00e9t\u00e9s \u00e9mergentes de mon travail auquel je ne m\u2019attendais pas du tout.<\/p>\n\n\n\n

C. N. : Plus t\u00f4t, tu disais que le but de cette technique c\u2019est, entre autres, d\u2019\u00e9liminer le chor\u00e9graphe. Ces quatre mouvements viennent pourtant de quelque part\u2026\u00a0 Comment ont-ils \u00e9t\u00e9 choisis\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : C\u2019est une bonne question car c\u2019est vrai qu\u2019on ne peut pas tout \u00e9liminer. M\u00eame si le chor\u00e9graphe est en amont du processus, les mouvements pratiqu\u00e9s pouvaient \u00eatre cr\u00e9\u00e9s par moi, mais aussi par les interpr\u00e8tes. Puis ce qui \u00e9tait en output<\/em>, c\u2019est-\u00e0-dire tout ce qui est de la mise en sc\u00e8ne et de la musique, \u00e7a ne m\u2019int\u00e9ressait pas. Je donnais peu d\u2019instruction aux danseurs quant \u00e0 l\u2019interpr\u00e9tation. Je ne voulais pas avoir \u00e0 organiser subjectivement l\u2019ordre de ces mouvements. Et c\u2019est exclusivement selon ce principe que j\u2019ai jou\u00e9.<\/p>\n\n\n\n

C. N. : Mais quand m\u00eame choisir parmi tous les mouvements possibles ces quatre mouvements comme par exemple\u00a0le mouvement du c\u00e2lin,<\/em>\u00a0comme tu dis, c\u2019est quand m\u00eame faire un choix.<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Tout \u00e0 fait, je le con\u00e7ois mais cela fait partie de ce qui est \u00e0 l\u2019ext\u00e9rieur de mon mod\u00e8le et qui est en input<\/em>. Et en fait pourquoi j\u2019ai choisi le c\u00e2lin, c\u2019est tr\u00e8s simple. Je voulais des mouvements que des non-danseurs aussi pouvaient faire \u00e0 partir des lettres A T C G. Plusieurs \u00e9taient \u00e9tudiants en danse \u00e0 l\u2019UQAM, d\u2019autres des danseurs professionnels, mais il y avait aussi des amis et des membres de ma famille qui participaient sans \u00eatre des danseurs professionnels. Un des mouvements consistait \u00e0 courir. C\u2019\u00e9tait \u00ab C \u00bb pour courir<\/em>. \u00ab T \u00bb, consistait \u00e0 \u00ab tomber \u00bb, il fallait donc tomber au sol et se relever. Les danseurs le faisaient comme un bum-roll<\/em>, sur les fesses. Ils \u00e9taient donc chor\u00e9graphi\u00e9s minimalement \u00e0 la fa\u00e7on de la danse contemporaine. Un autre mouvement consistait \u00e0 se prosterner au sol, selon la lettre \u00ab A \u00bb, je l\u2019avais appel\u00e9 Bouddha. Puis enfin le \u00ab G \u00bb auquel j\u2019ai fait correspondre le Hug<\/em>, dans l\u2019id\u00e9e du c\u00e2lin. Ces choix \u00e9taient simplement dict\u00e9s par les lettres.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Ce n\u2019est pas li\u00e9 \u00e0 la fonction pr\u00e9suppos\u00e9e de certains g\u00e8nes qui nous permettraient d\u2019\u00eatre empathiques par exemple.\u00a0<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Non ce n\u2019est pas le g\u00e8ne de l\u2019empathie effectivement, ni ceux des neurones miroir. C\u2019\u00e9tait simplement des mouvements que n\u2019importe qui pouvait faire. Mais ce mouvement-ci, le Hug<\/em>, a effectivement une charge \u00e9motive et esth\u00e9tique car il ne procure pas le m\u00eame effet lorsqu\u2019on voit quelqu\u2019un courir, par exemple.<\/p>\n\n\n\n

C. N. : Comme tu le mentionnais ant\u00e9rieurement, tu as \u00e9t\u00e9 form\u00e9 dans les deux disciplines mais \u00e0 quel moment l\u2019int\u00e9r\u00eat pour la danse est apparu dans ton parcours\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : En fait, je suis spectateur de danse contemporaine depuis tr\u00e8s longtemps. Je me suis inscrit \u00e0 un cours de danse contemporaine mais je me suis rendu compte assez rapidement que ce qui m\u2019int\u00e9ressait le plus, c\u2019\u00e9tait le processus de cr\u00e9ation. J\u2019ai vu dans le travail des chor\u00e9graphes des similitudes avec la fa\u00e7on dont je construis des hypoth\u00e8ses dans mon labo. Je me suis donc inscrit au Doctorat en \u00e9tudes et pratiques des arts de l\u2019UQAM, avec Martine \u00c9poque, pour faire ce projet de chor\u00e9og\u00e9n\u00e9tique<\/em>. <\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Le passage des sciences pures \u00e0 la danse pour le grand public, \u00e7a ne doit pas poser trop de probl\u00e8mes. Un m\u00e9diateur explique ce que l\u2019on voit et le public est ravi. Mais quand on arrive aupr\u00e8s des sp\u00e9cialistes ou des coll\u00e8gues, \u00e7a ne doit \u00eatre pas toujours aussi facile\u00a0!<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : En effet, surtout si l\u2019objectif c\u2019est d\u2019\u00e9liminer le chor\u00e9graphe. <\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Est-ce que les scientifiques se m\u00e9fient parfois des artistes et vice-versa\u00a0? Est-ce que tu t\u2019es d\u00e9j\u00e0 confront\u00e9 \u00e0 cela\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F.J L. : Le milieu de la danse et les interpr\u00e8tes sont assez ouverts. J\u2019ai surtout exp\u00e9riment\u00e9 ce genre de frictions dans le cadre de mes cours de doctorat en \u00c9tudes et pratiques des arts surtout au moment de faire un choix d\u2019approche m\u00e9thodologique. Je n\u2019avais jamais entendu parler d\u2019approches m\u00e9thodologiques dans les sciences humaines, je devais choisir entre l\u2019herm\u00e9neutique, l\u2019heuristique, la psychanalyse, la ph\u00e9nom\u00e9nologie, etc. J\u2019ai demand\u00e9 si je pouvais tester une hypoth\u00e8se ? On m\u2019a trait\u00e9 de positiviste qui voulait faire la science du XIXe<\/sup>si\u00e8cle. Mes exp\u00e9rimentations avaient pour but de tester l\u2019hypoth\u00e8se que l\u2019on peut \u00e9liminer le chor\u00e9graphe.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Quelle a \u00e9t\u00e9 la r\u00e9ception dans le milieu scientifique?\u00a0<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Mes coll\u00e8gues sont enchant\u00e9s par ces projets, parce que \u00e7a les sort un peu de leur carcan et de leur moule. \u00c9trangement on pense que le milieu scientifique est ferm\u00e9 sur lui-m\u00eame, dans sa tour d\u2019ivoire. J\u2019ai trouv\u00e9 qu\u2019il y a des gens ouverts d\u2019esprit des deux c\u00f4t\u00e9s, puis des gens ferm\u00e9s des deux c\u00f4t\u00e9s. Je ne pense pas qu\u2019on puisse cat\u00e9goriser les artistes ou les scientifiques de part et d\u2019autre comme \u00e9tant plus ou moins ouverts ou plus ou moins ferm\u00e9s. En fait, j\u2019ai m\u00eame trouv\u00e9 que la recherche qu\u2019on me demandait de faire dans mon processus de recherche-cr\u00e9ation \u00e9tait assez rigide alors que moi je pensais na\u00efvement qu\u2019en art on pouvait faire ce qu\u2019on voulait. <\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Mais peut-\u00eatre moins qu\u2019en science pure.<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Selon mon exp\u00e9rience personnelle, je constate que j\u2019ai eu plus de difficult\u00e9s \u00e0 convaincre les coll\u00e8gues en art que de convaincre mes coll\u00e8gues scientifiques avec mes projets en art. Peut-\u00eatre parce qu\u2019ils pensent que l\u2019art n\u2019est pas mena\u00e7ant pour eux \u2026<\/p>\n\n\n\n

C. N. : Alors que la science pourrait \u00eatre mena\u00e7ante pour l\u2019art, si on inverse les r\u00f4les\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Je pense que d\u2019un c\u00f4t\u00e9 comme de l\u2019autre, il y a des a priori, il y a des m\u00e9connaissances, il y a des complexes. On a tendance \u00e0 penser que les scientifiques ont un sentiment de sup\u00e9riorit\u00e9. Est-ce que les artistes ont un complexe d\u2019inf\u00e9riorit\u00e9 ? On pense souvent que les scientifiques ont r\u00e9ponse \u00e0 tout et connaissent tout. Or je ne connaissais pas Deleuze, Merleau-Ponty, Foucault, etc. <\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Est-ce que la rencontre avec les textes de ces auteurs a apport\u00e9 quelque chose \u00e0 ta recherche scientifique\u00a0? Est-ce que \u00e7a a modifi\u00e9 des choses\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Le retour du balancier est venu plus tard, dans la recherche que je fais actuellement.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Peux-tu nous en parler\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Pour faire de la chor\u00e9og\u00e9n\u00e9tique, j\u2019ai emprunt\u00e9 des mod\u00e8les \u00e0 la g\u00e9n\u00e9tique, maintenant je proc\u00e8de \u00e0 l\u2019inverse. Apr\u00e8s avoir travaill\u00e9 sur mon propre g\u00e9nome, j\u2019ai commenc\u00e9 \u00e0 m\u2019int\u00e9resser \u00e0 la question du microbiome humain qui est l\u2019ensemble des microorganismes qui vivent sur nous et \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur de nous. J\u2019ai ainsi propos\u00e9 un projet de recherche-cr\u00e9ation qui avait pour but de voir le lien entre la notion d\u2019identit\u00e9 et ce fameux microbiome. Les \u00e9tudes nous disent que 90% de nos cellules ne sont pas des cellules humaines mais des cellules bact\u00e9riennes.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Si on les enlevait, que resterait-il de nous\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Si on les enlevait, on mourrait.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Il ne resterait pas beaucoup de mati\u00e8re purement humaine, disons 10% de notre corps moins l\u2019eau?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Effectivement mais au niveau g\u00e9n\u00e9tique, on pense que 99% des g\u00e8nes qui nous composent, et qui font que l\u2019on est capable de fonctionner, sont des g\u00e8nes qui ne sont pas des g\u00e8nes humains. Ainsi dans mon projet, j\u2019essaye de voir comment on peut cr\u00e9er de nouveaux types d\u2019autoportraits. Il y a eu des autoportraits en bioart  o\u00f9 les artistes utilisaient leur ADN. Mais avec le microbiome <\/em>humain, je peux aller plus loin. Dans le laboratoire avec mes \u00e9tudiants, je travaille sur plusieurs projets et nous faisons des recherches purement scientifiques. Ce sont les questions identitaires et la question de l\u2019autoportrait en art qui ont aliment\u00e9 ma recherche. J\u2019ai ainsi travaill\u00e9 avec un coll\u00e8gue au sein de la Chaire en microbiologie \u00e0 c\u00f4t\u00e9 de mon laboratoire, qui poss\u00e8de un s\u00e9quenceur de nouvelle g\u00e9n\u00e9ration. Je me suis dit que je pouvais l\u2019utiliser aussi \u00e0 des fins scientifiques. C\u2019est un retour de balancier int\u00e9ressant. <\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : \u00c0 quel point toutes ces cr\u00e9atures qui nous habitent ou qui vivent en nous ont un ADN diff\u00e9rent\u00a0du \u00ab\u00a0n\u00f4tre\u00a0\u00bb?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F. J. L. : Le d\u00e9fi c\u2019est que chacune de ces cr\u00e9atures a un ADN diff\u00e9rent, c\u2019est ce qu\u2019on appelle la m\u00e9tag\u00e9nomique<\/em>. La g\u00e9nomique c\u2019est le fait d\u2019assembler le g\u00e9nome d\u2019une esp\u00e8ce (ce qui a pris vingt ans \u00e0 faire), la m\u00e9tag\u00e9nomique<\/em> ou la g\u00e9nomique environnementale c\u2019est d\u2019\u00e9chantillonner notre environnement. Donc, par exemple je pourrais \u00e9chantillonner ce qu\u2019on a sur la table ici, ou bien ce qu\u2019il y a dans l\u2019eau que je suis en train de boire ou une poign\u00e9e de sable que je ramasse \u00e0 la plage et s\u00e9quencer tout ce qu\u2019on y trouve dedans comme les centaines d\u2019esp\u00e8ces bact\u00e9riennes, virales, etc. Le probl\u00e8me c\u2019est qu\u2019on va se retrouver avec beaucoup de petits fragments d\u2019ADN sans savoir lequel appartient \u00e0 l\u2019esp\u00e8ce x, \u00e0 l\u2019esp\u00e8ce y ou \u00e0 l\u2019esp\u00e8ce z. Et l\u00e0 se cr\u00e9ent des probl\u00e8mes bio-informatiques presque insolubles qui rendent l\u2019exercice complexe. Beaucoup plus complexe que la reconstruction d\u2019un g\u00e9nome. Mais cela nous permet d\u2019avoir acc\u00e8s \u00e0 cette diversit\u00e9 bact\u00e9rienne. <\/p>\n\n\n\n

C. N. : La\u00a0m\u00e9tag\u00e9nomique<\/em>\u00a0c\u2019est donc essayer de reconstruire le \u00ab\u00a0casse-t\u00eate \u00bb entre les petits fragments d\u2019ADN \u00e9parpill\u00e9s dans notre environnement\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F J. L. : Exactement. C\u2019est ainsi qu\u2019on le repr\u00e9sente. C\u2019est un casse-t\u00eate dont on a les morceaux mais pas l\u2019image de laquelle il est issu.<\/p>\n\n\n\n

A. E. L. : Parce que dans l\u2019univers du\u00a0microbiome<\/em>\u00a0il y a encore beaucoup d\u2019inconnus\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F J. L. : La tr\u00e8s grande majorit\u00e9 d\u2019entre eux sont des organismes qui sont pas connus de la science. C\u2019est un des d\u00e9bats d\u2019ailleurs, c\u2019est que la m\u00e9tag\u00e9nomique vient du fait que quand on isole une bact\u00e9rie dans un environnement ou dans un milieu et qu\u2019on essaie d\u2019en faire la culture en laboratoire il y a \u00e0 peine 10% des bact\u00e9ries qui sont capables de cro\u00eetre en colonie. Car le milieu n\u2019est pas ad\u00e9quat. Parce qu\u2019ils ont besoin d\u2019autres organismes avec qui ils collaborent et qui ne sont pas l\u00e0, etc. Ce que la m\u00e9tag\u00e9nomique<\/em> a permis de faire c\u2019est de rendre compte que si on peut faire cro\u00eetre en colonie les bact\u00e9ries puis qu\u2019on s\u00e9quence directement leur ADN, qu\u2019on aura alors acc\u00e8s \u00e0 tout ce qui est disponible et d\u2019en reconna\u00eetre quelques-unes, mais il y a encore une sorte de boite noire d\u2019une grande diversit\u00e9 qui est inconnue.<\/p>\n\n\n\n

C. N. : Quand est-il des\u00a0\u00e9goportraits<\/em>\u00a0que tu fais, ces fameux\u00a0selfies m\u00e9tag\u00e9nomiques<\/em>. O\u00f9 est-ce que cela se situe dans ta pratique ? Qu\u2019est-ce que \u00e7a apporte\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F J. L. : J\u2019aime inventer des nouveaux termes comme la chor\u00e9og\u00e9n\u00e9tique<\/em>, des microbiomes selfies<\/em> ou des \u00e9goportraits m\u00e9tag\u00e9nomiques<\/em>. Je pars de l\u2019hypoth\u00e8se que notre g\u00e9nome est fixe et qu\u2019on ne peut pas l\u2019alt\u00e9rer sauf si on le soumet \u00e0 des radiations nucl\u00e9aires ou ultra-violettes tr\u00e8s intenses. Le g\u00e9nome reste le m\u00eame de la naissance \u00e0 la mort. Le microbiome<\/em>, lui, est dynamique. Il change en fonction des comportements, de la nourriture ing\u00e9r\u00e9e, des pays visit\u00e9s et des rencontres. En sortant d\u2019ici je n\u2019aurai pas le m\u00eame microbiome <\/em>que j\u2019avais en rentant. Il y a d\u2019ailleurs une \u00e9tude qui vient de para\u00eetre qui montre qu\u2019on a une esp\u00e8ce de halo, soit une aura de microbiomes<\/em> qui nous suivent partout o\u00f9 on va. <\/p>\n\n\n\n

L\u2019\u00e9tude consiste \u00e0 regarder une chambre qui \u00e9tait st\u00e9rile avant que quelqu\u2019un y entre et apr\u00e8s qu\u2019il soit parti. Ce que l\u2019on r\u00e9colte dans l\u2019environnement, ce sont des microbiomes<\/em> que les gens ont laiss\u00e9s, comme un peu une seconde peau qui mue. Comme la mue que les serpents laissent derri\u00e8re eux. Mais ce microbiome<\/em> peut \u00eatre transform\u00e9. Mes performances que j\u2019appelle \u00abperformances-exp\u00e9riences<\/em>\u00bb ont justement pour but de transformer mon microbiome<\/em>. Donc par exemple, un de mes projets est de serrer la main \u00e0 un plus grand nombre de gens possibles dans diff\u00e9rentes villes du monde entier et de s\u00e9quencer le microbiome<\/em> cutan\u00e9 que j\u2019ai dans le creux de ma paume, \u00e0 intervalles r\u00e9guliers, pour voir si au d\u00e9but de l\u2019exp\u00e9rience et \u00e0 la fin de celle-ci le microbiome<\/em> de ma paume de main droite demeure le m\u00eame si je suis \u00e0 Montr\u00e9al, \u00e0 Copenhague, \u00e0 San Francisco, \u00e0 Perth, qui sont les villes o\u00f9 je l\u2019ai fait jusqu\u2019\u00e0 maintenant.<\/p>\n\n\n\n

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C. N. : Comment \u00e7a se visualise artistiquement, ces exp\u00e9riences l\u00e0\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F J. L. : Il y a deux aspects : l\u2019aspect performance que j\u2019appelle le One Thousand Handshake <\/em>(les mille poign\u00e9es de mains). \u00c0 La Nuit Blanche de Montr\u00e9al<\/em>, je l\u2019ai fait en trois heures, mais \u00e0 d\u2019autres endroits, \u00e7a m\u2019a pris sept heures \u00e0 atteindre mille personnes \u00e0 qui je peux serrer la main. La partie performance constitue l\u2019\u0153uvre d\u2019art. Dans cette performance, qui est un travail de m\u00e9diation, je compte chaque poign\u00e9e de main avec un petit clicker<\/em>, un compteur et je dis par exemple : \u00ab Vous \u00eates le num\u00e9ro 623 \u00bb. Je leur donne du Purell (lotion antibact\u00e9rienne), et je me permets de leur dire : \u00ab Vous \u00eates en train de tuer votre microbiome<\/em> avec du Purell \u00bb. Il y a une interaction qui se fait avec le public comme dans l\u2019esth\u00e9tique relationnelle. \u00c0 chaque 50 poign\u00e9es de main, je les \u00e9chantillonne. C\u2019est \u00e0 partir de ces \u00e9chantillons que je g\u00e9n\u00e8re mes \u00e9goportraits<\/em> pour cela je retourne au laboratoire et j\u2019en extrais l\u2019ADN. Je fais le s\u00e9quen\u00e7age de toutes les communaut\u00e9s bact\u00e9riennes qui se trouvent sur chacun de ces fragments d\u2019\u00e9chantillonnage que je repr\u00e9sente sous forme de r\u00e9seau. Les \u0153uvres ainsi g\u00e9n\u00e9r\u00e9es, je les appelle des micro-Facebook<\/em>. Soit le Facebook des microbes<\/em>. Je peux ainsi comparer les s\u00e9quences d\u2019ADN que j\u2019ai identifi\u00e9es sur les centaines d\u2019esp\u00e8ces, que j\u2019ai r\u00e9colt\u00e9es dans mes mains lors de mes exp\u00e9riences, les unes aux autres. Plus elles sont proches, plus elles sont connect\u00e9es dans ces r\u00e9seaux qui ressemblent \u00e0 un r\u00e9seau social. Je produis des r\u00e9seaux multicolores gigantesques repr\u00e9sentant diff\u00e9rentes parties de mon corps, ou diff\u00e9rentes esp\u00e8ces bact\u00e9riennes, ou diff\u00e9rents temps dans l\u2019\u00e9chantillonnage.<\/p>\n\n\n\n

Pour le moment c\u2019est de cette mani\u00e8re que les \u0153uvres se pr\u00e9sentent. Je ne suis pas un artiste visuel. J\u2019essaie d\u2019animer le tout, pour faire quelque chose un peu plus dynamique entre performance et visualisation. <\/p>\n\n\n\n

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A. E. L. : Fran\u00e7ois-Joseph Lapointe, peux-tu nous parler du concept de paradisciplinarit\u00e9 que tu d\u00e9veloppes\u00a0?\u00a0<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F J. L. : C\u2019est un concept que j\u2019ai d\u00e9velopp\u00e9 dans le cadre de ma th\u00e8se sur les obstacles \u00e0 l\u2019interdisciplinarit\u00e9 en sciences. En fait je n\u2019y crois pas. Je ne crois pas non plus \u00e0 la pluri, multi,<\/em> transdisciplinarit\u00e9 ainsi que toutes les diff\u00e9rentes d\u00e9clinaisons. Peut-\u00eatre qu\u2019il y a certains exemples de success-story<\/em> qui existent mais la plupart du temps \u00e7a ne fonctionne pas. Les objectifs, les discours et les m\u00e9thodes de recherche ne sont pas les m\u00eames et c\u2019est pour cette raison qu\u2019apr\u00e8s avoir \u00e9t\u00e9 form\u00e9 entre les deux disciplines, j\u2019ai d\u00e9velopp\u00e9 le concept de paradisciplinarit\u00e9 o\u00f9 la science et l\u2019art sont pratiqu\u00e9s en parall\u00e8le et de fa\u00e7on simultan\u00e9e et synchrone par un seul individu accordant la m\u00eame importance aux deux. Son r\u00f4le \u00e9tant celui d\u2019un individu biculturel, capable de faire la traduction entre la culture scientifique et la culture artistique. <\/p>\n\n\n\n

C. N.\u00a0:\u00a0En 2014 tu as publi\u00e9 dans Leonardo,\u00a0Hybrids\u00a0Are Hubs:\u00a0Transdisciplinarity,\u00a0the Two Cultures and the Special Status\u00a0of\u00a0Artscientists<\/em>.\u00a0Est-ce que cette revue s\u2019int\u00e9resse \u00e0 ce genre de question\u00a0?\u00a0<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F J. L. : Oui, c\u2019est int\u00e9ressant qu\u2019on revienne l\u00e0-dessus, parce que je parlais des \u00e9goportraits<\/em> m\u00e9tag\u00e9nomiques<\/em>qui constituent un r\u00e9seau. Cet article recensait tous les articles qui avaient \u00e9t\u00e9 soumis au SEAD Network<\/em>, ils venaient de partout dans le monde (SEAD veut dire Science Engineering Art and Design). J\u2019ai analys\u00e9 tous les textes. Dans certains cas il y avait deux, trois, quatre, cinq auteurs par texte. Certains \u00e9taient des artistes, d\u2019autres \u00e9taient en sciences humaines ou en design. Certains articles \u00e9taient r\u00e9dig\u00e9s par un seul auteur ayant une formation hybride. J\u2019ai ainsi r\u00e9alis\u00e9 que les artistes utilisent un contenu lexical ainsi qu\u2019un corpus de r\u00e9f\u00e9rences que les gens en sciences humaines, en g\u00e9nie ou en science utilisent aussi. Mais les articles qui avaient \u00e9t\u00e9 r\u00e9dig\u00e9s par les artistes \u2013 en collaboration avec des gens qui viennent des deux domaines, et\/ou ceux qui avaient \u00e9t\u00e9 r\u00e9dig\u00e9s par un seul auteur form\u00e9 aux deux domaines, se trouvaient \u00eatre des points d\u2019articulation dans le r\u00e9seau. Ils utilisaient un contenu lexical qui \u00e9tait plus riche, qui faisait \u00e0 la fois r\u00e9f\u00e9rence \u00e0 ce que les artistes et les gens en sciences humaines utilisent et comprennent, de m\u00eame que les scientifiques et les ing\u00e9nieurs. Ces individus servent effectivement de pont, de points d\u2019articulation entre ces deux cultures.<\/p>\n\n\n\n

C. N. : Ce sont donc eux les fameux traducteurs paradisciplinaires.<\/strong><\/p>\n\n\n\n

F J. L. : Ce sont effectivement ces individus que j\u2019appelle aussi des intercesseurs entre les deux cultures. Leur apport est essentiel.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

Andr\u00e9 \u00c9ric L\u00e9tourneau: Fran\u00e7ois-Joseph tu es un artiste interdisciplinaire qui s\u2019int\u00e9resse \u00e0 la danse mais ta formation est en en biologie. Tu as d\u2019ailleurs fait une th\u00e8se de doctorat sur la danse et l\u2019ADN n\u2019est-ce pas ? Fran\u00e7ois-Joseph Lapointe: En effet, j\u2019ai fait mon doctorat avec\u00a0Martine \u00c9poque. A. E. L.\u00a0:\u00a0Peux-tu nous parler de ce travail … Continued<\/a><\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":0,"comment_status":"open","ping_status":"open","sticky":false,"template":"","format":"standard","meta":{"footnotes":""},"categories":[10],"tags":[63],"acf":[],"_links":{"self":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/863"}],"collection":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts"}],"about":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/types\/post"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/users\/1"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/comments?post=863"}],"version-history":[{"count":2,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/863\/revisions"}],"predecessor-version":[{"id":872,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/863\/revisions\/872"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/media?parent=863"}],"wp:term":[{"taxonomy":"category","embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/categories?post=863"},{"taxonomy":"post_tag","embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/tags?post=863"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}