{"id":928,"date":"2017-09-01T19:33:05","date_gmt":"2017-09-01T19:33:05","guid":{"rendered":"https:\/\/archee.uqam.ca\/?p=928"},"modified":"2022-11-04T22:03:32","modified_gmt":"2022-11-04T22:03:32","slug":"septembre-2017-entrevue-avec-gisele-trudel","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/archee.uqam.ca\/septembre-2017-entrevue-avec-gisele-trudel\/","title":{"rendered":"Septembre 2017 &#8211; Entrevue avec Gis\u00e8le Trudel"},"content":{"rendered":"\n<figure class=\"wp-block-image aligncenter size-full\"><img loading=\"lazy\" decoding=\"async\" width=\"864\" height=\"576\" src=\"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-content\/uploads\/2022\/11\/trudel-1.jpeg\" alt=\"\" class=\"wp-image-929\" srcset=\"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-content\/uploads\/2022\/11\/trudel-1.jpeg 864w, https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-content\/uploads\/2022\/11\/trudel-1-300x200.jpeg 300w, https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-content\/uploads\/2022\/11\/trudel-1-768x512.jpeg 768w\" sizes=\"(max-width: 864px) 100vw, 864px\" \/><figcaption class=\"wp-element-caption\"><em>Maison fontaine, 2015<\/em><\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n<p>La recherche de\u00a0Gis\u00e8le Trudel\u00a0donne naissance \u00e0 des \u0153uvres qui, se d\u00e9ployant dans des environnements souvent complexes ou dans l\u2019espace public, d\u00e9placent les horizons d\u2019attente des spectateurs, tant de par leurs dimensions esth\u00e9tiques que par leurs formes novatrices en tant qu\u2019\u0153uvre d\u2019art.\u00a0Gis\u00e8le Trudel\u00a0travaille souvent en collaboration avec d\u2019autres artistes ou des chercheurs issus du milieu scientifique. Parmi ses principales collaborations, mentionnons\u00a0<em>\u00c6lab<\/em>, une cellule de recherche artistique qu\u2019elle a cofond\u00e9e avec St\u00e9phane Claude et le\u00a0<em>Grupmuv<\/em>\u00a0consacr\u00e9 aux pratiques du dessin et de l\u2019image en mouvement qu\u2019elle a cofond\u00e9 avec\u00a0Michel Boulanger\u00a0et\u00a0Thomas Corriveau, chercheurs d\u2019Hexagram.<\/p>\n\n\n\n<p>Le corpus de travail de Trudel pr\u00e9sente un grand nombre de projets qui int\u00e8grent des techniques tr\u00e8s vari\u00e9es et des pratiques \u00ab&nbsp;in socius&nbsp;\u00bb qui semblent se d\u00e9ployer \u00e0 travers diff\u00e9rents dispositifs techniques. S\u2019y rencontre simultan\u00e9ment la dimension sociale de l\u2019art, l\u2019\u00abin situ\u00bb et l\u2019usage singulier de diff\u00e9rentes technologies.<\/p>\n\n\n\n<p>St\u00e9phane Claude\u00a0et Gis\u00e8le Trudel ont fond\u00e9\u00a0<em>\u00c6lab<\/em>, il y a vingt ans. Au d\u00e9but de leurs activit\u00e9s en 1996, ces artistes visaient \u00e0 cr\u00e9er une approche combinant un travail documentaire \u00e0 une pratique exp\u00e9rimentale de l\u2019art m\u00e9diatique. Les projets d\u2019<em>\u00c6lab<\/em>\u00a0\u00e9mergent des conditions et du contexte dans lesquels se trouvent\u00a0 les artistes et \u00ab\u00a0sur le terrain \u00e0 travers les rencontres\u00a0\u00bb. \u00c0 travers l\u2019ensemble des projets entrepris par\u00a0<em>\u00c6lab<\/em>\u00a0au cours des vingt derni\u00e8res ann\u00e9es, on distingue ais\u00e9ment les fils conducteurs qui les lient les uns aux autres. Parmi les diff\u00e9rentes d\u00e9clinaisons, l\u2019une des pr\u00e9occupations permanentes d\u2019<em>\u00c6lab<\/em>\u00a0consiste \u00e0 explorer les nouvelles sensations que peut produire les diff\u00e9rentes technologies comprises dans le concept plus large de \u00ab\u00a0nature\u00a0\u00bb.\u00a0<\/p>\n\n\n\n<p>Le corpus r\u00e9cent d\u2019<em>\u00c6lab<\/em>\u00a0sur le th\u00e8me des \u00ab\u00a0 mati\u00e8res r\u00e9siduelles \u00bb<strong>\u00a0<\/strong>prend une place importante depuis la derni\u00e8re d\u00e9cennie. En pr\u00e9ambule \u00e0 l\u2019entretien qui est pr\u00e9sent\u00e9 ici, Gis\u00e8le Trudel \u00e9voque l\u2019origine de cet axe de recherche\u00a0: \u00ab\u00a0C\u2019est toujours fascinant d\u2019essayer de retracer les sources d\u2019un projet. Nous avons fait une r\u00e9sidence en nanochimie \u00e0 l\u2019Universit\u00e9 McGill\u00a0pendant une p\u00e9riode de huit mois en 2003. Nous travaillions avec des scientifiques pour visualiser diff\u00e9rentes mati\u00e8res sous les microscopes du laboratoire. Ce labo a une approche \u00e9co\u00e9nerg\u00e9tique. Nous avions entrepris cette r\u00e9sidence parce que nous voulions comprendre ce qui \u00e9tait en train de se produire avec cette \u00ab\u00a0nouvelle imagerie\u00a0\u00bb qui commen\u00e7ait alors \u00e0 exister, ces nouvelles mati\u00e8res visuelles qui sont g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par les scientifiques et visualis\u00e9es avec le num\u00e9rique. En observant les diff\u00e9rentes mat\u00e9rialit\u00e9s sous le microscope, nous nous trouvions soudain en contact avec une \u00e9nergie vibratile\u00a0: celle de la mati\u00e8re vue avec les technologies. \u00bb Cet int\u00e9r\u00eat pour la vibration mat\u00e9rielle conduira\u00a0<em>\u00c6lab\u00a0<\/em>\u00e0 s\u2019int\u00e9resser aux structures observ\u00e9es \u00e0 l\u2019\u00e9chelle nanom\u00e9trique, dont le\u00a0<em>buckerminsterfuller\u00e8ne\u00a0<\/em>. C\u2019est ainsi qu\u2019avec les recherches de Richard\u00a0Buckminster Fuller, Trudel et Claude d\u00e9couvrirent les travaux de\u00a0John Todd, un biologiste ayant d\u00e9velopp\u00e9 un syst\u00e8me de traitement enti\u00e8rement \u00e9cologique des eaux us\u00e9es. Reposant sur le principe que les d\u00e9chets qui sont dans l\u2019eau deviennent la plupart du temps une nourriture pour un autre organisme vivant, Trudel souligne \u00ab Dans son syst\u00e8me qui s\u2019appelle les\u00a0<em>EcoMachines<\/em>, la notion de d\u00e9chet n\u2019existe pas. C\u2019est toujours un r\u00e9sidu qui pourrait servir \u00e0 un autre organisme, servir un autre processus. Nous avons visit\u00e9 ses installations publiques et l\u2019avons interview\u00e9. Et c\u2019est \u00e0 partir de ce moment-l\u00e0 que nous avons commenc\u00e9 \u00e0 r\u00e9aliser des \u0153uvres avec des mati\u00e8res r\u00e9siduelles. \u00bb<\/p>\n\n\n\n<p><strong>Andr\u00e9 \u00c9ric L\u00e9tourneau\u00a0:\u00a0Dans le travail d\u2019<em>\u00c6lab,<\/em>\u00a0intitul\u00e9\u00a0<em>Futur au pr\u00e9sent\u00a0<\/em>(2012), nous retrouvons aussi ce rapport \u00e0 la notion de d\u00e9chet. Cette \u0153uvre permet l\u2019int\u00e9gration de l\u2019image d\u2019une s\u00e9rie de d\u00e9chets \u00e0 une s\u00e9rie de fen\u00eatres du Centre de commerce mondial au centre-ville de Montr\u00e9al. La composition visuelle propose une accumulation de fragments de plastique qui ne sont pas biod\u00e9gradables.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>Gis\u00e8le Trudel&nbsp;:<strong>&nbsp;<\/strong>Il existe toutes sortes d\u2019attitudes en rapport aux d\u00e9chets. Nous pourrions m\u00eame poser la question suivante&nbsp;: \u00ab&nbsp; est-ce&nbsp;<em>\u00e9coviable<\/em>&nbsp;d\u2019utiliser certains types de technologies pour traiter du d\u00e9chet mat\u00e9riel&nbsp;\u00bb&nbsp;? J\u2019essaie de ne pas entretenir d\u2019<em>a priori<\/em>&nbsp;\u00e0 ce sujet. J\u2019essaie d\u2019abord de comprendre la situation dans laquelle je me trouve et de voir comment je peux travailler avec les caract\u00e9ristiques qu\u2019elle pr\u00e9sente, sans pr\u00e9jug\u00e9, sans, par exemple, dire \u00ab&nbsp; je ne peux pas utiliser \u00e7a&nbsp;&nbsp;\u00bb, \u00abje ne peux pas faire \u00e7a\u00bb , \u00ab\u00e7a c\u2019est pas permis\u00bb. Si on fait cela, on est en train de limiter le potentiel de la recherche, sans s\u2019ouvrir \u00e0 qui se produit au moment m\u00eame de la recherche.<\/p>\n\n\n\n<p><em>Futur au pr\u00e9sent\u00a0(2012)\u00a0<\/em>fait partie d\u2019une s\u00e9rie de plusieurs projets d\u2019int\u00e9gration de la lumi\u00e8re dans l\u2019architecture. L\u2019image avait \u00e9t\u00e9 cr\u00e9\u00e9e comme une composition visuelle r\u00e9alis\u00e9e \u00e0 partir de photographies prises sur le site d\u2019enfouissement de d\u00e9chets \u00e0 Lachenaie au Qu\u00e9bec, o\u00f9 se pratique \u00e9galement le recyclage. La station de M\u00e9tro Square-Victoria\/OACI au centre-ville de Montr\u00e9al a une sortie \u00e0 forte affluence o\u00f9 il y a de tr\u00e8s grandes fen\u00eatres. L\u2019int\u00e9gration de la pellicule \u00e0 cet endroit illustrait une esp\u00e8ce de compression de la mati\u00e8re dans l\u2019architecture tout en produisant l\u2019effet d\u2019un vitrail qui faisait passer la lumi\u00e8re dans ce lieu. Par sa beaut\u00e9, le r\u00e9sultat avait un impact instantan\u00e9 aupr\u00e8s du public. Comme c\u2019\u00e9tait une exp\u00e9rience compl\u00e8tement diff\u00e9rente de voir ce travail le jour ou la nuit,\u00a0les passants comprenaient rapidement ce ph\u00e9nom\u00e8ne, activ\u00e9 par le soleil et par les lampes de l\u2019int\u00e9rieur. J\u2019ai tent\u00e9 de ne pas g\u00e9n\u00e9rer une attitude moraliste autour de la notion de d\u00e9chet.\u00a0<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Tu travailles beaucoup avec la lumi\u00e8re. La lumi\u00e8re revient dans plusieurs de tes travaux. D\u2019une part, dans les travaux qui int\u00e8grent la vid\u00e9o, ce qui repr\u00e9sente une grande partie de tes \u0153uvres. D\u2019autre part dans d\u2019autres projets qui int\u00e8grent la lumi\u00e8re en tant que telle, par exemple\u00a0<em>Between light &amp; night\u00a0<\/em>(2012) ou<em>Interfacing<\/em>\u00a0(2010). Peux-tu nous parler de ces travaux r\u00e9alis\u00e9s avec la lumi\u00e8re comme mat\u00e9riau principal\u00a0? Car ils me semblent un peu diff\u00e9rents des autres. Plus minimalistes peut-\u00eatre.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<figure class=\"wp-block-embed aligncenter is-type-video is-provider-vimeo wp-block-embed-vimeo wp-embed-aspect-4-3 wp-has-aspect-ratio\"><div class=\"wp-block-embed__wrapper\">\n<iframe loading=\"lazy\" title=\"AElab L&#039;espace du milieu 2011 (1m30s)\" src=\"https:\/\/player.vimeo.com\/video\/112666954?h=f63411d16c&amp;dnt=1&amp;app_id=122963\" width=\"500\" height=\"375\" frameborder=\"0\" allow=\"autoplay; fullscreen; picture-in-picture\" allowfullscreen><\/iframe>\n<\/div><figcaption class=\"wp-element-caption\"><em>L\u2019espace du milieu<\/em><\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n<p>G. T. :\u00a0Les grands projets s\u2019\u00e9talent sur plusieurs ann\u00e9es et nous avons parfois besoin d\u2019avoir des \u00ab\u00a0petits bonbons\u00a0\u00bb car les projets de longue haleine requi\u00e8rent une concentration diff\u00e9rente. Ces projets que tu mentionnes font suite \u00e0 des invitations \u00e0 faire des exp\u00e9riences dans la rue, d\u2019une mani\u00e8re vraiment tr\u00e8s furtive \u2013 o\u00f9, par exemple, nous ne nous identifions pas comme artistes. Ces deux installations \u00e9taient pr\u00e9sent\u00e9es dans des vitrines, adapt\u00e9es aux param\u00e8tres du public imm\u00e9diat, soit, les gens qui vivent dans ces quartiers. J\u2019adore cet aspect. Nous avons beaucoup travaill\u00e9 avec les fen\u00eatres en architecture. Par exemple,\u00a0<em>L\u2019espace du milieu\u00a0<\/em>(2011) \u00e0 la\u00a0Fonderie Darling\u00a0et\u00a0<em>Milieux associ\u00e9s\u00a0<\/em>(2014) au\u00a0Centre Phi\u00a0impliquaient chacun une projection sur les vitres. Une lueur \u00e9mane de l\u2019int\u00e9rieur vers l\u2019ext\u00e9rieur, venant moduler le lieu dans lequel les gens vivent ou travaillent.\u00a0 L\u2019une des \u0153uvres que tu mentionnes,\u00a0<em>Interfacing,\u00a0<\/em>faisait suite\u00e0 une invitation d\u2019Andrew Forster, artiste et commissaire de\u00a0<em>L\u2019endroit indiqu\u00e9<\/em>, une vitrine dans la maison des architectes\u00a0Big City. J\u2019avais alors utilis\u00e9 des DEL, des \u00e9clairages de marque Palco qui \u00e9taient int\u00e9gr\u00e9s \u00e9galement dans d\u2019autres projets, mais dans ce cas, je voulais exp\u00e9rimenter une transformation de la couleur sur une p\u00e9riode tr\u00e8s longue\u00a0: partir du rouge pour aller vers le bleu, sur une p\u00e9riode de sept heures. Puis, j\u2019ai fait diff\u00e9rentes variations de couleurs au fil du temps, car ce dispositif est rest\u00e9 \u00e0 cet endroit presque trois mois, durant l\u2019\u00e9t\u00e9 2010. J\u2019allais le regarder dans la rue. Et j\u2019\u00e9coutais ce que les gens disaient en passant par l\u00e0. Parce que c\u2019\u00e9tait vraiment au niveau de la rue et\u00a0\u00a0je pouvais \u00e9couter les commentaires de mani\u00e8re clandestine. Un autre projet du m\u00eame type intitul\u00e9\u00a0<em>Between light and night<\/em>\u00a0(2012) a \u00e9t\u00e9 r\u00e9alis\u00e9 chez\u00a0Stephen Schofield\u00a0et\u00a0Michel Daigneault, sur la rue Rachel, tout pr\u00e8s de De Lorimier. Ils offrent aussi leur vitrine \u00e0 des projets artistiques. L\u2019enclos de la vitrine est tr\u00e8s profond. J\u2019ai plac\u00e9 les lumi\u00e8res Palco derri\u00e8re un grand morceau de plastique noir qui venait diviser la vitrine en plusieurs plans. Comme ce projet se d\u00e9roulait l\u2019hiver, les gens dans la rue se d\u00e9p\u00eachaient pour rentrer \u00e0 la maison.\u00a0\u00a0J\u2019ai alors travaill\u00e9 la transformation de la lumi\u00e8re sur une dur\u00e9e plus courte. Les s\u00e9quences duraient \u00e0 peu pr\u00e8s trois minutes mais modulaient sans arr\u00eat, une variation de couleurs et d\u2019intensit\u00e9. Gr\u00e2ce \u00e0 ce s\u00e9parateur noir \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur de la vitrine, la r\u00e9flexion du lieu environnant \u00e9tait plus visible, le \u00ab\u00a0dehors\u00a0\u00bb \u00e9tait r\u00e9fl\u00e9chi dans la vitrine. Ce sont des activit\u00e9s de ma recherche\u00a0: travailler le mat\u00e9riau, travailler avec les situations dans lesquelles les choses se produisent. Et proposer des situations qui vont rehausser, changer ou apporter une petite diff\u00e9rence dans l\u2019exp\u00e9rience qu\u2019\u00e9prouvent les gens d\u2019un endroit particulier.\u00a0<\/p>\n\n\n\n<figure class=\"wp-block-embed aligncenter is-type-video is-provider-vimeo wp-block-embed-vimeo wp-embed-aspect-16-9 wp-has-aspect-ratio\"><div class=\"wp-block-embed__wrapper\">\n<iframe loading=\"lazy\" title=\"AElab Milieux associ&amp;eacute;s 2014 (5m30s)\" src=\"https:\/\/player.vimeo.com\/video\/112662281?h=f0637e020d&amp;dnt=1&amp;app_id=122963\" width=\"500\" height=\"281\" frameborder=\"0\" allow=\"autoplay; fullscreen; picture-in-picture\" allowfullscreen><\/iframe>\n<\/div><figcaption class=\"wp-element-caption\"><em>\u00c6lab, Milieux associ\u00e9s, 3-23 mai 2014<\/em><\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n<p><strong>Cynthia Noury\u00a0:\u00a0Tu as mentionn\u00e9e, d\u2019allier la technologique, les mat\u00e9riaux, le lieu, pour cr\u00e9er des sensations mais quand tu es en train d\u2019imaginer un projet, d\u2019o\u00f9 pars-tu pour arriver \u00e0 de tels r\u00e9sultats\u00a0? J\u2019imagine que \u00e7a d\u00e9pend d\u2019une fois \u00e0 l\u2019autre\u2026<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;Je crois que cette fa\u00e7on d\u2019en parler maintenant, c\u2019est relativement nouveau pour moi. Mais \u00e7a rel\u00e8ve du fait de ne pas savoir ce qui va se passer, de travailler d\u2019une mani\u00e8re exp\u00e9rimentale avec les mat\u00e9rialit\u00e9s, en fonction d\u2019une exp\u00e9rience longue que j\u2019ai avec la vid\u00e9o, la projection, les senseurs et plus r\u00e9cemment avec la performance audiovisuelle que j\u2019appelle l\u2019installation performative.&nbsp;<\/p>\n\n\n\n<p>Quand j\u2019ai lu\u00a0<em>Le spectateur \u00e9mancip\u00e9<\/em>\u00a0et\u00a0<em>Le partage du sensible<\/em>\u00a0du philosophe\u00a0Jacques Ranci\u00e8re\u00a0\u2013 \u00e0 propos de l\u2019\u00e9tymologie du mot<em>\u00a0aisthesis<\/em>\u00a0\u2013 j\u2019ai pu r\u00e9fl\u00e9chir sur la force de l\u2019art qui est d\u2019offrir quelque chose de l\u2019ordre de la sensation, une exp\u00e9rience politique que Ranci\u00e8re d\u00e9crit comme une \u00e9mancipation. Je pense plut\u00f4t que la question de la sensation provient d\u2019une \u00e9cologie de pratiques avec les mat\u00e9rialit\u00e9s, les gens et les technologies. C\u2019est l\u2019ensemble de ces \u00e9l\u00e9ments qui provoque la sensation dans mon cas. Par exemple, toutes sortes de sensations \u00e9mergent des projets qu\u2019on a faits avec les mati\u00e8res r\u00e9siduelles. L\u2019ensemble des sensations peut \u00eatre \u00e9quivoque, contradictoire. Par exemple, le site d\u2019enfouissement de d\u00e9chets n\u2019est pas un sujet que la plupart des gens souhaitent regarder. Mais en m\u00eame temps, une exp\u00e9rience esth\u00e9tique (ce qui ne veut pas dire n\u00e9cessairement que \u00e7a soit \u00ab\u00a0beau\u00a0\u00bb) en transforme la perception. Quelles exp\u00e9riences peut-on g\u00e9n\u00e9rer avec ce qui est rejet\u00e9\u00a0?<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Qu\u2019est-ce qui vous a amen\u00e9, toi et St\u00e9phane Claude, \u00e0 travailler \u00e0 partir du site d\u2019enfouissement de d\u00e9chets \u00e0 Lachenaie\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n<figure class=\"wp-block-embed aligncenter is-type-video is-provider-vimeo wp-block-embed-vimeo wp-embed-aspect-16-9 wp-has-aspect-ratio\"><div class=\"wp-block-embed__wrapper\">\n<iframe loading=\"lazy\" title=\"LSCDC, 2014. En collaboration raumlabor (Berlin) et Goethe-Institut Montr&amp;eacute;al\" src=\"https:\/\/player.vimeo.com\/video\/148804125?h=db983eaab5&amp;dnt=1&amp;app_id=122963\" width=\"500\" height=\"281\" frameborder=\"0\" allow=\"autoplay; fullscreen; picture-in-picture\" allowfullscreen><\/iframe>\n<\/div><figcaption class=\"wp-element-caption\"><em>\u00c6lab, LSCDC, 9-10-11 octobre 2014<\/em><\/figcaption><\/figure>\n\n\n\n<p>G. T. :\u00a0La s\u00e9rie a commenc\u00e9 avec le traitement des eaux us\u00e9es, on a d\u2019abord \u00e9tudi\u00e9 le travail du biologiste\u00a0John Todd\u00a0 et les\u00a0<em>EcoMachines<\/em>, ce qui nous a amen\u00e9 \u00e0 \u00e9tudier l\u2019usine de traitement des eaux us\u00e9es \u00e0 Montr\u00e9al, dans le projet\u00a0<em>LSCDC\u00a0<\/em>(2006-2014). Le projet\u00a0<em>L\u2019espace du milieu<\/em>\u00a0(2011) \u00a0s\u2019inspirait du probl\u00e8me de la pollution atmosph\u00e9rique. \u00c0 la suite de ces exp\u00e9riences, nous nous sommes dit\u00a0: \u00ab\u00a0 l\u00e0, il nous manque quelque chose, allons vers les sites d\u2019enfouissement. \u00bb Nous avons ensuite r\u00e9alis\u00e9 deux projets \u00e0 partir de celui-ci. D\u2019abord\u00a0<em>Forces et milieux\u00a0<\/em>(2011), qui \u00e9tait une installation performative. Et plus tard, l\u2019ensemble de ces exp\u00e9rimentations est devenu\u00a0<em>Milieux associ\u00e9s\u00a0<\/em>en 2014, dans une nouvelle manifestation des m\u00eames pr\u00e9occupations. Il nous a sembl\u00e9 important de reconna\u00eetre ce qui se produit sur le territoire montr\u00e9alais, de comprendre les enjeux de nos municipalit\u00e9s, pour ensuite voir ce qui se produit ailleurs. Il \u00e9tait important de se pencher d\u2019abord sur ce qui se passe ici. L\u2019id\u00e9e \u00e9tait d\u2019amener concr\u00e8tement, pour le public, la\u00a0 mati\u00e8re r\u00e9siduelle dans des exp\u00e9riences esth\u00e9tiques singuli\u00e8res alliant mat\u00e9rialit\u00e9s et technologies num\u00e9riques.<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Gis\u00e8le, tu viens de la vid\u00e9o et des arts m\u00e9diatiques. Et j\u2019ai l\u2019impression que cet aspect d\u2019int\u00e9gration de ta d\u00e9marche \u00e0 l\u2019art public et \u00e0 la communaut\u00e9 s\u2019est produit graduellement. Comment s\u2019est fait ce glissement de la vid\u00e9o \u00e0 l\u2019\u00ab\u00a0installation performative\u00a0\u00bb\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :\u00a0J\u2019ai une pratique de presque trente ans maintenant, j\u2019ai donc \u00e9t\u00e9 h\u00e9riti\u00e8re d\u2019un certain modernisme par rapport aux arts m\u00e9diatiques, m\u00eame si j\u2019ai toujours appr\u00e9ci\u00e9 la pratique des arts \u00e9lectroniques pour ses capacit\u00e9s de g\u00e9n\u00e9rer des sensations nouvelles. Auparavant, j\u2019\u00e9tais dans un rapport qui \u00e9tait plus formaliste, mais toujours en m\u2019int\u00e9ressant \u00e0 ce qui pouvait se produire chez le spectateur ou le visiteur\u00a0: une sensation. Avec l\u2019av\u00e8nement d\u2019<em>\u00c6lab<\/em>, ma pratique a commenc\u00e9 \u00e0 bifurquer. C\u2019\u00e9tait au milieu des ann\u00e9es 1990. Beaucoup de choses se produisaient alors avec les arts m\u00e9diatiques. Je pense particuli\u00e8rement \u00e0 l\u2019arriv\u00e9e de l\u2019ordinateur portable disponible \u00e0 un nombre croissant de gens et d\u2019artistes. J\u2019utilisai la vid\u00e9o en format\u00a0Betacam. J\u2019ai fait du montage en ligne pendant plusieurs ann\u00e9es, ce qui m\u2019a permis de gagner ma vie. Je faisais du design graphique, pour d\u2019autres artistes, dans le communautaire, jamais dans le corporatif. Et le changement technologique est arriv\u00e9. Les nouvelles possibilit\u00e9s devenaient de plus en plus abordables pour les artistes et cela a fait \u00e9voluer notre pratique.<\/p>\n\n\n\n<p>\u00c0 l\u2019\u00e9poque, j\u2019\u00e9tais impliqu\u00e9e dans les centres d\u2019artistes autog\u00e9r\u00e9s depuis longtemps.\u00a0Et les ann\u00e9es 1990 co\u00efncident avec l\u2019arriv\u00e9e des Festivals\u00a0Mutek\u00a0et\u00a0Elektra\u00a0\u00e0 Montr\u00e9al. C\u2019\u00e9tait extr\u00eamement b\u00e9n\u00e9fique, parce que les artistes prenaient en main leur propre diffusion. Mais en m\u00eame temps, je sentais parfois que le discours pouvait se refermait sur lui-m\u00eame. Au d\u00e9part, nous avions besoin, St\u00e9phane et moi, d\u2019aller vers quelque chose de plus anonyme, donc de former\u00a0<em>\u00c6lab<\/em>\u00a0en s\u2019ouvrant aux pratiques d\u2019autres personnes. L\u2019un comme l\u2019autre, nous avons toujours \u00e9t\u00e9 technophiles. Cette exp\u00e9rience nous a permis de partir de nos acquis et de nos apprentissages. Ainsi, l\u2019installation performative s\u2019est manifest\u00e9e d\u00e8s 2006 avec le projet\u00a0<em>LSCDC (light, sweet, cold, dark, crude<\/em>, 2006-2014),<em>\u00a0<\/em>sur le traitement des eaux us\u00e9es. Nous \u00e9tions \u00e0 l\u2019\u00e9poque des \u00abrats de studio\u00bb\u00a0: tr\u00e8s m\u00e9ticuleux en postproduction. Nous \u00e9tions dans cette qu\u00eate de perfection qui \u00e9tait plut\u00f4t illusoire. Quand nous avons d\u00e9cid\u00e9 de changer notre m\u00e9thode de travail, nous nous sommes mis en p\u00e9ril. Ce fut r\u00e9ellement b\u00e9n\u00e9fique pour notre pratique. C\u2019est \u00e0 ce moment-l\u00e0 que nous avons int\u00e9gr\u00e9 la notion de performance en cr\u00e9ant des dispositifs qui peuvent exister de mani\u00e8re autonome, mais avec une intervention ponctuelle qui transforme la dynamique de l\u2019espace dans lesquels les installations sont activ\u00e9es.<\/p>\n\n\n\n<p>Au sein d\u2019<em>\u00c6lab<\/em>, St\u00e9phane Claude et moi&nbsp; travaillons souvent avec d\u2019autres personnes. Nous nous sommes nourris des pratiques des autres, de collaborateurs pr\u00e9cieux, au fil des ans\u2026 Nous nous disons, \u00ab&nbsp;l\u2019art, c\u2019est de remettre notre subjectivit\u00e9 en question\u00bb. Faire des choses en direct nous a motiv\u00e9 \u00e0 cet \u00e9gard. Et pr\u00e9sentement, nous sommes dans une p\u00e9riode nouvelle, on ne sait pas ce qui va se passer pour&nbsp;<em>\u00c6lab<\/em>. C\u2019est tr\u00e8s int\u00e9ressant.&nbsp;<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Le titre de votre \u0153uvre\u00a0<em>Milieux associ\u00e9s<\/em>\u00a0(2014) est une r\u00e9f\u00e9rence directe\u00a0au travail du philosopheGilbert Simondon. Il est l\u2019auteur de plusieurs ouvrages sont les deux principaux sont\u00a0<em>L\u2019individuation \u00e0 la lumi\u00e8re des notions de forme et d\u2019information\u00a0 (connu dans les milieux philosophiques sous l\u2019acronyme ILFI)<\/em>\u00a0et\u00a0<em>Du mode d\u2019existence des objets techniques\u00a0(connu sou l\u2019acronyme\u00a0<\/em>MEOT), parus dans les ann\u00e9es 1950. La philosophie de Gilbert Simondon n\u2019est pas d\u2019un humanisme qui met l\u2019humain au centre de l\u2019univers, mais qui le place plut\u00f4t comme \u00e9l\u00e9ment d\u2019un milieu associ\u00e9 o\u00f9 les relations entre l\u2019individuation de chaque \u00eatre est sujette \u00e0 un processus dynamique et toujours en mouvement \u00e0 travers son milieu associ\u00e9, son environnement mais dont il est pleinement partie prenante. Dans tes propositions artistiques, j\u2018ai l\u2019impression que tu travailles en respectant cette mani\u00e8re de \u00ab\u00a0concevoir le monde\u00a0\u00bb.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;Effectivement.&nbsp; La rencontre fortuite avec Simondon s\u2019est pass\u00e9e sensiblement \u00e0 la m\u00eame \u00e9poque que le projet&nbsp;<em>LSCDC<\/em>. Initialement, j\u2019avais lu ce mot dans un livre d\u2019informatique. Prenons comme exemple la lumi\u00e8re&nbsp;: elle cr\u00e9e de la chaleur, et en m\u00eame temps, de l\u2019\u00e9clairage. Je me suis int\u00e9ress\u00e9e alors \u00e0 cette notion de \u00ab&nbsp;transduction&nbsp;\u00bb, ne connaissant pas encore la pens\u00e9e de Simondon. Dans la recherche universitaire, on parle de d\u00e9duction, d\u2019induction, d\u2019abduction. Alors, qu\u2019est-ce que c\u2019est la transduction&nbsp;? \u00c9videmment avec le pr\u00e9fixe&nbsp;<em>trans<\/em>, il y a passage \u00e0 travers quelque chose. Puis le suffixe&nbsp;<em>duction<\/em>&nbsp;d\u00e9signe un canal ou un conduit.&nbsp;Le terme pourrait \u00e9voquer quelque chose qui passe \u00e0 travers un conduit tout en \u00e9tant en relation avec d\u2019autres \u00e9l\u00e9ments. Est-ce que le conduit est poreux&nbsp;? St\u00e9phane avait trouv\u00e9 une r\u00e9f\u00e9rence en ligne \u00e0 Simondon, o\u00f9 la transduction \u00e9tait pr\u00e9sent\u00e9e comme une relation de plusieurs relations. On a alors commenc\u00e9 \u00e0 creuser son concept de&nbsp;<em>transduction.<\/em><\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Simondon a d\u2019ailleurs cr\u00e9\u00e9 le terme\u00a0<em>allagmatique<\/em>\u00a0pour d\u00e9signer la science qui permet d\u2019\u00e9tudier les relations op\u00e9ratoires entre des processus distincts et interreli\u00e9s. La\u00a0<em>transduction<\/em>\u00a0fait partie de ces processus.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;Dans sa th\u00e9orie de l\u2019individuation, la&nbsp;<em>transduction<\/em>&nbsp;nait d\u2019un processus, il y a un \u00e9l\u00e9ment d\u00e9clencheur dans un environnement m\u00e9tastable, sous tension, qui am\u00e8ne un nouvel agencement des mati\u00e8res et forces en pr\u00e9sence. Par sa th\u00e9orie, il a d\u00e9fait la pens\u00e9e de l\u2019atomisme et du substantialisme. Ainsi \u00e9merge une d\u00e9finition tr\u00e8s particuli\u00e8re de ce qu\u2019est une&nbsp;<em>relation<\/em>. Quand Simondon parle de l\u2019ontologie, ce n\u2019est jamais reli\u00e9 exclusivement \u00e0 l\u2019humain. L\u2019ontologie, pour lui, est l\u2019\u00eatre (c\u2019est-\u00e0-dire la&nbsp;<em>relation<\/em>) qui se cr\u00e9e.&nbsp;<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Et un \u00ab\u00a0\u00eatre\u00bb, \u00e7a peut \u00eatre un \u00eatre vivant ou un \u00eatre technique.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;Absolument. \u00c0 ma connaissance, son concept d\u2019individu technique est unique en France dans les ann\u00e9es 1950.&nbsp;<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Lorsque tu utilises l\u2019expression \u00ab\u00a0individu technique\u00a0\u00bb, tu l\u2019utilises comment\u00a0? Comment le per\u00e7ois-tu\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;Quand j\u2019ai commenc\u00e9 \u00e0 faire ces installations performatives en direct avec la vid\u00e9o, j\u2019ai voulu analyser la relation avec le stylet et le dessin sur une tablette graphique. Je suis fascin\u00e9e par le stylet. Il poss\u00e8de en fait une histoire extr\u00eamement longue qui vient des premi\u00e8res inscriptions sur la mati\u00e8re en M\u00e9sopotamie, puis avec les \u00c9gyptiens, etc. Et ce que Simondon propose, c\u2019est que l\u2019objet technique n\u2019est pas l\u00e0 pour servir l\u2019humain. En fait il poss\u00e8de sa propre trajectoire (sa \u00ab&nbsp;gen\u00e8se\u00bb), qui r\u00e9pond \u00e0 toute une s\u00e9rie de conditions qui viennent non seulement de l\u2019humain mais aussi de l\u2019environnement. Par exemple, lorsque l\u2019inscription se faisait sur de l\u2019argile dans une r\u00e9gion du monde, dans un autre pays c\u2019\u00e9tait sur du papyrus\u2026 Tout cela a fait en sorte que l\u2019individu technique (le stylet, dans ce cas-ci) se transforme dans chaque situation, en fonction du processus qu\u2019il r\u00e9alise dans un endroit sp\u00e9cifique. En travaillant sur cette probl\u00e9matique, je suis arriv\u00e9e \u00e0 aborder diff\u00e9remment le stylet \u00e9lectronique d\u2019aujourd\u2019hui. Il effectue un \u00e9change \u00e9nerg\u00e9tique entre la puce num\u00e9rique, le modulateur et l\u2019\u00e9metteur du stylet et&nbsp;le capteur de la tablette avec son propre champ magn\u00e9tique. L\u2019interaction entre champs magn\u00e9tiques donne le dessin.&nbsp;Dans ce dispositif, il n\u2019y a &nbsp;plus de trace physique visible. Je suis devenue fascin\u00e9e par cette relation. C\u2019est Simondon qui m\u2019a permis de comprendre cette dimension dans ma pratique. Pour Simondon, la technologie est une relation entre la nature et l\u2019humain.<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Et les \u00eatres techniques sont interreli\u00e9s, donc l\u2019humain ne se pla\u00e7ant pas au centre de cet univers sp\u00e9cifique, il est tributaire des autres \u00eatres, incluant les plantes et les animaux, les \u00eatres techniques et les autres dans l\u2019ensemble de l\u2019environnement. Et cela se traduit notamment \u00e0 travers ces objets techniques, comme celui que tu d\u00e9cris, le stylet, lequel pour Simondon devient ensuite une mani\u00e8re pour l\u2019\u00eatre humain d\u2019entrer en relation avec l\u2019environnement, le milieu associ\u00e9.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;C\u2019est-\u00e0-dire qu\u2019il y a toute une s\u00e9rie d\u2019individuations. L\u2019individuation n\u2019est pas le domaine exclusif de l\u2019humain, c\u2019est ce qui m\u2019a attir\u00e9e chez Simondon. Il interroge ce qui circule&nbsp;<em>avec<\/em>,&nbsp;<em>\u00e0 travers<\/em>&nbsp;et&nbsp;<em>en nous<\/em>. Simondon propose que ce soit \u00e0 travers l\u2019individuation que l\u2019on puisse graduellement r\u00e9aliser l\u2019\u00eatre (la relation). Par cons\u00e9quent, rien n\u2019est donn\u00e9 \u00e0 l\u2019avance. Quand on poursuit une pratique artistique, on r\u00e9fl\u00e9chit beaucoup \u00e0 ces questions. D\u2019o\u00f9 viennent les id\u00e9es? Est-ce que l\u2019id\u00e9e vient au contact de la mat\u00e9rialit\u00e9, ou de la pens\u00e9e de l\u2019art qui se mat\u00e9rialise&nbsp;ensuite? Selon moi, c\u2019est dans la rencontre. Le&nbsp;<em>milieu<\/em>&nbsp;pourrait s\u2019appeler&nbsp;<em>environnement<\/em>. Or, dans la m\u00e9taphysique occidentale on a longtemps sous-entendu que l\u2019humain est s\u00e9par\u00e9 de la nature, l\u2019environnement est ce qui \u00ab&nbsp;l\u2019entoure&nbsp;\u00bb. Voil\u00e0 ce que Simondon a voulu r\u00e9tablir&nbsp;: il y a plusieurs milieux et tous ces milieux-l\u00e0 changent \u00e0 travers les&nbsp;<em>relations<\/em>&nbsp;qui d\u00e9ferlent, qui s\u2019ouvrent au changement. Il s\u2019agit de suivre les rencontres qui s\u2019articulent dans le temps.<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Dans ton \u0153uvre\u00a0<em>Milieux associ\u00e9s<\/em>, que tu as cocr\u00e9\u00e9e avec St\u00e9phane Claude en 2014, il y a une s\u00e9rie de dispositifs qui semblent assez myst\u00e9rieux quand on regarde la documentation photographique. En regardant les images, on peut imaginer toutes sortes de choses, mais on n\u2019a pas toutes les cl\u00e9s pour comprendre exactement ce qui s\u2019y passe, ce qu\u2019on pouvait y faire, ce qu\u2019on pouvait y vivre.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;<em>Milieux associ\u00e9s<\/em>&nbsp;semble \u00eatre \u2013 \u00e0 ce moment-l\u00e0 en 2014 \u2013 la r\u00e9sultante de l\u2019ensemble des projets qui ont pr\u00e9c\u00e9d\u00e9 portant sur la mati\u00e8re r\u00e9siduelle. Il s\u2019y trouvait des traces de la plupart de nos projets ant\u00e9rieurs r\u00e9unis dans ce nouvel agencement, mais avec l\u2019addition d\u2019un nouvel \u00e9l\u00e9ment, un mylar thermor\u00e9flecteur, fait par la NASA. C\u2019est un mat\u00e9riau, un genre de couverture qu\u2019on voit par exemple quand les gens finissent une course, ou en camping, ou bien en situation d\u2019urgence, pour conserver la chaleur \u00e9mise par le corps. C\u2019est un objet que j\u2019ai trouv\u00e9 par hasard lorsque je passais par l\u2019a\u00e9roport de Houston et que je suis tomb\u00e9e sur une boutique de la NASA. J\u2019ai achet\u00e9 l\u2019objet que je trouvais extr\u00eamement beau, m\u00eame l\u2019emballage \u00e9tait magnifique. Puis quand je l\u2019ai ouvert, j\u2019ai compris qu\u2019il allait devenir le prochain \u00e9cran de projection. Car \u00e0 travers tous ces projets, je cherchais toujours une mani\u00e8re de r\u00e9unir plusieurs \u00e9l\u00e9ments et pr\u00e9occupations \u00e0 travers un dispositif de projection. Dans&nbsp;<em>LSCDC<\/em>, j\u2019avais d\u00e9velopp\u00e9 une certaine mani\u00e8re de faire, ensuite une autre dans&nbsp;&nbsp;<em>Milieux associ\u00e9s<\/em>,&nbsp;<em>L\u2019espace du milieu<\/em>,&nbsp;<em>Forces et milieux<\/em>, etc.&nbsp;<em>Milieux associ\u00e9s<\/em>&nbsp;est devenu le \u00ab&nbsp;milieu associ\u00e9&nbsp;\u00bb de tous les projets ant\u00e9rieurs, dans une nouvelle configuration qui permettait, avec le mylar pliss\u00e9 de la NASA offrant ainsi une possibilit\u00e9 de diffracter la lumi\u00e8re d\u2019une mani\u00e8re singuli\u00e8re. La projection arrivait sur cette surface, puis s\u2019\u00e9parpillait partout dans l\u2019espace, dans des train\u00e9es lumineuses. C\u2019\u00e9tait extraordinaire. Des senseurs (de mouvement, de proximit\u00e9) \u00e9taient int\u00e9gr\u00e9s \u00e0 l\u2019installation : l\u2019activit\u00e9 de la membrane \u00e9tait affect\u00e9e par des ventilateurs qui lui insufflaient des pouss\u00e9es d\u2019air, donc elle tournait sur elle-m\u00eame, mais pas d\u2019une mani\u00e8re exag\u00e9r\u00e9e. C\u2019\u00e9tait vraiment subtil, tout en produisant un mouvement tr\u00e8s perceptible. Et aussi un son. Sous l\u2019impulsion de la lumi\u00e8re et du vent il y avait du son qui \u00e9mergeait de cette membrane. Donc, elle faisait plusieurs choses \u00e0 la fois : elle diffractait la vid\u00e9o, elle cr\u00e9ait des perc\u00e9es o\u00f9 on pouvait voir la vid\u00e9o sur le mur du fond, et elle g\u00e9n\u00e9rait son ombre sur le mur du fond, comme une perforation noire. Beaucoup de choses \u00e9taient r\u00e9unies gr\u00e2ce \u00e0 cette membrane-l\u00e0, qui permettait de jouer sur la rencontre entre la ligne du dessin dans la salle et les vid\u00e9os des r\u00e9sidus qui deviennent source de nouvelles exp\u00e9riences v\u00e9cues. Cette chose que l\u2019on rejette, que l\u2019on souhaite ne pas voir, devient quelque chose d\u2019extr\u00eamement intrigant et myst\u00e9rieux.<\/p>\n\n\n\n<p><strong>C. N. :\u00a0Un mot que tu viens d\u2019utiliser\u00a0: la\u00a0<em>ligne<\/em>. Il y a tout cet aspect-l\u00e0 aussi dans ton travail qui est aussi associ\u00e9 au\u00a0<em>Grupmuv<\/em>\u00a0qui est l\u2019id\u00e9e du dessin en mouvement, la simple ligne en mouvement. O\u00f9 est-ce que \u00e7a se retrouve dans tes \u0153uvres, dans ta cr\u00e9ation\u00a0?<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;Dans le&nbsp;<em>Grupmuv<\/em>&nbsp;c\u2019est un peu particulier dans mon cas, parce que je consid\u00e8re que le dessin est un op\u00e9rateur. Je ne suis pas en train de faire un dessin figuratif ou repr\u00e9sentationnel. Parfois, on peut voir une ligne qui se faufile, l\u00e0 \u00e0 travers la vid\u00e9o. Mais le dessin est plut\u00f4t un moyen de composer l\u2019image vid\u00e9o en direct. On peut trouver la gen\u00e8se de cette recherche dans nos premi\u00e8res exp\u00e9riences au Nanolab \u00e0 l\u2019universit\u00e9 McGill en 2003, mentionn\u00e9es au d\u00e9but de cet entretien. Parce qu\u2019un des microscopes utilis\u00e9s dans ce labo est le microscope \u00e0 forces atomiques qui produit l\u2019image par le contact entre une pointe et la surface de l\u2019\u00e9chantillon \u2013 tout comme le principe du tourne-disque&nbsp;\u2013 la pointe du microscope scrute la topographie de l\u2019\u00e9chantillon. Quand j\u2019ai commenc\u00e9 \u00e0 travailler avec le stylet, je me suis dit, \u00abje suis en train de sculpter la mati\u00e8re\u00bb. Mais ce n\u2019\u00e9tait pas \u00ab&nbsp;moi&nbsp;\u00bb qui sculptait, c\u2019\u00e9tait moi et le stylet. C\u2019est moi avec l\u2019\u00e9nergie \u00e9lectrique, \u00e9lectronique du stylet et la mat\u00e9rialit\u00e9. Je le comprends comme une modification de la mat\u00e9rialit\u00e9 par l\u2019exp\u00e9rimentation.<\/p>\n\n\n\n<p><strong>C. N. :\u00a0R\u00e9ellement, la notion de milieu associ\u00e9 est pr\u00e9sente \u00e0 plusieurs niveaux dans ton travail.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;La philosophie de Simondon qui m\u2019a permis de comprendre ce que je faisais. R\u00e9ciproquement, je sens que je suis en train de nourrir la philosophie en faisant les \u0153uvres dont nous discutons.&nbsp;<\/p>\n\n\n\n<p>Quant au dessin, j\u2019ai explor\u00e9 ses sources dans les techniques qui viennent de la Renaissance et de l\u2019invention de la perspective (<em>disegno<\/em>). Il y a en fait plusieurs types de perspectives. Il n\u2019y a pas simplement une perspective qui est la repr\u00e9sentation de la nature sur une surface plane, ce qui repr\u00e9sente la notion de contr\u00f4le sur la nature (de par sa repr\u00e9sentation). Il existe plusieurs types de\u00a0<em>disegno<\/em>, qui se distinguent par rapport \u00e0 la notion de plan. Il y a la notion de projet. Il y a aussi tout le syst\u00e8me des beaux arts qui en est h\u00e9ritier. La th\u00e9oricienne Joselita Ciaravino m\u2019a influenc\u00e9 par ses propres recherches sur le\u00a0<em>disegno<\/em>. J\u2019aime citer une pratique int\u00e9ressante de L\u00e9onard de Vinci\u00a0: lorsqu\u2019il dessinait le contour des objets \u00e0 la lumi\u00e8re de chandelle\u2026 la ligne dessin\u00e9e ne donne pas une forme reconnaissable, le dessin est une vibration entre lumi\u00e8re et mati\u00e8re. Pour moi, c\u2019est ce dessin que j\u2019essaie de mettre en \u0153uvre au sein du\u00a0<em>Grupmuv<\/em>, par la performance, dans la performance. Le stylet produit cette visualisation.<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0Tu as aussi entrepris un travail sur la transposition d\u2019un ph\u00e9nom\u00e8ne \u00e0 un autre comme tu viens de le d\u00e9crire. On le retrouve dans l\u2019\u0153uvre qui s\u2019appelle\u00a0<em>Irradier<\/em>, projet r\u00e9cent\u00a0 pr\u00e9sent\u00e9 au Congr\u00e8s de l\u2019ACFAS et \u00e0 la BIAN 2016. Cette \u0153uvre-l\u00e0 propose aussi un travail sur la mati\u00e8re r\u00e9siduelle, mais cette fois en termes de visualisation de quelque chose d\u2019audible, une sorte de\u00a0<em>visualification<\/em>.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :\u00a0Je pensais que ma recherche sur les mati\u00e8res r\u00e9siduelles \u00e9tait termin\u00e9e en 2014 avec le projet\u00a0<em>Milieux associ\u00e9s<\/em>. Puis j\u2019ai fait par hasard la rencontre de Guillaume Arsenault, un jeune artiste et programmeur informatique. Nous avons commenc\u00e9 \u00e0 discuter de ces probl\u00e9matiques et j\u2019ai alors r\u00e9alis\u00e9 qu\u2019il y avait un point mort \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur de ce corpus. Je me disais\u00a0: comment puis-je parler de l\u2019<em>e-waste\u00a0<\/em>(<em>electronic waste<\/em>) et de ces cons\u00e9quences\u00a0? La d\u00e9marche documentaire habituelle d\u2019<em>\u00c6lab<\/em>\u00a0est d\u2019aller sur les lieux pour faire la recherche. Mais il aurait \u00e9t\u00e9 difficile pour moi \u00e0 ce moment-l\u00e0 de me rendre en Afrique ou en Asie pour constater ce qui s\u2019y passe avec les\u00a0<em>e-waste<\/em>\u00a0import\u00e9s de l\u2019occident. De cette r\u00e9flexion a \u00e9merg\u00e9 le nouveau projet,\u00a0\u00a0<em>Irradier<\/em>, portant sur la pollution \u00e9lectromagn\u00e9tique dans le milieu urbain. Guillaume m\u2019a montr\u00e9 le logiciel\u00a0Gqrx SDR\u00a0(<em>Software Defined Radio<\/em>). J\u2019ai alors vu la possibilit\u00e9 que l\u2019action du stylet soit r\u00e9activ\u00e9e par l\u2019antenne, elle est aussi un capteur avec une pointe, pouvant montrer les diff\u00e9rentes fr\u00e9quences radio qui traversent le lieu public. On a ainsi travaill\u00e9 dans un registre de fr\u00e9quences que l\u2019antenne pouvait capter. Cela a donn\u00e9 la projection par ce logiciel sur la fa\u00e7ade du pavillon Pr\u00e9sident-Kennedy de l\u2019UQAM, au Quartier des spectacles. On y voit, sous forme graphique en mouvement, les fr\u00e9quences qui traversent le lieu\u2026<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. :\u00a0&#8230; et qui se trouvent sp\u00e9cifiquement dans un environnement imm\u00e9diat Donc, ce qu\u2019on a face \u00e0 nous c\u2019est ce qui passe\u00a0<em>\u00e0 travers<\/em>\u00a0nous.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;Nous avons travaill\u00e9 avec le vent et les fr\u00e9quences capt\u00e9es par l\u2019antenne. Une fois la fr\u00e9quence s\u00e9lectionn\u00e9e de mani\u00e8re al\u00e9atoire par le logiciel, la force du vent venant d\u2019un an\u00e9mom\u00e8tre vient \u00abpousser\u00bb cette fr\u00e9quence et la \u00ab&nbsp;d\u00e9ambulation&nbsp;\u00bb dans les fractions de celle-ci. Ce n\u2019est plus l\u2019action humaine qui g\u00e9n\u00e8re le dessin comme dans mon travail auparavant, mais quelque chose que l\u2019on ressent et qu\u2019on ne peut pas voir&nbsp;: l\u2019action combin\u00e9e du vent et des fr\u00e9quences \u00e9lectromagn\u00e9tiques qui dessinent&nbsp;<a><\/a>le lieu.<\/p>\n\n\n\n<p><strong>C. N. : Ce qui est hallucinant avec cette projection, c\u2019est aussi le fait que le pavillon Pr\u00e9sident-Kennedy se transforme en \u00e9cran qui illustre ces zones qui nous traversent. On y voit une fr\u00e9quence \u00e0 la fois, mais en r\u00e9alit\u00e9 il y a une multiplicit\u00e9 de fr\u00e9quences qui nous traversent \u00e0 tout moment.<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T. :&nbsp;Exactement. Et pas juste nous, mais aussi tous les animaux, tous les \u00eatres vivants.&nbsp;<\/p>\n\n\n\n<p><strong>A. E. L. : Tout le milieu associ\u00e9.\u00a0<\/strong><\/p>\n\n\n\n<p>G. T.&nbsp;:<strong>&nbsp;<\/strong>Exactement. Et la question du milieu associ\u00e9 n\u2019est pas seulement une prise de conscience. Nous \u00e9voluons dans un milieu o\u00f9 les choses changent constamment. Nous cherchons comment d\u00e9celer des choses et leur changement, m\u00eame momentan\u00e9ment. Il me semble int\u00e9ressant de rendre visibles ces moments qui autrement, peuvent passer inaper\u00e7us et demeurent imperceptibles.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"<p>La recherche de\u00a0Gis\u00e8le Trudel\u00a0donne naissance \u00e0 des \u0153uvres qui, se d\u00e9ployant dans des environnements souvent complexes ou dans l\u2019espace public, d\u00e9placent les horizons d\u2019attente des spectateurs, tant de par leurs dimensions esth\u00e9tiques que par leurs formes novatrices en tant qu\u2019\u0153uvre d\u2019art.\u00a0Gis\u00e8le Trudel\u00a0travaille souvent en collaboration avec d\u2019autres artistes ou des chercheurs issus du milieu scientifique. &hellip; <a href=\"https:\/\/archee.uqam.ca\/septembre-2017-entrevue-avec-gisele-trudel\/\">Continued<\/a><\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":0,"comment_status":"open","ping_status":"open","sticky":false,"template":"","format":"standard","meta":{"footnotes":""},"categories":[10],"tags":[63],"acf":[],"_links":{"self":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/928"}],"collection":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts"}],"about":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/types\/post"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/users\/1"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/comments?post=928"}],"version-history":[{"count":2,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/928\/revisions"}],"predecessor-version":[{"id":931,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/928\/revisions\/931"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/media?parent=928"}],"wp:term":[{"taxonomy":"category","embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/categories?post=928"},{"taxonomy":"post_tag","embeddable":true,"href":"https:\/\/archee.uqam.ca\/wp-json\/wp\/v2\/tags?post=928"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}